Le Droit de la concurrence, premier tome du Traité de droit économique, expose, en deux livres (Tome 1/2. Droit européen ; Tome 2/2. Droit français) l’ensemble des règles de concurrence : ententes et abus de domination, procédure de concurrence, concentrations, aides d’État, négociation commerciale, et concurrence déloyale.

Droit français de la concurrence

Le parasitisme consiste à utiliser la valeur économique du travail d'un tiers pour s'introduire sur un marché . L'action en concurrence déloyale sanctionne, en cas de parasitisme, l'"usurpation d'une valeur économique, fruit d'un savoir-faire et d'un travail intellectuel", qui n'est protégée par aucun droit spécifique . L'entreprise investit, crée, acquiert un savoir-faire ou une technique qui lui procure un avantage concurrentiel, dont le parasite cherche à bénéficier en adoptant un comportement suiveur . L'usurpation de savoir-faire est dommageable dans la mesure où elle aboutit à priver le parasité d'une valeur patrimoniale . 

L'usurpation résulte soit de la reprise des éléments de la réussite commerciale du concurrent  (modèle, emballage , documents commerciaux et textes de présentation , agencement du magasin , design d'un stand , concept publicitaire ) soit de l'utilisation de plans ou de projets établis par un concurrent dans le cadre de relations contractuelles ou précontractuelles , du détournement de bases de données, du fichier service après-vente, des fichiers clients et fournisseurs, des bons de commandes et d'intervention, des devis  de matériel et de maintenance ou encore des brochures commerciales . Le fait, pour une entreprise exploitant un restaurant sous une enseigne franchisée, de profiter gratuitement des travaux réalisés par l'animateur d'un autre réseau de franchise qu'elle devait rejoindre, avant de rompre tardivement les discussions précontractuelles, pour finalement exploiter son établissement sous une troisième enseigne, caractérise un acte de concurrence parasitaire tenant à l'utilisation d'une enseigne et d'éléments s'y rapportant développés par un autre acteur économique . Mais, pour qu'il y ait parasitisme, la preuve doit être apportée de la nouveauté et/ou de l'originalité des produits ou services concernés  . L'apport d'une fonctionnalité propre au produit argué de copie exclut tout parasitisme . L'offre de prestations identiques ou similaires à un prix identique, déterminées par l'entretien et la réparation des mêmes produits, selon les prescriptions des constructeurs, qui n'est que la traduction du jeu de la concurrence, ne caractérise pas un comportement parasitaire . En outre, lorsque le produit prétendument copié n'est qu'à l'état de recherche et de développement, son concepteur ne peut faire valoir le pillage d'un savoir-faire qu'il ne maîtrise pas . 

La seule similitude ne démontre toutefois pas l'appropriation du travail d'autrui  : la réalité de l'usurpation doit être prouvée , et non seulement alléguée . D'anciens salariés peuvent, sans faute, utiliser dans le cadre de leurs nouvelles fonctions le savoir-faire, l'expérience et les connaissances acquises au sein de leur ancienne entreprise . Le fait, pour une entreprise, d'avoir pu bénéficier du savoir-faire de son partenaire commercial durant une relation d'affaires de plus de deux ans au cours de laquelle quatre contrats successifs ont été conclus, puis d'avoir décidé de développer sa propre solution logicielle de manière indépendante, ne caractérise pas non plus un comportement parasitaire . Cependant, un recrutement ciblé qui a pour but l'acquisition à coût réduit des procédés de réglage de l'outil de fabrication d'un produit concurrent, issu d'investissements de recherche et de développement, peut caractériser un acte de parasitisme par détournement de savoir-faire . La volonté délibérée de s'inscrire dans le sillage d'un produit notoirement connu est établie par la reprise de l'ensemble des éléments caractérisant aux yeux du public le produit concurrent en ce qu'il a d'attractif . La preuve de la notoriété du savoir-faire, des investissements réalisés pour lui conférer une valeur économique et du caractère délibéré de son appropriation doit être apportée . Une société ne saurait reprocher à un concurrent, leader après l'opérateur historique sur le marché de la fibre de bout en bout, de s'être placée dans son sillage en profitant indûment de son savoir-faire et de sa notoriété, alors que, se situant en troisième position, elle est restée très lente sur le déploiement de son réseau .

L'originalité du savoir-faire doit aussi être établie  : la seule présentation d'un produit fromager dans un filet auquel une étiquette est fixée ne suffit pas à caractériser l'existence d'un savoir-faire ni celle d'un travail intellectuel susceptible d'être usurpé . L'entreprise qui détient un savoir-faire commun aux sociétés qui conçoivent et réalisent des produits similaires avec des procédés industriels analogues, bien qu'il puisse être particularisé sur certains points, ne peut arguer d'un savoir-faire propre, susceptible d'usurpation . De même, un éditeur ne peut reprocher à un concurrent d'adopter un modèle économique de distribution proche, mais non protégeable, en proposant une sélection de livres jeunesse au travers d'une offre d'abonnement par correspondance sans démontrer l'appropriation des éléments d'identification de ses fascicules ou de ses formules d'abonnement .

Versailles, 20 octobre 1993, LawLex200200001617JBJ, RJDA, 1994, nº 751; Rennes, 21 mai 2019, LawLex201900000696JBJ : le fait de détourner un produit non encore offert à la vente, dans le seul but d'en effectuer une copie suffisamment fidèle pour ne pas permettre au public de le distinguer, de la copie puis de commercialiser cette copie à un prix moindre dans un réseau de distribution similaire, sur la même période de commercialisation et le même secteur géographique, en usurpant les frais de développement exposés par l'entreprise plaignante pour rendre son produit attractif, constitue un acte de parasitisme. 

LE TOURNEAU, Des mérites et vertus de la responsabilité civile, Gaz. Pal., 1985, 1, Doctr. 283.

Cass. com., 12 février 2013, LawLex201300000180JBJ.

Besançon, 7 février 2017, LawLex201700000303JBJ : l'apparence similaire de devis entre deux concurrents qui disposent du même logiciel n'est pas de nature à créer une confusion auprès du public au détriment de l'une ou l'autre, notamment lorsque leurs logos sont très différents, dès lors que la présentation de devis ne constitue pas à elle seule un élément distinctif pour une entreprise.

Paris, 25 octobre 2013, LawLex201300001563JBJ.

Amiens, 21 février 2019, LawLex201900000279JBJ.

Cass. com., 16 septembre 2014, LawLex201400000956JBJ.

Toulouse, 4 novembre 2020, LawLex202000003049JBJ.

Cass. com., 5 avril 2018, LawLex201800000575JBJ.

Paris, 2 mars 2016, LawLex201600000481JBJ.

Cass. com., 16 mai 2000, LawLex200200000783JBJ, Bull. civ. 4, nº 103 ; Contrats Conc. Consom., 2000, nº 160, obs. MALAURIE-VIGNAL.

Versailles, 10 mai 2016, LawLex201600000939JBJ, qui retient que la protection accordée au producteur de base de données au titre de l'article L. 341-1 du Code de la propriété intellectuelle s'exerce sans préjudice de celles résultant du droit d'auteur ou d'un autre droit sur la base de données ou un de ses éléments constitutifs, de sorte que ce dernier peut agir en concurrence déloyale s'il justifie, non d'une simple extraction illicite, mais d'une faute et d'un préjudice causé par cette faute.

Cass. com., 6 septembre 2016, LawLex201600001414JBJ, Contrats Conc. Consom. 2016, n° 232, obs. MALAURIE-VIGNAL : une société d'intérim, qui à l'occasion de la constitution d'une équipe d'intérimaires, détourne huit ouvriers sur les dix-huit sélectionnés et présentés par sa concurrente au maître d'oeuvre avant qu'il ne rompe les pourparlers, adopte un comportement parasitaire dont le maître d'oeuvre s'est rendu complice en obtenant des tarifs horaires inférieurs à ceux proposés par le société parasitée.

Cass. com., 16 mai 2000, LawLex200200000783JBJ ; TGI Fontainebleau, 18 novembre 2009, LawLex200900003623JBJ, qui écarte le parasitisme dès lors que le détournement de secrets professionnels et commerciaux n'est pas établi.

Cass. com., 26 novembre 2013, LawLex201300001711JBJ. 

Paris, 8 décembre 2023, LawLex202300014618JBJ.

Cass. com., 8 novembre 2016, LawLex201600001902JBJ. Colmar, 16 janvier 2019, LawLex201900000054JBJ, précisant que pour démontrer le comportement parasitaire d'une société qui aurait lancé la commercialisation d'une gamme imitant la sienne grâce au débauchage de l'un de ses anciens salariés, une entreprise ne peut s'appuyer sur la décision, dépourvue d'autorité de la chose jugée, visant ce dernier, alors qu'il n'est pas partie au litige, par laquelle le conseil des prud'hommes aurait constaté un manquement grave à son obligation de loyauté, dès lors que cette juridiction est incompétente pour apprécier d'éventuels agissements de concurrence déloyale émanant d'une société.

Paris, 6 février 2002, LawLex200200000467JBJ ; Cass. 1re civ., 5 mai 1998, LawLex200200001132JBJ, excluant le parasitisme en cas d'emprunt partiel ; Cass. com., 26 janvier 1999, LawLex200200001014JBJ, D., 2000, 87, note SERRA ; RTD. com. 1999, 17, note IZORCHE ; D. Aff., 1999, 508 ; RJDA, 1999, nº 491, précisant que le comportement parasitaire répréhensible suppose la reprise de l'ensemble des éléments faisant l'originalité du concept. Pour un exemple de pillage systématique du savoir-faire économique des concurrents, Cass. com., 26 juin 2012, LawLex201200001235JBJ ; Paris, 17 février 2015, LawLex201500000257JBJ,  pour une société qui après avoir référencé un meuble, choisit délibérément de commercialiser un produit contrefaisant qui lui permet de bénéficier de l'attractivité et de la valeur économique du modèle original, tout en s'affranchissant de son approvisionnement.

Cass. 1re civ., 12 janvier 2012, LawLex201200000075JBJ. 

CA Paris, 15 octobre 2021, LawLex202100005689JBJ.

Cass. com., 15 janvier 2002, LawLex200200000566JBJ, excluant l'appropriation déloyale du savoir-faire, en l'absence d'originalité de la technique de démarchage employée, des documents commerciaux et des véhicules utilisés. - V. aussi, Rennes, 15 mai 2007, LawLex200900000136JBJ : rejet du grief de parasitisme, à défaut d'originalité des plans d'architecture prétendument copiés. Paris, 20 mars 2013, LawLex201300000480JBJ : la concurrence parasitaire suppose que celui qui en excipe puisse démontrer que son concurrent a procédé de façon illicite à la reproduction de données qui caractérisent son entreprise par la notoriété et l'originalité qui s'y attachent, elles-mêmes fruits d'un travail intellectuel et d'un investissement propre.

Cass. com., 18 décembre 2012, LawLex201200002508JBJ, qui estime que cette forme de présentation est d'un usage ancien et banal dans ce secteur et déjà connue pour d'autres produits alimentaires. 

 Paris, 21 novembre 2018, LawLex201800001810JBJ. 

Cass. com., 25 février 2003, LawLex200300000873JBJ.

Aix-en-Provence, 29 novembre 2018, LawLex201800001867JBJ.

Cass. com., 8 décembre 2015, LawLex201500001721JBJ, AJCA 2016, 93, obs. LECOURT ; RJDA 2016, n° 334, pas d'usurpation du savoir-faire concédé, par un ancien membre d'un réseau de boulangeries-pâtisseries, après résiliation du contrat de licence, dès lors qu'il justifie avoir changé l'agencement de son magasin ainsi que la ligne de fabrication et la variété des produits commercialisés. 

TGI Paris, 27 septembre 2013, LawLex201400001204JBJ : le fait de proposer aux acheteuses dans le cadre d'une stratégie commerciale un rangement plastifié pour leur maillot mouillé présentant une forme identique au modèle exploité, sous licence exclusive, par la société plaignante pour lequel cette dernière verse des redevances, constitue un acte de concurrence parasitaire, dans la mesure où le parasite bénéficie ainsi d'un avantage concurrentiel injustifié, fruit d'investissements.  

Paris, 2 octobre 2014, LawLex201400000998JBJ, copie du texte de présentation d'un circuit touristique proposé par un tour opérateur concurrent.

Paris, 1er juillet 1993, LawLex200200001630JBJ, pour un ancien salarié qui ouvre son propre magasin en reprenant à l'identique certains éléments du savoir-faire de son ancien employeur, tels la disposition du matériel, les couleurs de la décoration et les tenues vestimentaires ; Cass. com., 8 novembre 1994, LawLex200200001524JBJ, pour une société qui imite les modèles et utilise les mêmes emballages et documents commerciaux que la société dont elle commercialisait les produits.

Paris, 21 février 2024, LawLex202400001660JBJ : la société qui s’est approprié l'investissement intellectuel et le savoir-faire d’une autre en réutilisant la conception et le design d’un stand que celle-ci lui avait fournis, en vue de futures relations contractuelles, s’est immiscée dans le sillage de cette dernière afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire. 

Paris, 7 janvier 2016, LawLex201600000025JBJ : reprise du concept “roadshow” de la campagne publicitaire du concurrent pour commercialiser des produits similaires.

105. Usurpation d'un savoir-faire.