Le droit européen et français applicable aux réseaux de distribution.
Le Droit de la distribution, deuxième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : approvisionnement et fourniture exclusifs, distribution exclusive, distribution sélective, distribution automobile.

Droit français de la distribution

L'ordonnance de réforme du droit des contrats a significativement modifié les dispositions relatives à la mise en oeuvre des clauses résolutoires. Comme par le passé, les parties fixent librement les modalités de la rupture. Toutefois, le nouvel article 1225 du Code civil pose trois exigences formelles : la clause résolutoire doit préciser les engagements dont l'inexécution entraînera la résolutio …

Mise en demeure préalable et faculté de déroger aux conditions de la clause résolutoire.

L'ordonnance de réforme du droit des contrats a significativement modifié les dispositions relatives à la mise en oeuvre des clauses résolutoires. Comme par le passé, les parties fixent librement les modalités de la rupture. Toutefois, le nouvel article 1225 du Code civil pose trois exigences formelles : la clause résolutoire doit préciser les engagements dont l'inexécution entraînera la résolution du contrat ; cette dernière est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, si les parties n'ont pas convenu qu'elle pourrait résulter du seul fait de l'inexécution ; la mise en demeure doit, pour produire effet, mentionner expressément la clause résolutoire. Dès lors que la clause résolutoire est mise en œuvre dans les conditions prévues au contrat, la résiliation ne saurait revêtir de caractère abusif , sous réserve qu'elle sanctionne un manquement grave aux obligations du cocontractant . Selon le nouvel article 1226, alinéa 4, la charge de la preuve de la gravité du manquement sanctionné pèse sur le créancier de l'obligation. Deux hypothèses doivent cependant être distinguées.

Lorsque la clause résolutoire prévoit une résiliation de plein droit à tout moment, comme le permet expressément le nouvel article 1225, alinéa 2, aucune mise en demeure préalable n'est exigée . Auparavant, si l'inexécution concernait une obligation de ne pas faire, il ressortait des dispositions de l'ancien article 1145 du Code civil qu'aucune mise en demeure n'était utile pour constater l'inexécution . La réforme est revenue sur cette règle : le nouvel article 1231 dispose ainsi qu'à moins que l'inexécution soit définitive, les dommages et intérêts ne sont dus que si le débiteur a préalablement été mis en demeure de s'exécuter dans un délai raisonnable, sans plus distinguer entre les obligations de faire et les autres types d'obligations.

Dans l'hypothèse où la clause résolutoire impose aux parties une obligation de mise en demeure préalable, il a été jugé que la mise en œuvre de la clause sans mise en demeure constituait une rupture brutale . Puis, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a admis qu'en cas de faute grave empêchant toute poursuite des relations, il pouvait y être dérogé, la gravité du comportement d'une partie pouvant justifier que le cocontractant mette fin au contrat unilatéralement et à ses risques et périls en dépit de l'existence et des modalités d'une clause résolutoire . Le nouveau Code civil ne consacre que partiellement cette solution. Si le nouvel article 1226 réserve expressément au créancier la faculté de résoudre le contrat par voie de notification à ses risques et périls, il subordonne cette possibilité, sauf urgence, à l'obligation de mettre préalablement en demeure le cocontractant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable. En revanche, il ne semble pas exclure la faculté de rompre le contrat à ses risques et périls pour d'autres causes que celles prévues au contrat et selon d'autres modalités que celles tenant au respect d'une mise en demeure préalable. En outre, les juges du fond font preuve de pragmatisme en estimant que, quoique fautive, la résiliation sans mise en demeure préalable n'engage pas la responsabilité du fournisseur, dès lors que la situation financière du distributeur ne lui aurait pas permis de s'acquitter de sa dette dans le mois de la notification .

Cette solution réaliste semble cependant contredite par une jurisprudence plus rigide de la troisième Chambre civile de la Cour de cassation qui considère que la clause résolutoire s'impose aux parties et emporte renonciation de celles-ci au droit de rompre unilatéralement le contrat en cas de manquement grave . En présence de cette divergence jurisprudentielle, la prudence commande de respecter les conditions de forme et de fond des clauses résolutoires et de ne faire usage de la faculté de mettre fin unilatéralement à ses risques et périls à un contrat de distribution pour manquement grave de l'autre partie si les conditions de la clause résolutoire ne sont pas parfaitement remplies qu'en cas de nécessité absolue  et en étant conscient des risques juridiques encourus. Une décision plus récente a ainsi retenu que la résiliation d'un contrat sans respecter les prescriptions de la clause résolutoire, qui imposait une mise en demeure préalable, était abusive dès lors qu'elle n'était pas fondée sur un manquement suffisamment grave . Les rédacteurs de contrats prendront également soin de prévoir une clause résolutoire générale pour tout manquement grave ainsi que de clauses plus précises à titre de simple illustration ne pouvant remettre en cause le droit général de résilier pour manquement grave à tout moment. Ces règles de prudence s'imposent d'autant plus que la jurisprudence se montre particulièrement sourcilleuse en droit de la distribution lorsqu'il est décidé de mettre fin à un contrat sur la base d'une clause résolutoire. En premier lieu, le contrat ne peut être résilié par simple courriel lorsqu'il prévoit l'envoi d'une mise en demeure par courrier express non suivie d'effet dans un délai de trente jours en cas de violation d'une des dispositions essentielles du contrat . Ensuite, il a été jugé qu'en cas d'utilisation d'une clause résolutoire imposant une mise en demeure, celle-ci devait enjoindre clairement au distributeur de se conformer à ses engagements contractuels . Il en est ainsi lorsque, dans la lettre ayant précédé la notification de la rupture, le fournisseur s'étonne de la chute des ventes et qualifie de faute contractuelle le comportement du distributeur . Tel n'est pas le cas, en revanche, lorsque le courrier du fournisseur n'articule aucun grief précis à l'encontre de son distributeur  ou ne précise pas que le défaut de paiement à échéance entraînera la cessation des relations . De même, la mise en demeure d'exécuter des obligations qui ne s'imposent pas au fournisseur est sans effet et rend la rupture imputable au distributeur . L'exécution des obligations contractuelles dans le délai fixé par la mise en demeure suspend les effets de la clause résolutoire . À défaut, le créancier prononce la résiliation du contrat . En effet, la résiliation opère de plein droit lorsque, par lettre recommandée, le fournisseur a mis le distributeur en demeure de respecter son obligation d'exclusivité et que, passé le délai contractuel d'un mois, ce dernier n'a ni déféré à cette demande ni contesté l'infraction reprochée .

Cass. com., 26 mars 2002, LawLex200200004656JBJ ; Paris, 9 juillet 2020, LawLex202000001756JBJ ; 25 juin 2021, LawLex202100004094JBJ.

Cass. com., 9 juillet 2013, LawLex201300001101JBJ, Contrats Conc. Consom., 2013, n° 239, obs. MATHEY ; RTD civ., 2014, 118, obs. FAGÈS. - V. égal. Cass. com., 25 septembre 2007, LawLex200700001509JBJ, LD novembre 2007.

Paris, 8 mars 2017, LawLex201700000474JBJ, Concurrences 2/2017, 112, obs. ERÉSÉO.

Paris, 20 avril 2000, LawLex200200004774JBJ.

Paris, 9 juin 2010, LawLex201000000889JBJ.

Paris, 4 octobre 2012, LawLex201200002107JBJ.

TGI Paris, 30 novembre 2004, LawLex200500003793JBJ.

Paris, 17 février 2016, LawLex201600000433JBJ.

Cass. com., 17 décembre 1991, nº 89-19.684, RJDA, 3/1992, nº 218 (en matière de location).

Cass. com., 17 janvier 1995, LawLex200200001498JBJ.

Rennes, 14 décembre 2012, LawLex201300000008JBJ.

Paris, 8 mars 1996, LawLex200200005549JBJ : une clause résolutoire pour impayés est valablement mise en œuvre sans mise en demeure préalable du concessionnaire lorsqu'elle porte dérogation conventionnelle à cette formalité ; Cass. com., 2 mars 1999, LawLex200200005186JBJ : la mise en œuvre d'une clause permettant la résiliation “de plein droit, à tout moment” en cas d'impayés n'est pas subordonnée à une mise en demeure préalable du concessionnaire. - Dans des circonstances particulières, les explications du distributeur ont néanmoins été requises, Cass. com., 8 octobre 2003, LawLex200300003741JBJ : l'obligation d'exécuter le contrat de bonne foi impose à un concédant de recueillir les explications de son concessionnaire avant de résilier le contrat, lorsque la mesure est motivée par l'existence d'une condamnation pénale non définitive prononcée à l'encontre du distributeur, approuvant Paris, 31 janvier 2001, LawLex200200005331JBJ.

Paris, 29 mai 1992, LawLex200200005925JBJ, D., 1992, I.R., 237.

T. com. Paris, 22 février 1999, LawLex200200004731JBJ ; Paris, 20 avril 2000, LawLex200200004774JBJ ; 17 octobre 2001, LawLex200400003464JBJ ; Colmar, 20 janvier 2016, LawLex201600000216JBJ.

 Cass. com., 4 février 2004, LawLex201000000956JBJ, JCP G, 2004, I, 149, n° 10, obs. ROCHFELD ; RTD civ. 2004, 731, obs. MESTRE et FAGÈS ; 10 février 2009, Contrats Conc. Consom., 2009, n° 123, obs. LEVENEUR ; RTD civ., 2009, 318, obs. FAGES ; 29 juin 2010, n° 09-68.053 ; 3 mai 2012, n° 11-17.779, Bull. civ., 4, n° 86 ; JCP E, 2012, 1512, obs. HONTEBEYRIE ; 1er octobre 2013, n° 12-20.830, RDC, 2014, 181, obs. LAITHIER. Comp. Cass. 1re civ., 24 septembre 2009, n° 08-14.524, RDC, 2010, 44, obs. GENICON.

Paris, 28 février 2024, LawLex202400001953JBJ.

Cass. 3e civ., 9 octobre 2013, n° 12-23.379, Gaz. Pal., 12-13 février 2014, 12, obs. PIGNARRE, RDC, 2014, 181, obs. LAITHIER.

Versailles, 20 octobre 2015, LawLex201500001321JBJ : un contrat de réparateur agréé peut être résilié sans mise en demeure, même si le contrat impose cette faculté, lorsqu'il n'est pas matériellement possible de remédier au manquement allégué.

Paris, 16 mai 2018, LawLex201800000743JBJ.

Droit français de la distribution

116. Mise en demeure préalable et faculté de déroger aux conditions de la clause résolutoire.

Profitez de 15 jours offerts
et accédez à tous les contenus Livv

Les décisions de justice citées dans ce paragraphe :

Les notions juridiques connexes

116. Mise en demeure préalable et faculté de déroger aux conditions de la clause résolutoire.

Profitez de 15 jours offerts et accédez à tous les contenus Livv

Les décisions de justice citées dans ce paragraphe :

Les notions juridiques connexes

Profitez de 15 jours offerts
et accédez à tous les contenus Livv