Le droit européen et français applicable aux réseaux de distribution.
Le Droit de la distribution, deuxième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : approvisionnement et fourniture exclusifs, distribution exclusive, distribution sélective, distribution automobile.

Droit français de la distribution

1) Critères.
Les lignes directrices sur les restrictions verticales prévoient expressément la faculté du fournisseur de définir des critères de sélection quantitatifs. Constitue un système de distribution sélective quantitative, le réseau dans lequel le fournisseur limite plus directement que dans un système de sélection qualitative “le nombre de distributeurs, par exemple en imposant un nombre fi …

Sélection quantitative.

TERCINET, Distribution sélective quantitative de véhicules automobiles, JCP E 2013, 1186.

Les lignes directrices sur les restrictions verticales prévoient expressément la faculté du fournisseur de définir des critères de sélection quantitatifs. Constitue un système de distribution sélective quantitative, le réseau dans lequel le fournisseur limite plus directement que dans un système de sélection qualitative “le nombre de distributeurs, par exemple en imposant un nombre fixe de distributeurs” . Les lignes directrices automobiles , qui accompagnent le règlement automobile 461/2010 du 27 mai 2010 , soulignent la spécificité de la vente de véhicules neufs en énonçant que la distribution sélective quantitative remplira généralement les conditions d'une exemption individuelle si la part de marché des parties n'excède pas 40 %, alors que pour les autres accords verticaux, le seuil déclenchant le contrôle est fixé à 30 % .

Alors que le juge français semblait réticent à abandonner le contrôle d'opportunité des critères quantitatifs , notamment lorsque le secteur économique concerné relevait du règlement restrictions verticales , la Cour de cassation a estimé qu'en matière de distribution automobile, le juge n'est pas habilité à apprécier le bien-fondé d'un critère de sélection quantitatif . Il est en effet légitime que le fournisseur détermine seul le niveau de sélection approprié à l'image et au positionnement qu'il entend donner à ses produits en fonction de la stratégie commerciale qu'il souhaite adopter. Les juridictions françaises ont généralement conclu à la validité des nouveaux systèmes quantitatifs mis en place dans le secteur automobile .

Toutefois, en visant le caractère précis et objectif des critères de sélection quantitatifs, la Cour de cassation a semé une certaine confusion . Aussi la Commission est-elle intervenue en qualité d'amicus curiae devant la cour d'appel de renvoi pour réaffirmer que l'article 1er, 1º, sous g) du règlement 1400/2002 définissait, comme les lignes directrices restrictions verticales actuelles, la distribution sélective quantitative sur la base d'une seule condition additionnelle, la détermination de critères qui limitent directement le nombre de distributeurs, et ne mentionnait aucunement la nécessité pour le fournisseur de définir des critères à caractère objectif, c'est-à-dire, selon la définition de ce terme en droit européen, requis par la nature des biens et services contractuels. Pour bénéficier de l'exemption, il suffit que les critères quantitatifs mis en œuvre par le fournisseur soient définis, c'est-à-dire précis. Les juridictions du premier degré se sont généralement conformées à la définition du règlement explicitée par la Commission , même si certaines décisions, y compris de la Cour de cassation, ont continué de se référer à l'existence de critères précis et objectifs . La Cour de justice a adopté une position similaire à celle de la Commission en considérant que, dans les réseaux de distribution automobile fondés sur une sélection quantitative, les critères doivent seulement être définis, c'est-à-dire vérifiables, mais n'ont pas à être objectivement justifiés ni appliqués de façon uniforme et non différenciée à l'égard de tous les candidats à l'agrément . La Cour de cassation, juge de renvoi, s'est finalement alignée sur cette solution en affirmant que ni le règlement automobile ni le droit national n'imposent au constructeur qui a mis en place un réseau de distribution sélective quantitative de justifier des raisons qui l'ont amené à arrêter son numerus clausus, dès lors que celui-ci est précis et vérifiable . Depuis lors, la jurisprudence estime que dans le cadre d'un réseau fondé sur la sélection quantitative des distributeurs, le constructeur n'est tenu à aucune justification objective lorsqu'il nomme un distributeur supplémentaire, y compris dans un territoire déjà occupé, puisqu'il définit en toute liberté son numerus clausus . 

Un critère de sélection fixé en nombre de points de vente et non en nombre de distributeurs , déterminé à partir d'un maillage territorial avec définition de pôles d'attractivité, et à titre subsidiaire, d'objectifs contractuels de vente antérieurs , ou encore consistant à ne retenir qu'un point de vente par aire urbaine de 500 000 habitants  constitue ainsi un critère quantitatif licite, qui peut être opposé à un distributeur même s'il n'a pas été expressément fixé dans le contrat . Enfin, la question de la validité d'un critère de sélection quantitative ou du refus d'agrément fondé sur celui-ci ne se pose pas lorsque la tête de réseau n'atteint pas les seuils excluant son accord de l'exemption par catégorie .

Dans un système de sélection qualitative et quantitative, le fournisseur peut limiter le nombre de ses distributeurs agréés, lesquels doivent tous répondre à certains critères qualitatifs . Mais en cas de pluralité de candidatures, quelle est la marge de manœuvre du constructeur ? 

Selon une partie de la doctrine, en présence de plusieurs candidats répondant tous aux critères de sélection qualitatifs alors que la limite quantitative fixée ne laisse qu'une place disponible, le fournisseur serait tenu de retenir la meilleure candidature, sans pouvoir désigner le candidat de son choix . En réalité, dans la mesure où la distribution sélective quantitative et la distribution exclusive représentent deux formes parallèles de limitation du nombre de vendeurs ab initio, les solutions retenues en jurisprudence en matière de distribution exclusive qui accordent au fournisseur une liberté de choix du candidat distributeur, doivent être transposées à la distribution sélective quantitative, lorsque le fournisseur doit choisir entre des candidats au réseau satisfaisant tous aux critères qualitatifs .

Dans un système de sélection qualitative et quantitative, le constructeur n'est donc pas tenu d'agréer le premier des candidats remplissant les critères qualitatifs, mais dispose de la liberté de choisir entre eux . Le constructeur peut aussi ne pas désigner immédiatement de distributeur sur le secteur en cause, afin de laisser le temps à un candidat déterminé de s'adapter aux critères de sélection, dès lors que cette discontinuité du service ne trahit pas sa volonté de s'affranchir du respect de tout critère objectif de sélection . 

Allant plus loin, la jurisprudence la plus récente estime que l'exigence de bonne foi ne requiert, de la part de la tête d'un réseau de distribution sélective quantitative, ni la détermination et la mise en oeuvre d'un processus de sélection fondé sur des critères définis, objectivement fixés et appliqués de manière non-discriminatoire , ni la motivation de son refus d'agrément .

Lignes directrices sur les restrictions verticales 2022/C 248/01, pt 144.

Lignes directrices supplémentaires sur les restrictions verticales dans les accords de  vente et de réparation de véhicules automobiles et de distribution de  pièces de rechange de véhicules automobiles 2010/C 138/05 du 28 mai 2010, modifiées par les lignes directrices 2023/C 133 I/01 du 17 avril 2023.

Cass. com., 6 mars 2007, LawLex200700000314JBJ, RTD com., 2007, 825, obs. BOULOC ; Contrats Conc. Consom., février 2008, étude, 2, par CLAUDE ; JCP G, 2007, I, 195, obs. CHAGNY ; LPA, 15-16 août 2007, 6, obs. ARHEL ; Contrats Conc. Consom., 2007, nº 148, obs. MALAURIE-VIGNAL ; JCP E, 2008, 1638, obs. RESPAUD ; RLDA, 2007, nº 901, obs. ANADON ; D., 2007, AJ, 1011, obs. CHEVRIER, RJDA, 2007, nº 898.

CJUE, 14 juin 2012, Auto 24 SARL, aff. C-158/11, LawLex201200000871JBJ ; Contrats Conc. Consom., 2012, n° 212, obs. DECOCQ ; Concurrences, 3/2012, 116, obs. ÉRÉSÉO ; JCP E, 2012, 590, obs. WILHELM.

Cass. com., 15 janvier 2013, LawLex201300000035JBJ, JCP E, 2013, 1186, obs. TERCINET ; Contrats Conc. Consom., 2013, n° 77, obs. MALAURIE-VIGNAL ; JCP E, 2013, 1200, obs. MAINGUY ; Concurrences, 2/2013, 88, obs. FERRIER ; JCP E, 2013, n° 1454, obs. GRIGNON. - V. égal. Versailles, 20 mai 2014, LawLex201400002058JBJ : le constructeur n'est tenu à aucune justification objective lorsqu'il nomme un distributeur supplémentaire dès lors qu'il définit en toute liberté son numerus clausus.

Versailles, 20 mai 2014, LawLex201400002058JBJ approuvé par Cass. com., 7 juin 2016, LawLex201600001088JBJ. La Cour de cassation justifie notamment cette décision par le principe selon lequel, dans un réseau de distribution sélective, les revendeurs ne bénéficient d'aucune protection territoriale. - V. aussi T. com. Paris, 16 juin 2015, LawLex201500000772JBJ ; Paris, 20 février 2019, LawLex201900000230JBJ, LD mars 2019, 6 et Concurrences 2019/2, 90, obs. ERÉSÉO ; RLC 2019, n° 3572, obs. DIENY et HENRY ; LEDICO avril 2019, 1, obs. GRIMALDI. 

Dijon, 1er avril 2004, LawLex200400000738JBJ.

Cass. com., 6 mars 2007, LawLex200700000314JBJ.

Cass. com., 28 juin 2005, LawLex200500006663JBJ.

Paris, 20 février 2019, LawLex201900000230JBJ, préc.

Ce règlement, publié au 27 mai 2010, ne s'applique qu'aux activités d'après-vente. Il a été prorogé de cinq ans le 17 avril 2023.

BERTIN, Analyse des conditions de sélection de leurs réseaux par les constructeurs automobiles à l'occasion de l'entrée en vigueur du règlement nº 1400-2002 du 31 juillet 2002, D., 2003, 1150.

V., pour une consécration de ce raisonnement, Dijon, 1er avril 2004, LawLex200400000738JBJ.

Douai, 15 avril 2004, LawLex200400001290JBJ ; Dijon, 1er avril 2004, LawLex200400000738JBJ ; V. sur la liberté de choix accordée à la tête de réseau en matière de distribution exclusive : T. com. Paris, 22 mai 2007, LawLex200700000577JBJ, Contrats Conc. Consom., février 2008, étude, 2, par CLAUDE.

Cass. com., 27 mars 2019, LawLex201900000420JBJ, LD avril 2019, 1, obs. BETTONI ; LEDICO juin 2019, 2, obs. L. et J. VOGEL ; Contrats Conc. Consom. 2019, n° 101, obs. MALAURIE-VIGNAL ; AJ Contrat 2019, 295, obs. BUY et RODA ; RLC 2019, n° 3590, obs. BETTONI ; JCP E 2019, n° 1416, obs. MAINGUY ; Concurrences 3/2019, 95, obs. ERÉSÉO ; LPA 31 octobre 2019, 10, obs. MIHAILOV ; D. 2019, 2212, obs. LE BRAS ; RJDA 2019, n° 616. - Adde : PONSARD, Bonne foi et distribution sélective automobile, AJ Contrat 2020, 321.

Paris, 23 octobre 2019, LawLex201900001273JBJ, LD novembre 2019, 2, obs. BETTONI ; LEDICO décembre 2019, 2, obs. L. et J. VOGEL.

Lignes directrices automobiles 2010/C 138/05, pt 56 non modifié en 2023.

Les juridictions françaises opéraient traditionnellement un contrôle de proportionnalité des critères quantitatifs de sélection : V. not. Cass. com., 26 janvier 1999, LawLex200200000351JBJ ; Paris, 9 décembre 1997, LawLex200200003411JBJ ; 30 octobre 1996, LawLex200200005611JBJ.

Paris, 9 novembre 2000, LawLex200200002371JBJ : un critère de sélection quantitatif fondé sur les “possibilités locales de vente des produits” non autrement définies n'est pas suffisamment précis pour être appliqué de manière objective.

Cass. com., 28 juin 2005, LawLex200500006663JBJ. - V. aussi T. com. Bordeaux, 8 février 2008, LawLex200800000186JBJ, confirmé par Paris, 2 décembre 2009, LawLex200900003589JBJ.

V. not. T. com. Dijon, 25 septembre 2003, LawLex200300003998JBJ : réseau Mercedes ; T. com. Bordeaux, 8 février 2008, LawLex200800000186JBJ : marque Land Rover.

T. com. Saumur, 27 janvier 2004, LawLex200400000504JBJ ; Paris, 17 décembre 2008, LawLex200900000470JBJ ; 2 décembre 2009, LawLex200900003589JBJ.

Droit français de la distribution

245. Sélection quantitative.(1)

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Les décisions de justice citées dans ce paragraphe :

Les notions juridiques connexes

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