Le droit européen et français applicable aux réseaux de distribution.
Le Droit de la distribution, deuxième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : approvisionnement et fourniture exclusifs, distribution exclusive, distribution sélective, distribution automobile.

Droit français de la distribution

Deux hypothèses principales doivent être distinguées en cas de poursuite des relations contractuelles, selon que celle-ci fait l'objet d'un accord spécifique ou d'une tacite reconduction.
En cas d'accord spécifique, les parties peuvent convenir soit de proroger le contrat avant son expiration, en modifiant simplement le terme et en décidant de poursuivre le même contrat d'un commun accord (hypothè …

Poursuite du contrat par nouvel accord ou par tacite reconduction.

AMAR-LAYANI, La tacite reconduction, D, 1996, 143 ; BÉNABENT, La prolongation du contrat, RDC, 2004, 117 ; REZGUI, La continuation du contrat, 2010 ; GENICON, Contenu du contrat tacitement reconduit : le désengagement de la Cour de cassation, RDC, 2012, 755.

Deux hypothèses principales doivent être distinguées en cas de poursuite des relations contractuelles, selon que celle-ci fait l'objet d'un accord spécifique ou d'une tacite reconduction.

En cas d'accord spécifique, les parties peuvent convenir soit de proroger le contrat avant son expiration, en modifiant simplement le terme et en décidant de poursuivre le même contrat d'un commun accord (hypothèse de la prorogation), soit de renouveler le contrat en concluant un nouveau contrat identique au précédent (hypothèse du renouvellement).

La conclusion d'un nouveau contrat emporte d'importantes conséquences, en particulier la perte des sûretés attachées au contrat antérieur .

En matière de distribution, le plus fréquemment, les parties ne conviennent pas d'un accord spécifique mais poursuivent dans les faits les relations à l'issue du contrat initial si elles ne l'ont pas dénoncé.

Les relations commerciales, qui se poursuivent après la rupture d'un contrat de distribution à durée déterminée, donnent-elles naissance à un nouveau contrat-cadre, ou seulement à des contrats de vente successifs ? Trois hypothèses doivent être distinguées. 

Lorsque le contrat stipule une clause de tacite reconduction, la poursuite des relations donne naissance à un nouveau contrat-cadre. La tacite reconduction ne se réduit pas à une simple prorogation du terme du contrat primitif, mais fait naître un nouveau contrat . Ce principe revêt une importance particulière lorsqu'un cautionnement garantit l'exécution des obligations : la garantie due par la caution se limite en effet aux transactions qui se rattachent au contrat initial .

Lorsque le contrat exclut expressément la tacite reconduction, les relations postérieures s'analysent en de simples ventes successives. Dans ce cas, le non-renouvellement du contrat de distribution exclusive n'engage pas la responsabilité du fournisseur, selon les règles traditionnelles du droit des contrats . La clause doit toutefois être claire et précise et il ne suffit pas de stipuler que le contrat prendra fin “automatiquement” .

Dans le silence du contrat, il est considéré comme renouvelé par tacite reconduction si les relations d'affaires se poursuivent après l'échéance du terme . La volonté des parties de reconduire le contrat peut résulter du maintien des panonceaux, de l'exposition par l'ancien distributeur de véhicules de la marque du fournisseur, de livraisons effectuées par ce dernier ou encore de l'ouverture par le distributeur d'un compte bancaire auprès d'une filiale du fournisseur. 

Pour mettre fin au contrat-cadre tacitement reconduit, le fournisseur devra évidemment respecter un préavis raisonnable . Ce principe du droit commun des contrats doit être appliqué en relation avec les dispositions de l'article L. 442-1, II du Code de commerce qui imposent le respect d'un préavis écrit raisonnable tenant compte de la durée des relations. En effet, si un contrat à durée déterminée ne crée pas en principe de relation commerciale établie , il en va différemment en cas de succession de contrats . Dans ce cas, les modalités de la rupture négociée entre les parties, et notamment la durée du préavis pour mettre fin au contrat à durée déterminée, doivent être conformes à l'article L. 442-1, II du Code de commerce . Ainsi, il a été jugé que le non-renouvellement d'un contrat à durée déterminée d'un an constitue une rupture brutale de relations commerciales établies, même s'il exclut expressément la tacite reconduction, dès lors qu'il a été reconduit pendant vingt-trois années consécutives .

En cas de renouvellement d'un contrat de distribution exclusive par tacite reconduction, les parties ont intérêt à prévoir soigneusement les conditions du nouveau contrat.

Si le contrat précédent a défini la durée déterminée du nouveau contrat en cas de tacite reconduction, il va de soi que le nouveau contrat sera à son tour à durée déterminée .

En l'absence de stipulation claire, tout particulièrement lorsque la tacite reconduction résulte de la poursuite matérielle du contrat, la durée et les modalités du nouveau contrat risquent de donner lieu à des contestations et de générer une forte insécurité juridique. Il était généralement admis que la tacite reconduction emportait formation d'un nouveau contrat qui reprenait en principe le contenu de l'ancien, excepté son terme, devenu indéterminé, et, le cas échéant, les clauses séparables du reste du contrat. Un arrêt controversé a créé une certaine insécurité juridique autour de cette règle jurisprudentielle en jugeant que “sauf disposition ou volonté contraire, la tacite reconduction d'un contrat à durée déterminée, dont le terme extinctif a produit ses effets, donne naissance à un nouveau contrat, de durée indéterminée, et dont les autres éléments ne sont pas nécessairement identiques” . La jurisprudence ultérieure de la Chambre commerciale de la Cour de cassation semble marquer un certain retrait par rapport à cette solution en s'en remettant, sur la question de la détermination du contrat reconduit au pouvoir souverain des juges du fond, qui doivent apprécier la volonté des parties . Dans ces conditions, les parties seront bien inspirées de régler dans le moindre détail les conditions et la durée du contrat issu de la tacite reconduction.

Sur la distinction entre prorogation et renouvellement, V. BÉNABENT, Droit des obligations, LGDJ, 14e éd., 2014, n° 328.

V. sur ce principe, Cass. com., 13 mars 1990, LawLex201000000931JBJ, Bull. civ. 4, nº 77 (en matière d'assurance maritime) ; 22 octobre 1996, LawLex200200004610JBJ, Bull. civ. 4, nº 257 (en matière de location-gérance).

Paris, 6 mai 2009, LawLex201000000091JBJ, RJDA, 2010, nº 83. Comp, Caen, 23 avril 2009, LawLex200900001496JBJ : si l'article L. 442-1, II (ancien art. L. 442-6, I, 5º) du Code de commerce s'applique à tous types de relations, y compris à durée déterminée, c'est à la condition que celui qui l'invoque ait pu raisonnablement s'attendre à la pérennité du partenariat, ce qui n'est pas le cas lorsque le contrat exclut expressément toute tacite reconduction après deux renouvellements ; Rennes, 22 mai 2002, LawLex200400002727JBJ : le non-renouvellement d'un contrat à durée déterminée d'un an conclu sans faculté de tacite reconduction ne constitue pas une rupture brutale de relation commerciale établie.

Cass. com., 15 janvier 2008, Bull. civ., IV, n° 4, RTD civ., 2008, 299, obs. FAGÈS.

Cass. civ. 1re, 15 novembre 2005, Bull. civ. I, n° 413, D, 2006, 587, obs. MEKKI ; Contrats conc. consom., 2006, 43, obs. LEVENEUR, RTD civ., 2006, 114, obs. MESTRE et FAGÈS, RDC 2006, 114, obs. LAITHIER ; Soc. 13 décembre 2007, Bull. civ., V, n° 2017.

Cass. com., 11 avril 2012, n° 10-20.505, RDC, 2012, 755, obs. GENICON.

Versailles, 22 octobre 1991, RJDA, 3/1992, nº 217.

Cass. com., 14 décembre 2004, LawLex200400003516JBJ.

T. com. Paris, 7 février 1977, LPA, 20 juin 1977, 15.

Versailles, 14 mai 1996, LawLex200200005567JBJ, D. Aff., 1996, 1093 : le contrat de distribution ne peut sans abus être brusquement rompu après qu'il ait été renouvelé par tacite reconduction.

Cass. com., 30 novembre 1993, LawLex200200005355JBJ : le fournisseur ne peut rompre brusquement un contrat de distribution renouvelé par tacite reconduction ; Lyon, 7 mai 1999, LawLex200200005209JBJ : un contrat à durée déterminée ne peut être unilatéralement rompu par le fournisseur après avoir été renouvelé par tacite reconduction.

T. com., Alençon, 8 octobre 2007, LawLex200700001582JBJ, qui rappelle qu'en l'absence de succession de contrats, la rupture d'un CDD à son terme n'est pas brutale.

Lyon, 10 avril 2003, LawLex200300002497JBJ, succession pendant environ 35 années de différents contrats de distribution exclusive ; T. com., Paris, 3 novembre 2004, LawLex200500005651JBJ ; Nancy, 10 mars 2004, LawLex200400002728JBJ ; Versailles, 15 mars 2007, LawLex200700001811JBJ, succession de contrats pendant 57 années ; Paris, 29 novembre 2007, LawLex200800002226JBJ, succession de contrats pendant 21 années. - Contra, Paris, 29 mai 2008, LawLex200800002248JBJ : le renouvellement à deux reprises d'un contrat de distribution à durée déterminée qui exclut expressément toute tacite reconduction ne permet pas au concessionnaire d'invoquer l'existence de relations commerciales établies, en raison de l'aléa existant à l'expiration de chaque contrat.

Lyon, 10 avril 2003, précité : insuffisance d'un préavis de 12 mois, nécessité de respecter un préavis de 20 mois, compte tenu de la durée de la relation ; Versailles, 7 décembre 2006, LawLex200800000189JBJ ; Lyon, 8 octobre 2009, LawLex201000000021JBJ.

Droit français de la distribution

306. Poursuite du contrat par nouvel accord ou par tacite reconduction.(1)

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