Infractions au Code pénal, au Code de commerce ou au Code de l'environnement, Procédure pénale

Droit pénal des affaires

L’article L. 465-1 du Code monétaire et financier prohibe l’usage, par son détenteur, d'une information privilégiée, soit par la réalisation d’une opération boursière, soit par l’annulation ou la modification d’ordres passés . La détention de l'information privilégiée permet à celui qui l'utilise d'effectuer des opérations sans s'exposer aux mêmes risques que les autres intervenants sur le marché, …

Utilisation d'une information privilégiée

L’article L. 465-1 du Code monétaire et financier prohibe l’usage, par son détenteur, d'une information privilégiée, soit par la réalisation d’une opération boursière, soit par l’annulation ou la modification d’ordres passés . La détention de l'information privilégiée permet à celui qui l'utilise d'effectuer des opérations sans s'exposer aux mêmes risques que les autres intervenants sur le marché, portant ainsi atteinte à l'intégrité de celui-ci et à la confiance des investisseurs . Toutefois, le simple fait qu'une personne dispose d'une information privilégiée n'est pas constitutif du délit d’initié, si les opérations concernant les instruments financiers auxquels se rapporte cette information sont effectuées légitimement (art. L. 465-1, B), c’est-à-dire dans le cadre normal de l’exercice de sa fonction ou de sa profession et de manière conforme aux pratiques de marché admises .

Le délit d'initié constituant une infraction formelle, le profit retiré par l’initié n’est pas constitutif du délit, le résultat de l’usage de l’information privilégiée étant sans incidence . De même, la nature de l’usage, ainsi que les modes opératoires sont indifférents : l'usage peut être effectué par l’initié lui-même ou par personne interposée. Par ailleurs, le délit est caractérisé sans qu'il soit nécessaire que l'initié connaisse l'identité des opérateurs, ni les modalités des opérations réalisées . 

L'article L. 465-1 n'incrimine que l'acte positif de réalisation directe ou indirecte d'une opération avant que le public ait connaissance des informations privilégiées. Aussi la prise d’un engagement par la signature d’une lettre de confidentialité, ou le fait de s'abstenir d'intervenir sur le marché à raison d'informations détenues, ne peut-il pas constituer le délit d’initié . En revanche, l’usage d’une information privilégiée est caractérisé lorsque seule la détention d'une information privilégiée peut expliquer les investissements réalisés sur le titre .

Des ordres d’achat et de vente effectués par un adjoint du chef du service de l'inspection au sein de l’ancienne Commission des opérations de bourse, immédiatement après la réception d’un courrier qui lui a été adressé contenant des informations sur une offre publique d'achat ou d'échange de la société émettrice, de nature à influer sur le cours de la valeur , ou l'acquisition par l'ancien salarié d'une société de titres en quantité exceptionnelle, juste après avoir eu connaissance d’un projet de rachat des titres par une société étrangère , caractérisent une utilisation de l'information. De même, des achats de titre ne peuvent résulter que de la connaissance par un investisseur d'un projet d'offre publique d'acquisition eu égard à l'importance des investissements en titres réalisés, en valeur absolue et relative, au regard de ses placements habituels, tant pour lui-même que pour des sociétés, à l'absence d'intérêt particulier suscité auparavant par ces titres et d'explication crédible sur leur date d'acquisition, que sa qualité d'investisseur professionnel et son expertise financière ne suffisent pas à justifier .  

La commission de l'infraction peut se déduire de la seule détention d'une information privilégiée puisqu'une présomption d'utilisation indue pèse sur l'initié . La détention constitue un fait qui se prouve par tous moyens, notamment, à défaut de preuve matérielle, par un faisceau d'indices graves, précis et concordants duquel il résulte que seule cette détention permet d'expliquer les opérations auxquelles les personnes mises en cause ont procédé, sans qu'il soit nécessaire d'établir précisément les circonstances dans lesquelles l'information est parvenue à la personne qui l'a utilisée, mais à condition que le rapprochement de ces indices l'établisse sans équivoque et que les justifications avancées par les personnes poursuivies ne permettent pas d'écarter les soupçons et indices motivant les poursuites  . Ainsi, la chronologie des investissements, leur rapidité, les modalités de passage des ordres, le volume des achats, les montants conséquents investis au regard des disponibilités, les explications et justifications données par le prévenu à ses interventions, suffisent à établir que seule une information privilégiée, quand bien même son origine exacte n'est pas déterminée, est de nature à expliquer les achats des titres . Le simple rapprochement chronologique entre la détention de l’information et son exploitation sur le marché, avant que celle-ci soit connue du public, peut également permettre de caractériser l'infraction, sans avoir à démontrer l’existence d’une relation de cause à effet entre ces deux circonstances . Il en est de même de la volonté de dissimulation révélée par les circonstances de la vente à découvert à laquelle la personne mise en cause a procédé . En revanche s'il peut être tenu compte de l’expérience professionnelle du prévenu ou de sa proximité, professionnelle ou personnelle avec l’initié détenteur initial de l’information privilégiée , celle-ci ne peut, en elle-même, revêtir une valeur probante suffisante pour caractériser la détention de l’information à caractère privilégié . 

L'utilisation d'une information privilégiée peut également être poursuivie par la Commission des sanctions de l'AMF sur le fondement de l’article L. 621-15 du Code monétaire et financier. Les éléments constitutifs sont les mêmes. Seule la nature de la sanction diffère.

Cass. com., 24 novembre 2021, LawLex202200008312JBJ, Dr. pén. n° 1, janvier 2022, comm. 11, ROBERT ; Dr. sociétés n° 3, mars 2022, comm. 32, DE BAILLIENCOURT.

Paris, 4 juin 2020, n° 19/114547, LawLex202200010988JBJ ; 17 septembre 2020, n° 19/110337, LawLex202300001949JBJ.

Paris, 21 octobre 2021, LawLex202300001941JBJ. -  V. égal., AMF, 11 décembre 2008, LawLex202300005880JBJ ;  Cons. d'Et., 22 mai 2012, LawLex202300005882JBJ ; Cass. com., 28 mai 2013, LawLex202200011045JBJ ; Paris, 2 octobre 2014, LawLex202300005877JBJ ; Cons. d'Et., 10 juillet 2015, LawLex202300005771JBJ ; Paris, 14 janvier 2016, LawLex202300005777JBJ.

Cass. crim., 30 mars 2022, LawLex202200002766JBJ, Dr. sociétés, n° 5, Mai 2022, comm. 60, SALOMON.

AMF, 4 décembre 2008, LawLex202300002026JBJ.

Cons. d'Et., 22 mai 2012, LawLex202300005882JBJ.

AMF, 4 décembre 2008, LawLex202300002026JBJ ; Paris, 2 octobre 2014, LawLex202300005877JBJ.

AMF, 15 octobre 2009, LawLex202300005775JBJ ; Cass. com., 20 septembre 2011, LawLex202300005778JBJ.

Cass. crim., 26 octobre 1995, LawLex202200004573JBJ, JCP E 2014, 1607, MILLERAND ; JCP 2015, 460, CAPRIOLI ; Dr. pén. n° 6, juin 2020, comm. 117, ROBERT ; Comm. com. électr. 2016, comm. 19, CAPRIOLI.

Cass. crim., 27 septembre 2006, LawLex202200011010JBJ.

Paris, 2 octobre 2014, LawLex202300005877JBJ.

Cass. crim., 31 octobre 2007, LawLex202200010977JBJ, Dr. sociétés, n° 5, mai 2015, comm. 99, SALOMON ; JCP E 2015, 1353, SALOMON ; D. 2012. 693, LASSERRE CAPDEVILLE, MASCALA, NEUVILLE

Cass. crim., 15 octobre 1998, LawLex202200009785JBJ.

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175. Utilisation d'une information privilégiée

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