Introduction

Existence d'une créance

Délivrance d'un titre exécutoire

Existence de biens ou créances saisissables

Conditions de l’exécution forcée

Autorité judiciaire

Autres autorités

Autorités et personnes compétentes

Opérations

Difficultés d’exécution

Mise en œuvre de l’exécution forcée

Droit commun des voies d'exécution

Notion d'astreinte

Champ d'application rationae personae

Champ d'application rationae materiae 

Détermination de l’astreinte

Compétence du juge

Pouvoirs du juge

Effets de la décision prononçant ou rejetant l’astreinte

Prononcé de l'astreinte

Conditions de fond

 Conditions procédurales

Rôle et pouvoirs du juge

Effets du jugement de liquidation

Liquidation de l'astreinte

Astreinte

Conditions de mise en œuvre

Contestations des mesures conservatoires

Droit commun des mesures conservatoires

Saisies conservatoires

Sûretés judiciaires

Régimes particuliers

Mesures conservatoires

Saisie des créances de sommes d'argent

Saisie des biens meubles corporels

Saisie des droits incorporels

Mesures d'exécution sur les meubles

Saisies immobilières

Expulsions

Mesures d'exécution sur les immeubles

Mesures d'exécution forcée

5. Procédures civiles d'exécution

Aux termes de l'article L. 511-1 du Code des procédures civiles d'exécution, tout créancier peut solliciter du juge de l'exécution la mise en œuvre d'une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur s’il justifie non seulement d'une créance paraissant fondée en son principe, mais aussi de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement. Ces conditions sont cumulatives : la Cour de cassation n’exige pas des juges qu'ils recherchent si la créance paraît, ou non, fondée en son principe si le créancier ne démontre pas l’existence de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement . La preuve que les deux conditions cumulatives sont réunies est exigée même lorsque le débiteur est placé en procédure de sauvegarde et que le créancier est autorisé, en vertu de l'article L. 622-28 du Code de commerce, à prendre des mesures conservatoires .

En vertu de l'article R. 512-1, il incombe au créancier de prouver que les conditions requises pour l'octroi d'une mesure conservatoire sont réunies. Il lui revient donc d’apporter la preuve de l’existence d’une menace réelle et pertinente sur le recouvrement de sa créance , et non au débiteur de justifier de ses capacités de remboursement . Le juge qui autorise une mesure conservatoire dispose d’un pouvoir souverain pour apprécier si le créancier justifie de circonstances menaçant le recouvrement de la créance . 

Si la menace sur le recouvrement de la créance peut résulter du risque d’inexécution du plan de redressement du débiteur placé en procédure collective , voire même de la seule ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire , elle peut aussi exister même en l'absence de cessation des paiements du débiteur ou de situation financière irrémédiablement compromise . En effet, il n'est pas nécessaire que l'impossibilité de recouvrement soit avérée : suffisent à constituer une menace la seule résistance au paiement du débiteur  , le fait qu'il ait remplacé les biens corporels présents dans son patrimoine par des actifs difficilement négociables , voire les craintes suscitées par son comportement frauduleux passé . De simples incertitudes sur sa capacité de remboursement peuvent justifier l'octroi d'une mesure conservatoire, notamment lorsqu'il fait l'objet de poursuites pénales parallèles , refuse avec constance de justifier de son patrimoine immobilier , ou garde le silence, en dépit d’une mise en demeure . 

A fortiori, des difficultés financières établies , notamment au regard de précédentes saisies infructueuses , ou d'impayés antérieurs chroniques , permettent de caractériser une menace sur le recouvrement. Il en va de même en cas de disproportion entre le montant de la créance et le patrimoine  ou les garanties offertes par le débiteur . Par ailleurs, le fait qu’un Etat étranger, débiteur, connaisse depuis plusieurs années une instabilité politique et économique affirmée et que l’exécution sur son territoire de décisions de justice rendues à son encontre apparaisse sinon impossible, du moins particulièrement aléatoire, caractérise suffisamment l'existence de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance au sens de l’article L. 511-1 du Code des procédures civiles d’exécution . 

En revanche, en présence d'un compte bancaire créditeur d’un montant deux fois supérieur à celui de la créance, le créancier n’apporte pas la preuve, qui lui incombe, de l’existence d’une menace pesant sur le recouvrement . Plus généralement, la Cour de cassation estime que le fait qu’un débiteur dispose de revenus et avoirs lui procurant une aisance financière certaine, et que le créancier dispose déjà de garanties, exclut la caractérisation d'une menace . Il en va de même lorsque le débiteur, quoiqu'ayant subi des pertes, appartient à un groupe florissant  ou lorsque ses difficultés financières ne font pas pour autant redouter un risque d'insolvabilité . Enfin, le seul fait de refuser de payer une créance ne peut constituer une menace sur son recouvrement lorsque ce refus est fondé sur une  contestation juridique de son principe et non sur des difficultés financières du débiteur . Dès lors, ne caractérisent pas non plus des circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance, la seule absence de paiement des loyers au cours de la période de crise sanitaire, l’arrêt des pourparlers relatifs au paiement de ceux-ci et l’engagement de procédures judiciaires relatives à leur règlement, en raison de la contestation relative à l'exception de force majeure .

Enfin, lorsque le créancier saisissant se tourne vers la caution du débiteur principal, il est tenu d’apporter la preuve que la créance est menacée dans son recouvrement en considération de la situation de la seule caution , et non du débiteur principal . Il en va ainsi en cas de comparaison défavorable entre le montant de la dette et la faiblesse du fonds de roulement dont la caution dispose pour le fonctionnement de son entreprise . En outre, et dans la mesure où les difficultés du créancier ne constituent pas l’une des conditions de mise en place d’une saisie conservatoire, il importe peu que le créancier soit lui-même dans une situation financière florissante .

Cass. 2e civ., 2 février 2012, LawLex202300005170JBJ.

Montpellier, 3 décembre 2020, LawLex202300006625JBJ.

Caen, 28 novembre 2000, LawLex202300004035JBJ.

Caen, 6 décembre 2022, LawLex202300007623JBJ ; Aix-en-Provence, 2 mars 2023, LawLex202300007495JBJ.

Toulouse, 15 janvier 2018, LawLex202300007448JBJ ; Caen, 6 décembre 2022, LawLex202300007623JBJ.

Orléans, 26 novembre 2020, LawLex202300007332JBJ.

Bourges, 17 novembre 2022, LawLex202300006655JBJ, retenant que le créancier justifie de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement,  lorsque le débiteur a connu une baisse drastique de son résultat  comptable, s'abstient, alors qu’il s’y était engagé contractuellement, de lui déclarer son chiffre d’affaires mensuel, ainsi que son chiffre  d’affaires annuel, diminue très sensiblement les dividendes versés à ses  actionnaires, et que les comptes courants d’associés sont créditeurs de  sommes importantes dont ils peuvent réclamer le remboursement à tout  moment. - Comp., en l'absence d'une telle preuve, Paris, 5 mars 2020, LawLex202300006627JBJ.

Cass. com., 4 novembre 2008, LawLex202300005203JBJ ; Paris, 31 mai 2018, LawLex202300005523JBJ.

Paris, 17 février 2022, LawLex202300006581JBJ.

Cass. 2e civ., 8 novembre 2001, LawLex202300001127JBJ : en l’espèce, le montant de la créance était trois fois supérieur au bénéfice annuel que la société débitrice admettait réaliser ; Bordeaux, 26 juin 2014, LawLex202300006593JBJ, relevant que le prix de vente, par adjudication, de l’immeuble appartenant au débiteur n'était pas suffisant pour apurer sa dette, même s’il disposait de revenus importants ; Paris, 26 janvier 2023, LawLex202300006546JBJ, possession d'un immeuble d'une valeur inférieure au montant de la créance, jugée insuffisante pour rassurer le créancier.

Lyon, 24 septembre 2015, LawLex202300006594JBJ : en l’espèce, le débiteur était surendetté, les loyers perçus au titre des biens immobiliers financés ne couvraient pas les mensualités des crédits, les biens avaient perdu une grande partie de leur valeur et les garanties conventionnelles détenues par le créancier n'étaient pas suffisantes pour assurer le recouvrement de sa créance.

Paris, 8 janvier 2015, LawLex202300005162JBJ.

Bastia, 4 novembre 2020, LawLex202300007429JBJ ; Montpellier, 3 décembre 2020, LawLex202300006625JBJ ; Caen, 6 décembre 2022, LawLex202300007623JBJ.

Paris, 5 mars 2020, LawLex202300006627JBJ.

Cass. 2e civ., 7 juin 2012, LawLex202300005205JBJ.

Bastia, 4 novembre 2020, LawLex202300007429JBJ. - Contra, Orléans, 26 novembre 2020, LawLex202300007332JBJ.

Cass. 2e civ., 26 novembre 1998, LawLex202300003117JBJ.

Paris, 14 mai 2020, LawLex202300007427JBJ.

Lyon, 19 janvier 2023, LawLex202300006550JBJ.

Cass. 2e civ., 23 juin 2016, LawLex202300002270JBJ.

Paris, 18 octobre 2018, LawLex202300008612JBJ. - V. aussi Montpellier, 3 décembre 2020, LawLex202300006625JBJ, préc. : en l’espèce, l’inscription de l’hypothèque provisoire avait été prise sur les biens immobiliers appartenant à la caution mais la banque ne faisait état que des difficultés du débiteur, du fait de la procédure de sauvegarde en cours, sans à aucun moment caractériser les menaces dans le recouvrement de sa créance à l’encontre de la caution elle-même et sans produire aucune pièce à cet égard.

Cass. com., 20 avril 1982, LawLex202300001137JBJ, préc.

Paris, 8 novembre 2007, LawLex202300007702JBJ. - V. aussi Lyon, 19 janvier 2023, LawLex202300006550JBJ.

Cass. com., 20 avril 1982, LawLex202300001137JBJ. – V. aussi Cass. 2e civ., 6 mai 1999, LawLex202300002647JBJ ; 12 mai 2016, LawLex202300001630JBJ.

Cass. com., 25 mars 2020, LawLex202300002186JBJ.

Montpellier, 11 mai 2006, LawLex202300005130JBJ.

Paris, 17 février 2022, LawLex202300006581JBJ ; 26 janvier 2023, LawLex202300006546JBJ.

Douai, 31 janvier 2019, LawLex202300007131JBJ, relevant, dans le cadre d'une succession, les enjeux financiers en présence, la mésentente entre les héritiers et le fait que l'un d'eux ait bloqué certaines sommes pour faire échec à une mesure conservatoire.

Cass. 2e civ., 5 septembre 2019, LawLex202300008138JBJ.

96. Menace dans le recouvrement de la créance