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Propriété industrielle

Issu à l’origine du droit français, le régime de la saisie-contrefaçon a fait l’objet d’une harmonisation européenne par la directive 2004/48 du 29 avril 2004 (art. 7), transposée par la loi du 29 octobre 2007 à l’article L. 716-4-7, alinéa 2, du Code de la propriété intellectuelle. Cet article prévoit que toute personne ayant qualité à agir en contrefaçon peut faire procéder par tous commissaires …

Saisie-contrefaçon

Issu à l’origine du droit français, le régime de la saisie-contrefaçon a fait l’objet d’une harmonisation européenne par la directive 2004/48 du 29 avril 2004 (art. 7), transposée par la loi du 29 octobre 2007 à l’article L. 716-4-7, alinéa 2, du Code de la propriété intellectuelle. Cet article prévoit que toute personne ayant qualité à agir en contrefaçon peut faire procéder par tous commissaires de justice à une saisie-contrefaçon, en vertu d’une ordonnance rendue sur requête par la juridiction civile. Le commissaire de justice peut être assisté d'experts désignés par le demandeur, qui doivent être indépendants, sous peine de nullité de la saisie . L’assistant instrumentaire qui provient d’un cabinet de conseil indépendant peut être désigné expert même s’il est intervenu dans le dépôt de marque de la requérante et a été rétribué pour son assistance dans une opération de saisie-contrefaçon .

La saisie-contrefaçon peut consister en une description détaillée, avec ou sans prélèvement d’échantillons, ou une saisie réelle des produits ou services prétendus contrefaisants, ainsi que de tout document s’y rapportant. Ces derniers peuvent être saisis y compris en l’absence des produits ou services en cause (art. L. 716-4-7, al. 2, CPI). Le juge peut aussi ordonner la description détaillée ou la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour fabriquer ou distribuer les produits ou fournir les services prétendument contrefaisants (art. L. 716-4-7, al. 3, CPI).

La requête en saisie-contrefaçon doit être présentée par le requérant à la juridiction civile compétente. Lorsque la requête est présentée dans le cadre d’une saisine au fond, ce sont les dispositions de l’article 845, alinéa 3, du Code de procédure civile qui s’appliquent, à l’exclusion de celles de l'article L. 716-4-7 du Code de la propriété intellectuelle . La compétence pour en connaître revient dans ce cas au président de la chambre saisie ou à laquelle l’affaire a été distribuée ou au juge déjà saisi. La requête doit être remise en double exemplaire et doit être motivée (art. 494, al. 1, CPC). Elle peut autoriser le commissaire de justice à procéder, selon les termes de l’article R. 716-16, alinéa 2, du Code de la propriété intellectuelle, à toute constatation utile en vue d’établir l’origine, la consistance et l’étendue de la contrefaçon .

Si la juridiction compétente ne fait pas droit à la requête, le requérant peut interjeter appel, sauf si l’ordonnance émane du premier président de la cour d’appel. Le délai d'appel est de quinze jours. L'appel est formé, instruit et jugé comme en matière gracieuse (art. 496, al. 1, CPC). S'il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu l'ordonnance, via la procédure du référé-rétractation (art. 496, al. 2, CPC).

Le requérant est soumis à un devoir de loyauté qui l’oblige à fournir au juge toutes les informations pertinentes pour le mettre en situation d’appréhender les enjeux du procès en vue duquel l'autorisation de faire procéder à la saisie-contrefaçon lui est demandée et de porter une appréciation éclairée sur son intérêt légitime à recourir à une telle mesure . Il manque à son devoir de loyauté lorsqu’il omet de faire état d’informations sur des procédures d’opposition à enregistrement de marque mettant en cause les mêmes signes que ceux objet du litige en contrefaçon au terme desquelles il a été décidé que le signe contesté ne constitue pas l’imitation des marques opposées et ne crée pas de risque de confusion . Le manquement au devoir de loyauté entraîne la nullité des opérations de saisie-contrefaçon, dès lors que l’ordonnance sur requête autorisant de procéder à la saisie-contrefaçon est obtenue dans des conditions abusives , et caractérise une faute au sens de 1240 du Code civil, engageant la responsabilité délictuelle de son auteur .

La saisie-contrefaçon est ordonnée par le président du tribunal judiciaire compétent pour connaître du fond (art. R. 716-16 CPI). Au cours de la procédure d'appel, seul le premier président de la cour d’appel est compétent pour ordonner sur requête une mesure de saisie-contrefaçon . Le président du tribunal peut également ordonner, au vu du procès-verbal de saisie, toute mesure pour compléter la preuve des actes de contrefaçon allégués (art. R. 716-19, al. 1, CPI).

L'ordonnance sur requête constitue une décision provisoire, rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse (art. 493 CPC). La mesure de saisie-contrefaçon relève de cette catégorie. La directive 2004/48 précise d’ailleurs que la mesure peut être prise sans que l’autre partie soit entendue, notamment lorsque tout retard dans son prononcé est susceptible de causer un préjudice irréparable au titulaire du droit ou lorsqu'il existe un risque démontrable de destruction des éléments de preuve (art. 7 dir. 2004/48). L’effet de surprise permet de prévenir l’éventuelle destruction de preuves. L’ordonnance doit être motivée (art. 495, al. 1, CPC) et contenir toutes les mentions exigées par les articles 454 et suivants du Code de procédure civile. Elle est exécutoire au seul vu de la minute, c’est-à-dire sur simple présentation à la partie mise en cause, sans qu’il soit besoin de la lui notifier (art. 495, al. 2, CPC).

Le juge peut, par ailleurs, subordonner l'exécution des mesures qu’il ordonne à la constitution par le demandeur de garanties destinées à assurer l'indemnisation éventuelle du défendeur si l'action en contrefaçon est ultérieurement jugée non fondée ou la saisie-contrefaçon annulée (art. L. 716-4-7, al. 4, CPI). Ces garanties doivent être constituées avant qu'il soit procédé à la saisie-contrefaçon (art. R. 716-17, al. 1, CPI).

Enfin, le juge a la faculté de modifier ou de rétracter son ordonnance, même si le juge du fond est déjà saisi de l'affaire (art. 497 CPC).

Le commissaire de justice doit respecter le périmètre de l’ordonnance de saisie-contrefaçon. Il ne saurait étendre ses recherches et constatations aux autres marques que celles visées par l’ordonnance , ni se faire remettre des documents s’il n’est autorisé à procéder à la saisie-contrefaçon que par voie de description et de reproduction de documents .

La saisie réelle n’est pas limitée à la seule preuve de la matérialité de la contrefaçon, mais comprend la recherche et la saisie potentielle d'éléments permettant de déterminer l'étendue de la contrefaçon et le préjudice .

Avant de procéder à la saisie-contrefaçon, le commissaire de justice doit donner copie de l’ordonnance et, le cas échéant, de l’acte constatant la constitution de garanties, aux détenteurs des objets saisis ou décrits . A défaut, la saisie-contrefaçon peut être annulée et des dommages-intérêts réclamés à le commissaire de justice (art. R. 716-17, al. 2, CPI). Toutefois, en matière de substitution de produits ou de services, le commissaire de justice n'est tenu de donner copie de ces documents qu'après livraison des produits ou fourniture des services (art. R. 716-17, al. 3, CPI). Après la saisie-contrefaçon, le commissaire de justice doit remettre à ces mêmes personnes une copie du procès-verbal (art. R. 716-17, al. 2, CPI).

L’absence de date sur le procès-verbal de saisie constitue une irrégularité de forme susceptible d’entraîner l’annulation du procès-verbal en vertu des articles 112 et suivants du Code de procédure civile, sauf s’il est établi que le contestant à la saisie-contrefaçon ne pouvait se méprendre sur la date des opérations de saisies . En revanche, en cas de constat d'achat, l'absence de garanties suffisantes d'indépendance du tiers acheteur à l'égard du requérant n'est pas de nature à entraîner la nullité du constat d'achat, le juge devant apprécier si, au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, ce défaut d'indépendance affecte la valeur probante du constat .

Le requérant doit se pourvoir au fond, par voie civile ou pénale, dans un délai de vingt jours ouvrables ou de trente et un jours civils si ce délai est plus long, à compter du jour où la saisie est intervenue (art. R. 716-18 CPI). A défaut, l'intégralité de la saisie, y compris la description , peut être annulée à la demande de la personne saisie, sans que celle-ci ait à motiver sa demande et sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés (art. L. 716-4-7, al. 5, CPI).

Le saisi peut formuler sur requête une demande pour obtenir que les conditions ou conséquences de la saisie-contrefaçon soient précisées sur le fondement de l'article R. 716-19 du Code de la propriété intellectuelle, aux seules conditions énoncées par ce texte . 

Les experts doivent être indépendants en vertu du droit à un procès équitable, consacré à l’article 6, 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Rennes, 25 mai 2004, n° 03-01561, LawLex200400003493JBJ, Dr. et pr. 2004. 338, note HUGON.

Cass. com., 19 décembre 2006, n° 05-14.431, LawLex202200000037JBJ,PIBD 2007, n° 846, III, 112 ; Comm. com. électr. 2007, comm. 36, CARON ; Bull. civ. IV, n° 265 ;JCP E 2008, 1000, CARON ; JCP G 2007, IV, 1236 ; RTD Com. 2021, 341 : en l’espèce, l’ordonnance autorisait l’huissier à procéder au besoin par copie, photocopie, photographie ou tout autre moyen de reproduction de tous documents techniques et commerciaux, écrits ou dessins relatifs à la nature, à l'origine, à la destination et à l'étendue de la contrefaçon de marque, mais ne mentionnait pas l’autorisation de se faire remettre des documents.

Paris, 29 juin 2021, 20/15507, LawLex202200003520JBJ, Propr. ind. n° 11, novembre 2021, étude 22, GUYOT.

Pour une illustration, V. Cass. 1reciv., 31 octobre 2012, 11-21.920, LawLex202200000881JBJ, Propr. intell. 2013, n° 46, 78, obs. LUCAS ; PIBD 2013, n° 975, III, 886 ; Comm. com. électr. 2013, chron. 8, § 11 KAHN, rendue en matière de droit d’auteur.

Paris, 3 décembre 2008, n° 07-06847, LawLex201000000408JBJ, relative à un contestant qui était l'auteur de la transmission par télécopie des pièces communiquées à l’huissier, et dont l’un des représentant était présent lors des opérations.

Cass. mixte, 12 mai 2025, LawLex202500003859JBJ, D. 2025, 888, qui retient qu'il n'y a pas lieu d'annuler le procès-verbal de constat d'achat au seul motif de l'absence d'indépendance du tiers acheteur, stagiaire au sein du cabinet d'avocats de la demanderesse, dès lors que compte tenu du rôle limité du tiers acheteur et du fait qu'il ait agi en permanence sous le contrôle du commissaire de justice, le défaut d'indépendance de ce tiers n'affecte pas le caractère objectif des constatations mentionnées au procès-verbal.

Cass. com., 7 juin 2011, n° 10-19.742, LawLex201100001030JBJ, Contrats, conc., consom. 2011, n° 189, MALAURIE-VIGNAL ; RJDA 10/11, n° 858 ; PIBD 2011, n° 947, III, 578 ; Bull. civ. IV, n° 93 ; D. 2011, 1679 ; Gaz. Pal. 2011, 1827, 16316 ; RJDA 2011, 258 ; JCP E 2011, 1565 ; Propr. ind. 2011, comm. 73, TREFIGNY ; JCP E 2011, n° 1565.

Cass. com., 1er mars 2017, n° 15-16.159, LawLex202200003952JBJ, JCP E 2017, 1177 et 209 ; Dalloz IP/IT 2017, 190 ; PIBD 2017, n° 1070, III, 287 ; Dalloz IP/IT 2017, 474, obs. LECOURT.

Cass. com., 26 mars 2008, n° 05-19.782, LawLex202200000752JBJ, Bull. civ. 2008, IV, n° 70 ; PIBD 2008, n° 875, III, 340 ; D. 2008, 1206, 2332, note LANCRENON ; Comm. com. électr. 2008, comm. 65, CARON, qui fait droit à la décision de la Cour d’appel de rétracter l’ordonnance sur requête rendue par le président du Tribunal de grande instance (actuel tribunal judiciaire).

L’article 7 de la directive du 29 avril 2004 impose au demandeur de fournir au tribunal des éléments de preuve raisonnablement accessibles pour étayer ses allégations selon lesquelles il a été porté atteinte à son droit de propriété intellectuelle ou qu'une telle atteinte est imminente. Néanmoins, cette exigence n’a pas été reprise en droit français, les Etats pouvant conserver la procédure nationale dès lors qu’elle est plus favorable aux titulaires de droit (art. 2 dir. 2004/48).

Paris, 26 novembre 2021, n° 20/05827, LawLex202200003519JBJ, PIBD 2022, n° 1175, III, 6 ; IRPI février 2022, 9, note GRUDLER ; D. 2022. 482, CLAVIER.

Paris, 26 novembre 2021, n° 20/05827, LawLex202200003519JBJ, PIBD 2022, n° 1175, III, 6 ; IRPI février 2022, 9, note GRUDLER ; D. 2022. 482, CLAVIER, approuvée par Cass. com., 6 décembre 2023, LawLex202300014275JBJ.

Cass. com., 26 mars 2008, n° 05-19.782, LawLex202200000752JBJ, Bull. civ. 2008, IV, n° 70 ; PIBD 2008, n° 875, III, 340 ; D. 2008, 1206, 2332, note LANCRENON ; Comm. com. électr. 2008, comm. 65, CARON.

Cass. com., 14 septembre 2010, n° 09-16.854, LawLex202200000756JBJ

Cass. com., 3 juillet 2019, n° 16-28.543, LawLex202200003605JBJ, Propr. ind. n° 11, novembre 2021, étude 22, GUYOT ; RTD com. 2020. 347, obs. PASSA.

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166. Saisie-contrefaçon

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