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Décisions

CA Paris, 5e ch. B, 8 juin 1989, n° 87-4138

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

VAG France (SA)

Défendeur :

Froelich (ès qual.), Herzog

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Schoux

Conseillers :

MM. Bourrely, Thery

Avoués :

SCP Barrier Monin, SCP Roblin Chaix de Lavarenne

Avocats :

Mes Bourgeon, Landon.

Considérant que la société anonyme VAG France a, par déclaration remise au secrétariat greffe le 23 janvier 1987, interjeté appel du jugement en date du 2 décembre 1986 par lequel le Tribunal de commerce de Paris a prononcé la résiliation judiciaire à ses torts à elle du contrat de concession exclusive pour l'année 1984 conclu entre elle et Monsieur Herzog, l'a condamnée à reprendre le stock de pièces détachées et les outillages et matériels spécifiques à charge de procéder à l'enlèvement aux frais de Maître Froelich dans un délai de deux mois à compter de sa signification, dit qu'elle transmettrait dans un délai d'un mois à compter de cet enlèvement à ce dernier le prix des pièces et outillages enlevés, prix calculé suivant les termes du contrat et l'a condamnée aux dépens de cette partie de l'instance ;

Que la même décision a désigné l'expert avec mission de vérifier les éléments d'appréciation du préjudice subi par Monsieur Herzog ;

Considérant que ses conclusions tendent, en se limitant à ce qui relève de leur dispositif, à ce qu'ils soit dit qu'elle était fondée à retirer à Herzog son exclusivité de vente en application de l'article VI-5 du contrat de concession, ce dernier, représenté par le syndic à son règlement judiciaire, étant mal fondé en sa demande en résiliation judiciaire, à ce qu'il soit dit n'y avoir lieu à expertise d'un préjudice à la réparation duquel il ne peut pas être prétendu et à ce que Herzog et son syndic ès qualité soient condamnés à lui payer la somme de 30 000 F au titre de la disposition de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Considérant que les intimés concluent à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a statué sur la résiliation judiciaire du contrat de concession ;

Qu'ils demandent qu'il soit statué par voie d'évocation dans le sens de la condamnation de la société appelante à payer à Maître Froelich ès qualité la somme de 3 260 544 F à titre de dommages intérêts avec intérêts à compter du 2 décembre 1986 et celles de 136 967,56 F et de 595 470,31 F pour valeur au prix client hors taxes des stocks de pièces détachées d'origine VAG détenues par Herzog avec intérêts au taux légal à compter du 2 décembre 1986 à charge pour la société VAG de reprendre lesdits stocks ;

Qu'il concluent à la condamnation de cette société à payer à Monsieur Herzog la somme de 1 191 000 F à titre de dommages-intérêts pour réparation de son préjudice personnel ;

Qu'enfin ils demandent que la société appelante soit condamnée à leur payer la somme de 30 000 F à titre de remboursement en application de la disposition de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Considérant que, par conclusions déposées le 16 mars 1989, la société VAG qui maintient ses prétentions antérieures, demande subsidiairement qu'il soit dit que le préjudice sujet à réparation ne saurait excéder la perte de marge brute comprise entre la résiliation du contrat de concession et la date contractuelle d'échéance du contrat, soit la somme de 1 111 533 F.

Considérant que, des faits de la cause exposés par les premiers juges dans les motifs de leur décision, il y a essentiellement lieu de retenir :

- que la société VAG France, ayant pour objet l'importation de véhicules de marques Volkswagen et Audi, était liée à son concessionnaire dans le département du Haut Rhin, par un contrat valable pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1984, contrat qui, signé par ce dernier le 10 janvier et à lui retourné le 29 mars, excluait la tacite reconduction, encore qu'il prévît un préavis de trois mois à la charge de la partie qui déciderait de ne pas maintenir avec l'autre des relations contractuelles postérieurement à son expiration, et l'engagement de vente de 360 véhicules de la part dudit concessionnaire ;

- que, pour des raisons qui seront précisées et dont la portée donne lieu à discussion entre les cocontractants, la société VAG France décidait de priver Monsieur Herzog des conditions de paiement plus favorables qui lui étaient consenties pour le soumettre à la nécessité du paiement comptant pour les commandes de véhicules neufs et de pièces de rechange, mesure qui s'est traduite dès le 6 février par le refus de pièces détachées hors paiement comptant et par le blocage d'un véhicule en instance de livraison et qui a pris fin à compter du 20 février suivant ;

- que, par lettre du 9 juillet 1984, faisant suite à des mises en garde antérieures la société VAG France, faisait état de ce que, pour le premier semestre l'objectif de vente n'avait pas été atteint qu'à concurrence de 46,4 % soit 85 véhicules au lieu de 180, décidait de priver son concessionnaire Herzog de l'exclusivité de vente invoquant, dans le sens de cette mesure la clause de l'article VI-5 du contrat ;

- que par lettre du 19 juillet suivant Herzog annonçait à la société sa décision de surseoir à ses paiements envers elle " jusqu'à ce que nous ayons trouvé une solution qui nous satisfasse ", exposant qu'il s'agissait là de sa part d'une mesure extrême inspirée par l'absence de prise en considération de ses doléances justifiées ; que, nonobstant la mise en garde exprimée par la société, il persistait dans cette décision et l'appliquait ;

- que, par lettre du 23 août 1984, la société informait Monsieur Herzog de sa décision de recourir aux conditions de paiement strictes et le mettait en demeure de régler ce qu'il lui devait lui rappelant que, faute de ce faire, il s'exposait à l'accomplissement des stipulations de l'article XVII du contrat : celle relative au manquement commis par une des parties aux obligations y figurant et celle, exclusive de préavis et d'effet immédiat, visant les " protêts ou chèques impayés, ou non règlement de tout autre moyen de paiement accepté par le concessionnaire " ;

Qu'il ressort de la lecture de la décision des premiers juges que ceux-ci ont considéré que le contrat conclu entre les parties était marqué par un déséquilibre, du fait qu'il mettait à la charge du concessionnaire un ensemble d'obligations alors que le concédant n'avait que celle de livrer la marchandise qui lui était commandée, qu'ils ont retenu l'idée selon laquelle la société VAG France avait " tout mis en œuvre pour amener Herzog à prendre une position susceptible de permettre la résiliation du contrat ", reprenant les faits de la cause en fonction de ce qui leur paraissait constituer une donnée de base et qu'ils ont considéré que la clause relative aux non-paiements comme inapplicable dans les rapports entre concédant et concessionnaire ;

Qu'il est également à retenir que retenant que la brutalité de la rupture décidée par la société pouvait " constituer une circonstance atténuante au silence de Herzog ", ils ont décidé de reporter le point de départ du délai contractuel de trois mois à compter de la résiliation pour demander la reprise du stock de pièces détachées ;

Considérant que la discussion des parties porte essentiellement sur l'appréciation de données de fait dont la matérialité même doit être considérée comme acquise ; qu'à s'en tenir à l'exposé qui précède, il ressort :

- que sous réserve d'appréciation de la validité des résultats obtenus en matière de vente de véhicules au terme du premier semestre de 1984, leur insuffisance exposait Herzog à l'application de la clause de l'article VI-5 en vertu de laquelle le concédant se réservait le droit soit de modifier le droit de vente, soit de modifier la zone de responsabilité concédée, soit de désigner un ou plusieurs autres concessionnaires ; qu'en l'espèce le retrait de l'exclusivité " modification du droit de vente ", rentrait dans les limites de cette stipulation ;

- que, sous réserve également de l'interprétation à retenir de l'article XVII-2 la décision prise par Herzog de cesser ses paiements l'exposait à la résiliation avec effet immédiat et sans préavis du contrat de concession ;

Qu'ainsi il y a lieu de rechercher si, d'une part, les objections à la validité des clauses considérées ou à leur applicabilité sont à retenir et, dans l'affirmative, si la société VAG France doit être considérée comme sans droit à s'en prévaloir à raison de ce qu'elle serait à l'origine du fait de la mauvaise foi dont elle aurait fait preuve, et de l'insuffisance de production de son concessionnaire et de sa décision de suspendre ses paiements ; que les conséquences de ce qui sera statué à ce sujet seront à examiner ensuite ;

Sur les clauses invoquées en la cause par la société :

1°) Considérant qu'il n'est pas contesté que la clause de l'article VI-5 ne prévoit que les mesures, exclusives de la résiliation du contrat qui ont été rappelées plus haut ; que, pour en contester en la cause l'application, il est fait état de ce que l'obligation mise à la charge du concessionnaire quant au nombre de véhicules à vendre, s'entend dans le cadre de l'année ; qu'ainsi l'annexe au contrat stipulant que " l'objectif annuel ... est réparti en trois quadrimestres dont la ventilation par quadrimestre et par ligne du produit sera communiqué au début d'année au concessionnaire qui s'engage à vendre le nombre de véhicules défini à chaque quadrimestre, présente un caractère purement potestatif et que sa nullité entraîne celle de l'article VI-5 précité ;

Qu'il est également fait état d'une absence d'une obligation autre que de moyens l'objectif annuel de vente étant fixé " en considération du potentiel du territoire décrit en annexe et des objectifs de pénétration que s'est fixés le concédant ;

Qu'enfin la révision à la baisse par la société de ses objectifs de pénétration faisait obstacle à ce qu'elle maintient ses prétentions en matière de vente à l'égard de son concessionnaire, ceci sans préjudice de ce qu'elle a compromis ses possibilités en la matière ;

Considérant que la clause de l'article VI-5 relative à l'insuffisance des ventes est conçue à la fois comme précisant la conséquence à tirer de l'engagement pris par le concessionnaire et comme destinée à assurer au concédant une garantie quant au déroulement correct de son activité ; qu'il consacre ainsi le principe selon lequel les résultats de cette activité doivent se manifester de manière à aboutir au résultat global convenu, au minimum à concurrence de 80 % ; que l'annexe précitée se borne à préciser que le fractionnement qui se dégage de cette clause se réalise par quadrimestres ; qu'une telle formule échappe à la critique exprimée à son sujet du fait qu'elle se situe dans le cadre limitatif de la prévision annuelle et qu'en l'espèce il ne peut qu'être noté que la société concédante l'a appliquée dans un sens tel qu'elle ne comportait pas d'aggravation temporaire de la charge convenue puisque, à mi-année, elle n'a fait état que d'un objectif de vente correspondant à la moitié de ce qui avait été stipulé pour 1984 ;

Considérant, sur le second point, que l'indication au contrat des critères envisagés pour fixer l'objectif annuel n'implique pas que l'engagement souscrit par le concessionnaire, engagement faisant suite à une estimation qui comportait une réduction de 102 ventes par rapport à ce qui avait été convenu pour 1983, n'ait pas porté sur un résultat ;

Considérant, enfin, qu'en retenant que la société avait réduit, au cours de l'année 1984, son objectif d'ensemble de 12 % il n'apparaît pas que l'application de cette remise en question en faveur de Herzog, aurait modifié la conclusion qui a été retenue le 9 juillet 1984 ; qu'en effet en admettant un chiffre de vente réduit à 159 véhicules, la vente de 85 véhicules correspondrait à 59,4 % de ce chiffre, donc à un déficit de 26,6 % par rapport aux 80 % à réaliser ;

Considérant, donc, que les moyens invoqués à l'encontre de la validité de cette clause ou de son applicabilité en la cause, ne peuvent être retenus ; qu'à cet égard, il y a seulement à vérifier si, provoquant le déficit de ventes qui a été constaté, la société appelante s'est exclue du droit de l'invoquer qui sera examiné ultérieurement ;

2°) Considérant que les premiers juges ont estimé qu'il y avait totale incompatibilité entre la clause de l'article XVII-2 relative au défaut de paiement et celle de l'article VII-4 relative au défaut de paiement du concessionnaire à l'égard du concédant, texte réglant les litiges survenant à cette occasion entre eux ;

Considérant qu'envisagée en elle-même cette clause, qui envisage des éventualités, soit de non-paiement, soit d'incidents de paiement de la part du concessionnaire, est conçue en termes tels qu'elle vise ses défaillances sans préciser qui en serait victime ; qu'ainsi elle n'exclut pas que celle-ci soit le concédant et que, dans ce sens, la gravité de la sanction qu'elle rend possible, la résiliation anticipée du contrat sans préavis et avec effet immédiat, amène à la conclusion que le manquement contractuel qu'elle définit est caractérisé de la manière la plus certaine quand ce dernier le subit ;

Considérant que la clause VII-4 qui, selon les premiers juges exclurait que celle précitée de l'article XVII-2 du contrat puisse s'appliquer dans les rapports entre concédant et concessionnaire, énonce que " au cas où le concédant consentirait au paiement par traite, le matériel W Audi défini à l'article I, ainsi que les outillages généraux ou spéciaux, demeureront la propriété du concédant jusqu'à paiement intégral de la traite ou de la dernière traite émise, le transfert de propriété au concédant n'intervenant qu'après règlement effectif de la dernière échéance et toute revente ou livraison à un tiers étant interdite " ; qu'il est également précisé que, " en cas de défaut de paiement et huit jours après une mise en demeure restée ans effet, le concédant est en droit de reprendre l'objet livré que le concessionnaire sera tenu de lui restituer à première demande " ;

Que les premiers juges ont considéré que l'objet de cette clause était de régler les difficultés entre concédant et concessionnaire en cas de non-paiement par celui-ci de ce qu'il devait à celui là, de sorte que la stipulation de l'article XVII-2 était étrangère à cette question ;

Considérant que sa teneur est dans le sens qu'elle s'analyse en une clause de réserve de propriété ; qu'elle vise ainsi le sort à réserver aux liens sur lesquels elle porte tout en laissant intact le problème de la répercussion sur le maintien du contrat de concession des défaillances en matière de paiement de ce qui est dû au concédant par le concessionnaire ; que force est de constater que la totale contradiction relevée par les premiers juges n'existe pas ;

Considérant qu'également à raison du sursis à ses paiements l'intimé, Herzog, s'est placé dans la situation qui, envisagée indépendamment d'autres données, ouvrait droit, au profit de la société appelante à la résiliation immédiate et sans préavis du contrat de concession;

Qu'il y a ainsi lieu de vérifier si les fautes imputées par ledit concessionnaire au concédant, fautes dont il s'agit de rechercher si elles sont établies dans leur matérialité et dans leur qualification, sont de nature à justifier le prononcé de la résiliation, acquise dans la réalité des faits aux torts et griefs de ce dernier ;

Sur les griefs invoqués par Herzog et leur éventuelle conséquence :

Considérant que ceux qui seraient antérieurs à la conclusion du contrat ne peuvent pas être retenus utilement puisqu'ils ne peuvent pas concerner son exécution ; que ceux qui sont à examiner ont trait à la vente publicitaire de véhicules avec des remises de 6 à 10 % décidée par l'intimé, aux mesures de blocage et d'exigence de paiement comptant des véhicules neufs et du matériel prises en son encontre par la société appelante, à la livraison tardive de la voiture Golf GTI de démonstration, à l'exclusion du bénéfice de la publicité régionale, à l'échec de la rencontre qui aurait permis d'aplanir les difficultés, à la méconnaissance des facteurs compromettant la réalisation de ses objectifs de vente et aux mesures rigoureuses dont il a été usé envers lui ;

Que, de son côté, la société appelante fait valoir que les résultats déjà insuffisants de son concessionnaire pour l'exercice 1983, ont persisté dans la même évolution, entraînant la décision de retrait d'exclusivité de vente au terme du délai de six mois justifiant de conclure dans ce sens et, par suite de la décision de sursis au règlement de ce qu'il lui devait, non pas la résiliation, mais le retour à la formule de livraisons sur paiement préalable et la mise en demeure de payer l'arriéré dans le délai de huit jours, à peine de voir les relations contractuelles entre les parties prendre fin ;

1°) Considérant que, le 20 janvier 1984, Herzog a fait paraître dans la presse l'offre de vente de voitures neuves avec remise, selon les types indiqués, allant de 6 à 8 et à 10 % offre limitée aux voitures en stock, exclusive de reprise et pour des opérations à conclure au garage ;

Que la société appelante exprimait à Herzog son désaccord sur cette forme publicitaire évoquant l'idée de ventes à perte, et, en tous cas, lui reprochant d'aggraver inutilement la situation de sa trésorerie et de porter préjudice aux autres concessionnaires du secteur ; qu'elle le privait des facilités de règlement de ses dettes envers elle pour le soumettre à la formule de règlement strictement au comptant qui a été appliquée pendant environ deux semaines ;

Que, si Herzog a fait état de ce que deux autres concessionnaires ont également procédé à des ventes publicitaires, la société Sovra et la société Générale Auto, il doit être constaté que pour l'un, la remise consentie pour quelques véhicules n'a pas excédé 5 % et que, pour l'autre, l'opération a concerné des véhicules d'occasion ;

Considérant que cet incident met en évidence l'opposition des points de vue des parties, la société estimant, ainsi qu'il ressort de sa lettre du 9 février 1984, que le problème essentiel était de relancer les ventes aux conditions normales de prix, alors qu'Herzog pensait que le 25e anniversaire de sa concession lui donnait l'occasion d'attirer des clients ;

Qu'il est à noter que c'est finalement lui qui s'est rallié au point de vue de la société en mettant fin à cette vente avec pour suite, le retour aux conditions antérieures plus favorables de paiement des véhicules et pièces fournis par elle ;

2°) Considérant que, par télex du 10 février 1984, Herzog demandait à l'agence DDB chargée de régler les problèmes de " repiquage " permettant aux concessionnaires de la région de se voir associé à la publicité pour les véhicules VW et Audi, nonobstant d'elle que l'indication de ce qu'elle n'était pas habilitée à lui répondre ; que sa lettre du 24 février adressée à la société appelante pour obtenir une explication de cette exclusion n'a, selon lui, été suivie d'une réponse ;

Que la société appelante conteste le fondement même de ce grief, la publicité associant les concessionnaires à la mise en valeur de véhicules étant leur fait et ne comportant pas d'intervention de sa part ;

Considérant que Herzog produit des coupures de la presse où la publicité ne comporte pas la mention de son entreprise, ce qui, de toute évidence, peut suggérer au public qu'il ne figure plus sur le marché des véhicules VW et Audi ; que sa conclusion est dans le sens d'une manœuvre discriminatoire poursuivie à son encontre par la société appelante ;

Considérant qu'en l'état des documents produits le fait matériel qu'il dénonce est établi ; que par contre la preuve de ce qu'il résulte d'une intervention du concédant fait défaut ;

3°) Considérant que Herzog produit la lettre-circulaire en date du 2 février 1984 par laquelle la société VAG France lui adressait les bons de commande de ses véhicules, lettre comportant la mention suivante : " Merci de nous envoyer ces commandes au plus tôt. Cette attribution sera complétée par des Golf GTI dans les prochains jours " ; que, dans un journal local paru le 24 février 1984, paraissait la publicité en faveur de cette voiture avec mention de deux garages où elle était en vente ; que, le jour même, Herzog écrivait à la société, lui indiquant qu'il tenait de son service de distribution que l'attribution prévue pour lui avait été supprimée ; qu'il recevait ensuite un avis d'affectation dudit véhicule daté du 12 mars 1984 et que sa réception avait lieu le 21 mars ;

Que, sur la base de ces faits, il conclut à une mesure délibérée de discrimination à son encontre ;

Considérant que la société appelante conteste cette conclusion en faisant valoir que la livraison dont Herzog se situait dans la limite de temps de celles qu'elle devait effectuer et qu'il n'a pas été servi le dernier ;

Considérant que, sans exclure que la mesure prise à l'encontre d'Herzog quant aux conditions de ses règlements à la société ait eu un effet retardateur sur la remise de la voiture Golf GTI, il apparaît que le grief qu'il exprime dans le sens d'un parti pris de la lui faire attendre prend appui sur le renseignement qu'il affirme avoir obtenu de la préposée du service de distribution de la société appelante ; qu'il n'est ainsi pas possible de le considérer comme établi quant à l'attitude qu'il impute à celle-ci ;

4°) Considérant que, dans le même sens, le projet de rencontre en vue de discuter de l'amélioration des résultats d'Herzog a pu échouer par suite de circonstances n'impliquant pas nécessairement un parti pris défavorable à son encontre ;

Considérant que les griefs ci-dessus exposés, ou bien donnent lieu à incertitude quant à leur consistance, ou bien ne se présentent pas comme d'une portée décisive ; que ; notamment, celui tenant à la vente publicitaire fait ressortir une divergence entre les parties sur son opportunité ; qu'il n'en ressort pas que la société VAG France ait été inspirée par un parti pris de nuire à un concessionnaire qui finalement s'est rendu à ses raisons ;

Que, finalement, subsiste une mesure de blocage des livraisons non assorties de la part du concessionnaire, du paiement comptant qui, tout en s'expliquant par la crainte d'un ralentissement des ventes d'Herzog ralentissement amenant à envisager l'hypothèse d'une situation financière moins favorable, a été au moins hâtive et excessive à la période à laquelle elle se situe, c'est-à-dire en début de la période semestrielle au terme de laquelle une appréciation serait formulée ; qu'il doit être tenu compte de ce qu'elle a été limitée dans le temps de sorte que son effet a été sensiblement réduit ;

Que, pendant ce même temps, les lettres adressées par la société à Herzog les 9 février 1984, 17 mai 1984 et 6 juin 1984, le mettaient en garde contre la conséquence, à savoir une modification de ses conditions de vente, qui résulteraient de la non-réalisation de 80 % de l'objectif de ventes qu'il avait accepté ; qu'au vu de ce qui précède, cet objectif n'a pas été atteint et qu'il y a ainsi lieu d'apprécier si ses conditions d'exploitation ont été faussées par la concurrence anormale dont il aurait fait l'objet de la part d'autres concessionnaires du secteur, lesquels auraient procédé, selon lui, à des ventes massives de véhicules à destination de l'Allemagne, s'assurant ainsi la certitude de résultats spectaculaires ou étendant leur activité à son propre secteur ;

Considérant, sur ce dernier point, que la thèse de l'intimé s'inspire de l'idée que la concession dans un secteur déterminé exclut que les clients y résidant puissent s'adresser à un autre vendeur que son titulaire ; que cette thèse se heurte au fait que ces clients ont le libre choix de leur cocontractant ; qu'il s'agit là d'un risque commercial inhérent à un système économique à base de liberté de choix pour ces clients ; qu'il n'est pas démontré que Herzog ait, sur son secteur, fait l'objet de concurrence déloyale de la part des autres concessionnaires ;

Considérant que les ventes à destination de l'étranger par un concessionnaire de la même région ont donné lieu à l'établissement de cinq factures dont copie non contestée est produite en la cause ; que, par ailleurs, est produite une liste de véhicules avec l'indication du prix en monnaie allemande de chacune d'elles ; liste émanant d'un commerçant, Proietto de nature à établir que l'achat de véhicules pouvait l'intéresser, mais dont il n'est pas possible de tirer quelque conclusion que ce soit quant aux suites qu'elle a comportées ;

Considérant que ces données de fait ne sont pas suffisantes pour démontrer que Herzog ait subi, par comparaison, un désavantage par rapport aux autres concessionnaires pour la réalisation de l'objectif dont il était tenu ;

Considérant en conséquence, qu'il est à retenir que les difficultés entre Herzog et la société VAG France ont essentiellement tenu à la persistance de l'insuffisance de ses résultats pendant le premier semestre de l'année 1984 et qu'il a précipité la résiliation du contrat par sa décision en toute hypothèse injustifiable, eu égard à la clause de l'article XVII-2 du contrat et au fait que les paiements dont il était tenu correspondaient à des livraisons qui lui avaient été faites, qu'il a prise et appliquée de les suspendre ;

Considérant que, de ce qui précède, il résulte que le fondement même du droit à réparation invoqué fait défaut de sorte que les demandes formées de ce chef doivent être rejetées ;

Considérant qu'en vertu de l'article XIX du contrat la demande en reprise du stock détenu par le concessionnaire doit intervenir dans le délai de trois mois de la cessation de ses relations contractuelles avec le concédant ; que le relevé de cette forclusion admise par les premiers juges en considération de ce que la " brutalité " de la rupture peut constituer une " circonstance atténuante " se heurte à une stipulation contractuelle qui, non équivoque, ne peut que recevoir application ; qu'il y a lieu de rejeter les prétentions émises à cet égard par l'intimé ;

Sur les demandes accessoires et les dépens :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de ce dernier en remboursement au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ne peut qu'être rejetée ;

Considérant que la société VAG France a été amenée à exposer des frais non taxables qu'il serait inéquitable de laisser définitivement à sa charge et qu'il y a lieu d'évaluer à la somme de 8 000 F au remboursement de laquelle doit, en application de la disposition précitée, être, en sus dépens, condamné Herzog ;

Par ces motifs : Dit les parties recevables en leurs appels principal et incident, Infirmant le jugement entrepris ; Déboute Monsieur Herzog et Maître Froelich ès qualité de syndic à son règlement judiciaire de leur demande tendant à ce qu'il soit dit que la résiliation du contrat de concession liant le premier à la société VAG France est imputable à faute à celle-ci ; Constate que cette résiliation prend appui sur les clauses dudit contrat ; Déboute les susnommées de leurs demandes en dommages intérêts et en reprise de stock à l'encontre de ladite société, ainsi que de leur demande au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; Les condamne à payer à la société VAG France la somme de 8 000 F au titre de cette disposition, Les condamne aux dépens, Admet la SCP Barrier Monin, avoué, au bénéfice de la disposition de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.