Contrats d'affaires

En l'absence d'autorisation écrite préalable du maître d'ouvrage ou de ratification a posteriori par celui-ci des travaux supplémentaires exécutés par l'entreprise, seul un bouleversement de l'économie du contrat permet de sortir du forfait et à l’entrepreneur d’obtenir le paiement des travaux supplémentaires , sous réserve que le maître d’ouvrage soit à l’origine de ces modifications . Le bouleve …

Bouleversement de l'économie du contrat.

En l'absence d'autorisation écrite préalable du maître d'ouvrage ou de ratification a posteriori par celui-ci des travaux supplémentaires exécutés par l'entreprise, seul un bouleversement de l'économie du contrat permet de sortir du forfait et à l’entrepreneur d’obtenir le paiement des travaux supplémentaires , sous réserve que le maître d’ouvrage soit à l’origine de ces modifications . Le bouleversement peut être caractérisé par un déséquilibre financier de l'opération et/ou une différence excessive entre la nature des prestations initiales et celles qui ont été finalement exécutées . Il peut, ainsi, résulter d'une augmentation substantielle dans la masse des travaux ou d'un changement dans la nature de ces derniers, ayant eu un impact économique significatif . 

Trois critères sont essentiels pour retenir l'existence d'un bouleversement de l'économie du contrat : la nature et l'importance des modifications, à la demande expresse du maître de l'ouvrage, pour un montant dépassant le prix initial. En particulier, les nombreuses modifications apportées aux marchés initiaux, notamment du volume et de la nature des prestations fournies par chaque entrepreneur en cours d’exécution des travaux, voulues par le maître d'ouvrage , ou l'absence de respect des plans originaires ou des descriptifs annexés aux marchés ont bouleversé l'économie du contrat et fait perdre aux marchés leur caractère forfaitaire . Toutefois, le fait que le volume initial des travaux soit très inférieur à celui de la réalisation finale ne constitue pas à lui seul un bouleversement de l'économie du contrat faisant perdre au marché son caractère forfaitaire .  Le maître d'ouvrage doit également payer le prix des travaux supplémentaires, dès lors qu’ils ont été exécutés pour une somme élevée et proche du montant du marché pour la première tranche de travaux,  ou qu’un protocole d’accord tire les conséquences des difficultés rencontrées en lui consentant une indemnisation de plusieurs millions d’euro, que divers travaux et devis complémentaires ont été acceptés, ce qui représente onze avenants au marché de base, et que ces modifications au cours de la réalisation d’un ensemble complexe et évolutif ont, de par leur nature, leur coût et leur ampleur bouleversé l’économie du contrat . 

En revanche, ne caractérisent pas un bouleversement de l'économie du marché, les imprécisions dans le descriptif contractuel concernant les modifications des baies existantes, que l'entrepreneur pouvait mesurer en comparant l'existant aux plans définissant l'ouvrage dont il avait connaissance et les travaux d'ouverture, de bouchage ou de réfection des baies qui ont concouru à la réalisation de l'ouvrage convenu et qui n'ont pas été spécialement demandés en sus du marché par le maître d'ouvrage . De même, il ne peut être fait droit à une demande en paiement de l'entrepreneur, dès lors que ce dernier aurait dû apprécier les données figurant sur le métré fourni, imposé et vendu par le maître de l'ouvrage et formuler toute remarque utile auprès du maître de l'ouvrage, voire refuser de conclure avec lui le marché de travaux global et forfaitaire,  ou que, chargé d'une mission de pilotage d'un chantier de construction pour un prix forfaitaire par un architecte, le bouleversement de l'économie du contrat de pilotage est dû au comportement du maître d'ouvrage qui n'était pas partie à ce contrat .

Enfin, l’entrepreneur ne pourra évidemment prétendre à aucun paiement d’une somme supplémentaire si le bouleversement de l’économie du contrat est de son fait.

Cass. 3e civ., 8 avril 2008, LawLex202200007289JBJ, D. 27 juin 2014, obs. DE RAVEL D'ESCLAPON ; 24 janvier 1990, LawLex202200007318JBJ ; D. 1990, 257, obs. BENABENT ; RDI 1990, 370, obs. MALINVAUD et BOUBLI ; 4 décembre 2002, LawLex202200007347JBJ, RDI 2003, 61, obs. BOUBLI ; 31 mai 2000, LawLex202200007300JBJ ; RDI 2000, 342, obs. BOUBLI, qui précise que le juge ne peut faire droit à une demande en paiement de travaux supplémentaires sans rechercher, à défaut d'autorisation écrite préalable des travaux par le maître de l'ouvrage ou d'acceptation expresse et non équivoque de ceux-ci après exécution, si les modifications apportées, quant au volume des travaux et à la nature des prestations fournies par l'entreprise, ont entraîné un bouleversement de l'économie du contrat. 

Paris, 30 octobre 2020, LawLex202200010697JB ; Cass. 3e civ., 28 octobre 2003, LawLex202200007396JBJ, Constr.-Urb. 2017, n° 39, obs. SIZAIRE, qui considère que le juge avant d'accueillir la demande en paiement de travaux supplémentaires doit constater que ces modifications ont été voulues par le maître de l'ouvrage et que, par leur importance et leur nature, elles bouleversaient l'économie du contrat ; 20 juin 2001, LawLex202200007390JBJ ; 12 avril 2005, LawLex202200007279JBJ.

Cass. 3e civ., 19 janvier 2017, LawLex202200007379JBJ ; D. 10 février 2017, obs. DIAB ; Constr.-Urb. 2017, n° 3, 39, obs. SIZAIRE.

Cass. 3e civ., 6 décembre 2000, LawLex202200007281JBJ ; RDI 2001, 239, obs. BOUBLI ; Defrénois 2001, 872, obs. PERINET-MARQUET ; RDI 2001, 54, obs. PERINET-MARQUET.

Angers, 26 avril 2022, LawLex202200004847JBJ.

Colmar, 4 mars 2022, LawLex202200010700JBJ.

Cass. 3e civ., 26 novembre 2003, LawLex202200007298JBJ ; RDI 2004, 98, obs. BOUBLI ; 7 février 2001, LawLex202200007402JBJ : en l'occurrence, deux permis de construire modificatifs ont été obtenus pour permettre la création d'ouvertures au premier étage d'une terrasse solarium encastrée et la pose de chéneaux en toiture pour déplacer un local de service, modifier la pente d'un versant de la toiture et construire une souche de cheminée.

Cass. 3e civ., 8 mars 1995, LawLex202200007374JBJ ; RDI 1995, 749, obs. MALINVAUD et BOUBLI ; Gaz. Pal. 1997, 105, obs. PEISSE ; RDI 1995, 549 et 555, obs. MALINVAUD.

Cass. 3e civ., 12 mars 1997, LawLex202200007322JBJ ; RDI 1997, 445, obs. MALINVAUD et BOUBLI.

Cass. 3e civ., 11 octobre 2000, LawLex202200007355JBJ ; Constr.-Urb. 2001, 5, obs. CORNILLE ; RDI 2001, 54, obs. BOUBLI et PERINET-MARQUET.

Cass. 3e civ., 20 mars 2002, LawLex202200007358JBJ ; Gaz. Pal. 2003, 1905, obs. PEISSE ; Constr.-Urb. 2002, 168, obs. SIZAIRE ; Defrénois 2002, 1023, obs. PERINET-MARQUET ; RDI 2002, 213, obs. BOUBLI et PERINET-MARQUET.

Cass. 3e civ., 9 janvier 2002, LawLex202200007405JBJ.

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