Contrats d'affaires

Selon l'article 1994, alinéa 1er, du Code civil, le mandataire répond de celui qu'il s'est substitué dans la gestion, d'une part, lorsqu' “il n'a pas reçu le pouvoir de se substituer quelqu'un” et, d'autre part, lorsque “ce pouvoir lui a été conféré sans désignation d'une personne”, et qu'il a fait le choix d'une personne “notoirement incapable ou insolvable”.
Si la jurisprudence admet facilement  …

Effets.

Selon l'article 1994, alinéa 1er, du Code civil, le mandataire répond de celui qu'il s'est substitué dans la gestion, d'une part, lorsqu' “il n'a pas reçu le pouvoir de se substituer quelqu'un” et, d'autre part, lorsque “ce pouvoir lui a été conféré sans désignation d'une personne”, et qu'il a fait le choix d'une personne “notoirement incapable ou insolvable”.

Si la jurisprudence admet facilement le principe de la substitution, même lorsque celle-ci n'a pas été expressément autorisée par le mandant, les juges en apprécient en revanche strictement les effets. Selon la Haute juridiction, le mandataire qui s'est substitué une société dans l'exécution des mandats confiés par le mandant, qu’il a informé, et qui ne s'y est pas opposé, est responsable de la gestion du sous-mandataire . En revanche, conformément aux dispositions de l'article 1994, alinéa 1er, l’obligation du mandataire de répondre de l’établissement, qu’il s’est substitué, envers son mandant, est sérieusement contestable, lorsque ce dernier a autorisé la substitution et désigné la personne du substitué . Ainsi, selon la jurisprudence, le transporteur, sous-mandataire, commet une faute qui engage la responsabilité du mandataire envers le mandant, lorsqu'il accepte et transmet une lettre de change du montant convenu de la marchandise, alors qu’en l’absence de stipulation contraire, le transport était soumis au contrat type messagerie, selon lequel le transporteur ne devait délivrer la marchandise qu’en contrepartie de la remise d’un chèque ou d’espèces . Selon la Cour de cassation, le mandataire qui s'est substitué un tiers pour l'exécution de sa  mission, même avec l'autorisation du mandant, reste tenu d'une obligation de surveillance à l'égard du mandataire substitué, pour la bonne exécution du mandat. Ainsi, une agence de voyages doit être déclarée entièrement responsable du dommage causé à des clients lors d'un transport à l'étranger effectué à  l'initiative d’un correspondant local, dès lors qu’en tant que  mandataire, elle a manqué à son obligation de veiller à ce que les  mesures prises par son mandataire substitué soient exécutées dans des conditions de sécurité suffisantes . La Haute juridiction estime par ailleurs que le mandataire ne peut reprocher au mandataire substitué d'avoir déféré à une instruction du mandant .

L'article 1994, alinéa 2, dispose par ailleurs : "Dans tous les cas, le mandant peut agir directement contre la personne que le mandataire s'est substituée . De ce texte, la jurisprudence a tiré plusieurs conséquences. 

D'abord, il résulte de l’article 1994 du Code civil que la substitution de mandataire sans autorisation du mandant a pour effet de rendre le  mandataire initial responsable du fait de celui qu'il s'est substitué, contre lequel le mandant peut agir directement, la responsabilité du mandataire substitué ne pouvant toutefois être engagée que si ce dernier a commis une faute. Dès lors, le mandataire substitué sans l'accord du mandant, qui a fidèlement exécuté les instructions du mandataire initial dont la responsabilité n'a pas été retenue, ne saurait engager sa responsabilité envers le mandant,  en l'absence de faute . En revanche, selon la Cour de cassation, engage sa responsabilité envers le mandant, conformément à l'article 1994, alinéa 2, le mandataire substitué qui ne s'est pas assuré que la personne à laquelle il remettait les fonds destinés au mandant présentait toutes garanties nécessaires . En application de ces dispositions, le mandant dispose d'une action directe à l'encontre du mandataire substitué, même si ce dernier a cru agir pour le compte du mandataire initial et non pour celui du mandant . Lorsque le mandant exerce l'action directe, la clause d'arbitrage international figurant au contrat de mandat, doit recevoir application à l'égard des mandataires substitués .

Ensuite, selon la jurisprudence, il incombe au mandant, en vertu de l'article 1994, alinéa 2, du Code de civil, de verser des commissions au mandataire substitué , de sorte que ce dernier jouit également d'une action personnelle et directe contre le mandant pour obtenir le remboursement de ses frais et avances, ainsi que le paiement de la rétribution qui lui est due , y compris en cas de chaîne de mandataires substitués . L'action directe du sous-mandataire peut être exercée dans tous les cas, que la substitution ait été, ou non, autorisée par le mandant . Aussi, le mandant ne peut-il opposer au mandataire substitué les paiements faits à son mandataire, même si ces paiements sont antérieurs à l'exercice par le mandataire substitué des droits propres qu'il tient de l'article 1994, alinéa 2, du Code civil . La négligence du sous-mandataire à réclamer le montant de ses avances et frais n'est pas non plus de nature à le priver de l'action directe qu'il est en droit d'exercer contre le mandant . En revanche, le mandant peut légitimement invoquer la faute commise par le mandataire substitué pour limiter le droit à remboursement de ce dernier . Toutefois, le mandataire substitué ne jouit d'une action directe contre le mandant en remboursement de ses avances que dans la mesure où l'action du mandataire n'est pas elle-même éteinte . Aussi, une cour d'appel ne peut-elle rejeter la demande du mandataire substitué visant au remboursement par le mandant des sommes acquittées pour son compte, au motif que le mandataire avait déjà reçu paiement de sa créance par la remise de lettres de change acceptées avant que le mandataire substitué n’agisse, sans rechercher si ce dernier, par la demande en paiement adressée au mandant, n'avait pas exercé, dès cette date, l'action directe dont il était titulaire  . La Haute juridiction a par ailleurs énoncé que lorsque le mandataire agit en son nom propre, le mandataire substitué ne saurait, de toute évidence, disposer d'une action directe contre le mandant .

L'avant projet de réforme du droit des contrats spéciaux  reprend les dispositions de l'article 1994 en codifiant l'action directe du mandataire substitué, qui “peut réclamer directement au mandant les sommes qui lui restent dues, à la condition que ce dernier ne se soit pas déjà acquitté entre les mains du mandataire”. 

Cass. com., 2 décembre 1997, LawLex202300012528JBJ, JCP E 1998, 1689, obs. STORCK ; RTD com. 1998, 666, obs. BOULOC.

Cass. com., 10 mai 2006, LawLex202300012518JBJ, RDC 2006, 1214, obs. VINEY ; D. 2007, 753, obs. MARTIN et SYNVET, censurant une cour d’appel ayant retenu que, malgré la faute commise par le mandataire substitué, qui a exécuté le virement litigieux sans s’inquiéter de la discordance d’identité existant entre le titulaire du compte crédité et le bénéficiaire désigné par le donneur d’ordre, le mandataire originaire doit répondre envers ses mandants de l’établissement qu’il s’est substitué, alors que ce dernier, également établissement teneur du compte où devaient être crédités les fonds  litigieux, est un intermédiaire obligé, au demeurant expressément visé dans l’ordre de virement du mandant, qui autorise non seulement la  substitution, mais désigne également la personne du substitué.

Cass. com., 28 juin 2002, LawLex200200004173JBJ, RTD com. 2003, 157, obs. BOULOC. - V. égal. Cass. 1re civ., 14 novembre 2013, LawLex202300012521JBJ, D. 2014, 169, obs. WICKERS ; JCP 2014, 13, obs. VILLACEQUE et LANDRY, retenant que l’avocat qui ne s’est pas borné à recommander un confrère auprès d'un  client, mais lui a confié une affaire à traiter en Belgique, est tenu,  conformément au Code professionnel applicable entre avocats des pays  membres de l'Union européenne, au paiement des honoraires et frais dus à  ce dernier, sauf stipulations contraires.

Cass. 1re civ., 27 décembre 1960, LawLex202300012680JBJ,RTD civ. 1961, 700, obs. CORNU ; D. 1961, 491, obs. BIGOT ; Cass. com., 8 juillet 1986, LawLex202300012542JBJ : en vertu de l'alinéa 2 de l'article 1994 du Code civil, le mandataire substitué dispose d'une action directe et personnelle contre le mandant  pour obtenir le remboursement des sommes qu'il a payées pour son compte ; 4 décembre 1990, LawLex202300012543JBJ ; Paris, 30 novembre 2017, LawLex202400008269JBJ.

Cass. 1re civ., 28 octobre 1986, LawLex202300012523JBJ, précisant que dès lors que le mandat de vente donné au mandataire initial était conforme aux dispositions de la loi Hoguet du 2 janvier 1970 et de son  décret d'application, la circonstance que les subdélégations consenties par celui-ci à des commerçants professionnels de l'immobilier, ainsi qu'entre ces commerçants, n'ont pas été établies dans les termes de ces textes est indifférente, de sorte que la chaîne des mandataires  substitués ayant été établie, le dernier sous-mandataire est recevable à agir en paiement directement à l’encontre du mandant, défaillant. 

Cass. com., 9 novembre 1987, LawLex202300012548JBJ ; 20 juin 1995, LawLex202300012228JBJ.

Cass. com., 9 novembre 1987, LawLex202300012548JBJ ; 19 mars 1991, LawLex202300012547JBJ, RTD civ. 1992, 414, obs. GAUTIER ; D. 1992, 81, obs. M. REMOND-GOUILLOUD ; RJ com. 1993. 339, obs. DAVIGNON ; 5 octobre 1993, LawLex202300012549JBJ, RTD com. 1994. 354, obs. BOULOC ; D. 1995, 169, obs. AUCKENTHALER, censurant une cour d'appel ayant rejeté la demande du mandataire substitué visant au remboursement par le mandant des sommes acquittées pour son  compte, au motif que le paiement de bonne foi par le débiteur au  créancier ou au représentant de celui-ci éteint l'obligation et libère  en conséquence son auteur, dès lors le mandant n'est pas fondé à opposer  au mandataire substitué les paiements faits par lui au mandataire, même  si ces paiements sont antérieurs à l'exercice par le mandataire  substitué des droits propres qu'il tient de l'article 1994, alinéa 2, du  Code civil.

Cass. com., 19 mars 1991, LawLex202300012547JBJ, RTD civ. 1992, 414, obs. GAUTIER ; D. 1992, 81, obs. M. REMOND-GOUILLOUD ; RJ com. 1993. 339, obs. DAVIGNON.

Cass. com., 25 juin 1991, LawLex202300012551JBJ, RTD com. 1992, 449, obs. BOULOC ; RTD civ. 1992, 414, obs. GAUTIER.

Cass. com., 3 décembre 2002, LawLex202300012544JBJ, D. 2003, 786, obs. MALLET-BRICOUT ; RTD com. 2003, 361, obs. BOULOC ; RTD com. 2003, 214, obs. DELEBECQUE ; RTD civ. 2003, 312, obs. GAUTIER ; Cass. 1re civ., 30 mai 2006, LawLex202300012545JBJ.

Cass. com., 13 février 2007, LawLex202300012546JBJ, D. 2007, 797, obs. DELPECH ; RTD com. 2007, 589, obs. BOULOC.

Cass. com., 28 mai 2002, LawLex202300012245JBJ, JCP E 2003, 1381, obs. BON-GARCIN ; RTD com. 2003, 160, obs. BOULOC.

Cass. com., 8 juillet 2003, LawLex202300012527JBJ, RTD com. 2004, 366, obs. BOULOC ; D. 2003, 2237, obs. CHEVRIER ; Contrats Conc. Consom. 2003, n° 154, obs. LEVENEUR.

Avant projet, art. 2002 : "Le mandataire peut, avec l’accord du mandant, se substituer un tiers dans l’exécution de sa mission. 

Il répond de celui qu’il s’est substitué. 

Dans tous les cas, le mandant peut agir directement contre le tiers que le mandataire s’est substitué. 

Réciproquement, le mandataire substitué peut réclamer directement au mandant les sommes qui lui 

restent dues, à la condition que ce dernier ne se soit pas déjà acquitté entre les mains du mandataire principal".

Cass. 1re civ., 29 mai 1980, LawLex202300012530JBJ ; 29 janvier 1991, LawLex202300012532JBJ, D. 1992, 435, obs. DIENER ; RTD com. 1991, 646, obs. BOULOC, retenant que l'organisateur d'un voyage à l'étranger qui fait appel à un transporteur local reste tenu d'une obligation de surveillance de son mandataire substitué et a notamment  l'obligation de veiller à ce que le transport soit exécuté dans des conditions de sécurité suffisantes, de sorte qu'il engage sa responsabilité en l'absence d'un représentant expérimenté dans le car accidenté, et dans la mesure où il est établi que le conducteur roulait à une vitesse excessive sur une route qu'il ne connaissait pas et qu'à l'approche d'un virage dangereux signalé par un panneau, il n'a pas freiné à temps, perdant ainsi la maîtrise de son véhicule.

Cass. 1re civ., 13 juin 2006, LawLex202300012540JBJ, relevant qu'un commissaire de justice n'engage pas sa responsabilité envers le mandataire intermédiaire, en l'occurrence l'épouse du mandant originaire, dont il a reçu le mandat de vendre des meubles appartenant à son mari, en procédant à la vente, après avoir été informé de la décision de cette dernière de révoquer le mandat, dès lors que le mari lui ayant donné instruction de poursuivre l'exécution du mandat reçu de son épouse, celle-ci ne pouvait pas imputer à faute au mandataire substitué d'avoir déféré à cette instruction, exclusive de  la révocation du mandat.

Cass. com., 8 avril 1976, LawLex202300012522JBJ, pour un contrat de dépôt, conclu entre un transitaire et une chambre de commerce qu'il s'est substituée pour exécuter son mandat, laquelle revêt la qualité de sous-mandataire envers l’importateur, de sorte que ce dernier est recevable à agir contre elle, par voie d'action directe, en vertu de l'article 1994, alinéa 2, du Code  civil.

Cass. 1re civ., 26 novembre 1981, LawLex202300012526JBJ.

Cass. 1re civ., 23 janvier 1996, LawLex202300012533JBJ, RTD com. 1996, 516, obs. BOULOC.

Cass. com., 14 octobre 1997, LawLex202300012541JBJ, D. 1998, 115, obs. REMERY ; RTD com. 1998, 407, obs. BOULOC ; D. 1998, 112, obs. DELEBECQUE, précisant que l'exercice par le mandant du droit d'agir directement à l'encontre du  mandataire substitué, qui lui est reconnu par l'article 1994, alinéa 2,  du Code civil, n'est pas subordonné à la connaissance par ce dernier de  l'existence du mandat originaire et de la substitution, c'est-à-dire au  fait qu'il ait su ou n'ait pu ignorer que son donneur d'ordre n'était  lui-même qu'un mandataire.

Cass., 1re civ., 8 février 2000, LawLex202300012534JBJ, Rev. crit. DIP 2000, 763, obs. COIPEL-CORDONNIER ; RJDA 2000, n° 494 ; RTD com. 2000, 596, obs. LOQUIN.

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