Le Droit européen des affaires, quatrième tome du Traité de droit économique, montre comment, simultanément, les autorités européennes suppriment les restrictions à l’accès et à l’exercice des activités économiques (libre circulation des marchandises, des personnes et des services, des capitaux) et édifient positivement le marché intérieur, soit en harmonisant les législations internes, soit en édictant de véritables règles unifiées.

Droit européen des affaires

Pour tenir compte des multiples modifications de la deuxième directive sociétés 77-91 , qui, pour garantir une équivalence dans la protection tant des actionnaires, en particulier minoritaires , que des créanciers de la société, fixait des exigences minimales relatives aux capitaux propres, aux distributions aux actionnaires, aux augmentations et réductions de capital, la Commission a procédé à sa refonte et a adopté la directive 2012-30 , qui a elle-même été reprise par la directive 2017-1132 . 

Sur le territoire de l'Union, les statuts ou l'acte constitutif d'une société anonyme doivent permettre à tout intéressé de connaître les caractéristiques essentielles de cette société, et notamment la consistance exacte de son capital. Ceux-ci doivent donc contenir des mentions obligatoires (art. 3 et 4) , leur publicité devant être réalisée selon les modalités prévues par la première directive. L'article 45 fixe le capital minimum d'une société anonyme à 25 000 euro , qui ne peut être constitué que d'éléments d'actif susceptibles d'évaluation économique (art. 46). Le capital souscrit en numéraire doit être libéré à hauteur de 25 % dès la constitution de la société tandis que les apports autres qu'en numéraire doivent être entièrement libérés dans un délai de cinq ans à compter de la constitution (art. 48). Par ailleurs, la directive, qui entend préserver le capital social, gage des créanciers, interdit notamment d'entamer celui-ci par des distributions aux actionnaires rendant l'actif net inférieur au montant du capital souscrit (art. 56 et 57) ou en limitant la possibilité pour une société d'acquérir ses propres actions (art. 59 et s.) . 

En cas de perte grave du capital souscrit, l'assemblée générale doit examiner s'il y a lieu de dissoudre la société ou d'adopter toute autre mesure, comme l'augmentation du capital (art. 58). Il appartient également à l'assemblée générale, aux termes de l'article 68 de la directive, de prendre la décision d'augmenter le capital. Une telle mesure ne peut être décidée par les pouvoirs publics, sans intervention de l'assemblée générale, même si elle a pour objet d'assurer la survie et la continuation de l'activité d'une entreprise se trouvant, du fait de son surendettement, dans une situation exceptionnelle . Un actionnaire peut, sans abus de droit, contester la décision, même s'il ne sert que ses intérêts aux dépens de la viabilité de l'entreprise . L'abus n'est caractérisé que si l'actionnaire a choisi, parmi les voies de recours disponibles, celle qui cause un préjudice tellement grave aux intérêts légitimes d'autrui qu'elle s'avère manifestement disproportionnée .

Lors de chaque augmentation du capital par apports en numéraire, un droit de souscription préférentiel bénéficie aux actionnaires, proportionnel à la partie du capital représentée par leurs actions (art. 72). Un tel droit peut être étendu, par les États membres, aux apports en nature . L'offre de souscription à titre préférentiel, ainsi que le délai dans lequel ce droit doit être exercé, doivent être publiés dans un bulletin national, sauf lorsque toutes les actions de la société sont nominatives, tous les actionnaires devant dans ce cas en être informés par écrit . Le droit préférentiel ne peut être limité ou supprimé que par décision de l'assemblée générale, sur rapport écrit de l'organe de direction ou d'administration indiquant les raisons de limiter ou de supprimer le droit préférentiel et justifiant le prix d'émission proposé (art. 72, paragr. 4).

Comme les augmentations, les réductions de capital relèvent du pouvoir de décision de l'assemblée générale (art. 34). Une telle décision ne doit cependant pas nuire aux intérêts des créanciers de la société (art. 75), à moins qu'elle n'ait pour objet de compenser des pertes subies ou d'incorporer des sommes dans une réserve. Le montant de cette réserve ne peut cependant dépasser 10 % du capital souscrit réduit (art. 76). En toute hypothèse, le capital souscrit ne peut être réduit à un montant inférieur au capital minimal fixé conformément à l'article 45 (art. 77).

Lorsque les sociétés sont autorisées à émettre des actions rachetables, le rachat est soumis à un certain nombre de conditions (art. 82). En particulier, les conditions de rachat doivent être précisées dans les statuts ou l'acte constitutif et le rachat ne peut concerner que des actions entièrement libérées. Le rachat, comme l'augmentation ou la réduction du capital, fait l'objet d'une publicité. 

Dir. 77-91 du 13 décembre 1976, tendant à coordonner pour les rendre équivalentes les garanties qui sont exigées dans les États membres des sociétés au sens de l'article 58 deuxième alinéa du traité, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital, JO L 26 du 31 janvier 1977, 1, transposée par la loi 81-1162 du 30 décembre 1981. V. art. L. 225-2 s. C. com.

V. CJCE, 15 octobre 2009, Audiolux c. Groupe Bruxelles Lambert et Bertelsmann AG, aff. C-101-08, LawLex200900003200JBJ, Rev. Sociétés, mars 2010, 45, note PARLÉANI, Europe 2009, nº 472, obs. IDOT, précisant toutefois qu'il n'existe pas de principe général du droit communautaire consacrant l'égalité entre les actionnaires.

CJCE, 19 novembre 1996, Siemens c. Nold, aff. C-42-95, LawLex200500008532JBJ, Europe, 1997, nº 16.

CJCE, 12 mars 1996, Pafitis c. Trapeza Kentrikis Ellados, aff. C-441-93, LawLex200500008534JBJ : la publication d'une offre de souscription à titre préférentiel dans un quotidien ne remplit pas cette condition.

Dir. 2012-30, 25 octobre 2012, tendant à coordonner, pour les rendre équivalentes, les garanties qui sont exigées dans les États membres des sociétés au sens de l'article 54, deuxième alinéa, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital, JO 14 novembre 2012, 74.

Dir. 2017-1132 du 14 juin 2017 relative à certain aspects du droit des sociétés, JO L 169 du 30 juin 2017.

Les status et actes constitutifs doivent contenir un nombre minimum d'informations concernant la société (forme et dénomination de la société, objet social, montant du capital social, durée de la société, etc.), ainsi que des informations soumises au principe de publicité obligatoire (siège social, valeur nominale des actions, nombre des actions, conditions particulières concernant la cession des actions, forme des actions, montant du capital souscrit, etc.).

Montant qui sera révisé, le cas échéant, tous les cinq ans par le Parlement et le Conseil sur proposition de la Commission, compte tenu, d'une part, de l'évolution économique et monétaire dans l'Union et, d'autre part, des tendances visant à réserver le choix des formes de sociétés figurant à l'annexe I aux grandes et moyennes entreprises.

Afin d'éviter les détournements de cette règle, la directive en étend l'application à toutes les sociétés de capitaux dans lesquelles la société dispose indirectement de la majorité des droits de vote ou sur laquelle elle peut exercer directement ou indirectement une influence dominante, même si cette autre société relève du droit d'un pays tiers à condition qu'elle ait une forme juridique comparable.

CJCE, 12 mars 1996, Pafitis c. Trapeza Kentrikis Ellados, aff. C-441-93, LawLex200500008534JBJ, Europe, 1996, nº 189, obs. LAGONDET ; Europe, 1996, nº 201 ; 12 mai 1998, Kefalas e.a. c. Grèce, aff. C-367-96, LawLex200500008531JBJ, Europe, 1998, nº 225, obs. LAGONDET ; JCP, 1998, I, 189, obs. BOUTARD-LABARDE ; RTD com., 1998, 1000, obs. LUBY ; Cah. dr. eur., 1999, 521, obs. KARAYANNIS ; 30 mai 1991, Karella c. Ypourgo Viomichanias Energeias kai Technologias, aff. C-19-90, LawLex200800001298JBJ : le fait que l'entreprise en cause présente une importance particulière d'un point de vue économique et social pour la collectivité est indifférent ; 24 mars 1992, Syndesmos Melon tis Eleftheras Evangelikis Ekklisias c. Grèce, aff. C-381-89, LawLex200800001335JBJ ; 12 novembre 1992, Kerafina-Keramische-und Finanz Holding c. République hellénique, aff. C-134-91, LawLex200800001336JBJ.

CJCE, 12 mai 1998, Kefalas e.a. c. Grèce, aff. C-367-96, LawLex200500008531JBJ : même si l'actionnaire n'a pas fait usage de son droit préférentiel sur les nouvelles actions émises à cette occasion.

CJCE, 23 mars 2000, Diamantis c. Grèce, aff. C-373-97, LawLex200500008621JBJ, Europe, 2000, nº 141, obs. IDOT ; RTD com., 2000, 777, obs. LUBY.

Pouvoir d'appréciation souverain de l'assemblée générale.

V. DENECKER, La deuxième directive du Conseil des Communautés européennes relative à la constitution de la société anonyme, au maintien et aux modifications de son capital, Rev. Sociétés 1977, 661 ; CORDOLIANI, La deuxième directive sur les sociétés du 13 décembre 1976, JCP CI, 1978, II, 12649 ; POULLE et SPITZ, Les modifications de la deuxième directive concernant le capital social des sociétés anonymes et le droit français, LPA, 31 mai 2007, 3.

200. Pouvoir d'appréciation souverain de l'assemblée générale.