Le Droit européen des affaires, quatrième tome du Traité de droit économique, montre comment, simultanément, les autorités européennes suppriment les restrictions à l’accès et à l’exercice des activités économiques (libre circulation des marchandises, des personnes et des services, des capitaux) et édifient positivement le marché intérieur, soit en harmonisant les législations internes, soit en édictant de véritables règles unifiées.

Droit européen des affaires

L'enregistrement d'une marque a pour objet de conférer à son titulaire un droit exclusif. Avant même l'adoption d'un texte spécifique, la Cour de justice a précisé que le droit de marque a pour objet spécifique “notamment d'assurer au titulaire le droit exclusif d'utiliser la marque, pour la première mise en circulation d'un produit, et de le protéger ainsi contre les concurrents qui voudraient abuser de la position et de la réputation de la marque en vendant des produits indûment pourvus de cette marque” . La directive 2008-95 et l'accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC ) avaient à leur tour entériné le droit exclusif du titulaire de la marque d'empêcher l'utilisation du signe par un tiers, mais réservaient son exercice au cas où cet usage porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque et notamment à sa fonction essentielle qui est de garantir aux consommateurs la provenance du produit . La directive 2015-2436 consacre désormais ce droit exclusif dans les mêmes conditions à son article 10, paragraphe 1.

Le droit de marque est soumis aux principes de spécialité et de territorialité. Conformément au principe de spécialité, le droit de propriété sur la marque ne vaut que pour les produits ou services désignés. Il ne protège pas le signe en lui-même, mais la relation d'identification que celui-ci entretient avec certains produits ou services particuliers. Conformément au principe de territorialité, la condition de première mise en circulation justifie que le titulaire ne puisse pas s'opposer au transit externe d'un produit par un tiers, celui-ci n'impliquant aucune commercialisation des marchandises dans l'EEE .

Du droit exclusif d'utiliser la marque découle le droit d'interdire à un tiers son usage, dont l'étendue varie selon que les signes et produits ou services utilisés sont identiques, similaires ou non similaires  (Dir. 2015-2436, art. 10, paragr. 2, a à c)).

CJCE, 23 mai 1978, Hoffmann-La Roche c. Centrafarm Vertriebsgesellschaft Pharmazeutischer Erzeugnisse, aff. 102-77, LawLex200300003149JBJ, Cah. dr. eur., 1979, 75, obs. ALEXANDER ; JDI, 1979, 903, obs. KOVAR ; CMLR, 1979, 251, obs. VAN EMPEL ; Cah. dr. eur., 1979, 75, obs. ALEXANDER ; ELR, 1979, 379, obs. HARRIS ; 17 octobre 1990, CNL-SUCAL c. HAG GF, aff. C-10-89, LawLex200300004017JBJ, Journ. trib., 1991, 405, obs. DE VISSCHER ; JDI, 1991, 490, obs. HERMITTE ; RTD eur., 1991, 169, obs. JOLIET ; Cah. dr. eur., 1991, 473, obs. van der ERSCH ; RTD eur., 1991, 87, obs. BONET ; Gaz. Pal., 1992, 3, Doct., 222, obs. DEMAZIERES de SECHELLES ; JCP E, 1992, 2, 109, obs. VOGEL ; 22 juin 1994, IHT Internationale Heiztechnik c. Ideal-Standard, aff. C-9-93, LawLex200300003099JBJ, Contrats Conc. Consom., 1994, n° 8, obs. VOGEL ; Europe, 1994, nº 340, obs. MARIATTE ; LPA, 1995, nº 18, 12, note MICHEL et WASCHMANN ; JCP G, 1995, I, 3831, obs. BOUTARD-LABARDE ; RTD eur., 1995, 848, obs. BONET.

accord approuvé dans le cadre des négociations multilatérales du cycle de l'Uruguay, par la décision 94-800-CE du Conseil (JO L 336 du 23 décembre 1994, 1), conclu dans le cadre de l'OMC et figurant en annexe à l'accord OMC.

CJCE, 12 novembre 2002, Arsenal Football Club c. Matthew Reed, aff. C-206-01, LawLex200500008321JBJ ; 16 novembre 2004, Anheuser-Busch c. Budejovický Budvar, národní podnik., aff. C-245-02, LawLex200500004708JBJ, Europe, 2005, Comm. nº 26, obs. MARIATTE. V. égal. CJUE, 23 mars 2010, Google France c. Louis Vuitton et a., aff. C-236-08, LawLex201000000348JBJ, qui précise que, dans le domaine du commerce électronique, cette fonction essentielle consiste, entre autres, à permettre aux internautes parcourant les annonces affichées en réponse à une recherche au sujet d'une marque précise, de distinguer les produits ou les services du titulaire de cette marque de ceux qui ont une autre provenance ; 22 septembre 2011, Interflora Inc., aff. C-323-09, LawLex201100001476JBJ, interdiction à un concurrent de faire de la publicité pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, par la sélection dans le cadre d'un service de référencement sur Internet d'un mot-clé identique à cette marque sans le consentement de son titulaire, lorsque cet usage porte atteinte à la fonction d'indication d'origine de la marque en ne permettant pas à l'internaute normalement informé et raisonnablement attentif de savoir si l'annonceur appartient ou non au réseau.

CJCE, 9 novembre 2006, Montex c. Diesel, aff. C-281-05, LawLex200700000090JBJ, Rev. Lamy dr. immat., 2007-32, nº 1057, obs. ARNAUD ; V. égal. CJCE, 18 octobre 2005, Class International, aff. C-405-03, LawLex200600002341JBJ, Europe, 2005, nº 407, obs. MARIATTE, qui considère que tant que l'importateur de marchandises de pays tiers n'a pas préféré l'option de la mise en libre pratique aux autres régimes douaniers du transit externe ou de l'entrepôt douanier, la seule introduction matérielle de ces dernières sur le territoire de l'Union européenne ne vaut pas première mise dans le commerce sur ce territoire de nature à épuiser les droits du titulaire de la marque. V. aussi en matière de libre circulation des marchandises nº 4 sur le transit externe et interne.

La directive 2008-95 visait le droit d'interdire à un tiers l'usage d'un signe identique pour des produits ou services identiques, similaires ou non comparables à ceux pour lesquels la marque est enregistrée (art. 5, paragr. 1 et 2). 

Objet spécifique et fonction essentielle.

V. BOUCHE, L'objet spécifique du droit des marques, D., 2000, chron., 13.

244. Objet spécifique et fonction essentielle.