Le Droit européen des affaires, quatrième tome du Traité de droit économique, montre comment, simultanément, les autorités européennes suppriment les restrictions à l’accès et à l’exercice des activités économiques (libre circulation des marchandises, des personnes et des services, des capitaux) et édifient positivement le marché intérieur, soit en harmonisant les législations internes, soit en édictant de véritables règles unifiées.

Droit européen des affaires

Selon la Commission, la commande publique dans l'Union européenne  a représenté près de 20 % du PIB de l'Union en 2012 ou encore 1 000 milliards d'euro par an . Le Traité ne contient aucune disposition visant explicitement les marchés publics. La passation des marchés publics obéit aux principes généraux du Traité notamment les principes de la libre circulation des marchandises, de la liberté d'ét …

Contexte.

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Selon la Commission, la commande publique dans l'Union européenne  a représenté près de 20 % du PIB de l'Union en 2012 ou encore 1 000 milliards d'euro par an . Le Traité ne contient aucune disposition visant explicitement les marchés publics. La passation des marchés publics obéit aux principes généraux du Traité notamment les principes de la libre circulation des marchandises, de la liberté d'établissement et de la libre prestation de services, ainsi que ceux qui en découlent, comme l'égalité de traitement, la non-discrimination, la reconnaissance mutuelle, la proportionnalité et la transparence. La disparité des législations nationales et l'absence d'obligation de mise en concurrence européenne des marchés publics ont cependant favorisé les comportements protectionnistes et, de fait, une très forte tendance à privilégier les fournisseurs ou prestataires nationaux. Aussi les autorités européennes ont-elles jugé indispensable d'élaborer des textes de coordination des procédures nationales de passation pour les marchés publics dépassant un certain montant. 

Une première vague de directives a été adoptée entre 1971 et 1976, afin de lutter contre ces pratiques. La directive 71-305 du 26 juillet 1971 portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux  et la directive 77-62 du 21 décembre 1976 portant coordination des procédures de passation des marchés publics de fournitures  se sont donné pour objectif d'assurer, par l'instauration de conditions égales de participation à ces marchés dans tous les États membres, une transparence permettant de mieux veiller au respect de l'interdiction des discriminations édictée par le Traité. Pour ce faire, ces textes ont imposé aux pouvoirs adjudicateurs une obligation de publicité dans l'ensemble de l'Union pour les marchés dépassant certains seuils, une interdiction des spécifications techniques susceptibles de revêtir un caractère discriminatoire, ainsi que l'obligation d'appliquer des critères objectifs de participation et de sélection des candidats. Elles n'ont cependant pas permis d'atteindre les résultats escomptés en termes d'ouverture du marché : elles se sont heurtées à un profond manque de volontarisme de la part des États membres, qui ont largement ignoré les obligations de publicité ou procédé à des fractionnements artificiels des marchés afin de ne pas atteindre les seuils fixés.

Une deuxième vague de directives, entre 1988 et 1992, a traduit la volonté de l'Union de remédier à ces carences et de promouvoir une ouverture réelle des marchés à la concurrence. Les directives 88-295 du 22 mars 1988 , modifiant la directive 77-62 en matière de marchés de fournitures, et 89-440 du 18 juillet 1989 , modifiant la directive 71-305 en matière de marchés de travaux, ont ainsi amélioré l'information des candidats, limité les possibilités de recours aux procédures restreintes ou négociées, et accru les sanctions en imposant aux États membres d'aménager des procédures juridictionnelles afin de garantir l'existence de recours rapides et efficaces. Une directive 90-531 du 17 septembre 1990 , relative aux procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications, dite directive “réseaux”, est intervenue pour réglementer, pour la première fois, des secteurs jusqu'alors soustraits à toute concurrence. La directive services 92-50 du 18 juin 1992  a parachevé la régulation des marchés publics. Enfin, pour assurer l'efficacité du dispositif, deux directives ont donné la possibilité de contester la procédure de passation ou la décision d'attribution devant le juge national : la directive générale recours 89-665 du 21 décembre 1989  et la directive recours secteurs spéciaux 92-13 du 25 février 1992 .

De nombreuses modifications ayant été apportées à ces dispositions, il a été nécessaire de les codifier par trois directives adoptées le 14 juin 1993 : la directive fournitures 93-36 , la directive travaux 93-37  et la directive secteurs spéciaux 93-38 . Ces directives, pas plus que les précédentes, n'ont permis d'atteindre les buts fixés par le législateur européen. Conformément aux conclusions de son Livre vert sur les marchés publics dans l'Union européenne de 1996 , la Commission s'est engagée dans un processus de refonte des directives qui a abouti, le 31 mars 2004, à l'adoption de la directive 2004-18 qui a fusionné en les modifiant les directives travaux, fournitures et services , et de la directive 2004-17 sur les secteurs spéciaux . Ces deux instruments  ont simplifié et dépoussiéré le droit européen en la matière, en tenant compte des solutions dégagées par la jurisprudence européenne. Ils ont été abrogés et remplacés respectivement par les directives 2014-24 et 2014-25 du 26 février 2014 , complétées par la directive 2014-23 qui régit pour la première fois au niveau européen les concessions de services et de travaux. Ce paquet “commande publique”, destiné à moderniser les marchés publics dans les secteurs classiques et les secteurs spéciaux, est entré en vigueur le 17 avril 2014. Les États membres ont disposé de vingt-quatre mois pour transposer ces dispositions dans leur législation nationale. Ces nouvelles directives s'inscrivent dans un plan général de l'Union, exposé dans la communication du 3 mars 2010 qui fait des marchés publics l’un des instruments de marché à utiliser pour parvenir à une “croissance intelligente, durable et inclusive” tout en garantissant une utilisation optimale des fonds publics. 

Comme les directives de fond, les directives recours ont fait l'objet d'un toilettage afin d'améliorer l'efficacité des procédures nationales de recours. La directive 2007-66 du 11 décembre 2007  a ainsi modifié les directives 89-665 et 92-13 en instituant, notamment, un délai de suspension avant la conclusion du marché et la sanction de la privation des effets d'un contrat passé irrégulièrement.

La Commission inclut dans la commande publique les commandes de fournitures, de services et de travaux par le secteur public.

Source : http://ec.europa.eu-internal_market-publicprocurement-index_fr.htm

Dir. 2004-18 du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services, JO L 134 du 30 avril 2004, 114. Ce texte se substitue aux directives spécifiques 92-50 du Conseil du 18 juin 1992 portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services, JO L 209 du 24 juillet 1992, 1 ; 93-36 du Conseil du 14 juin 1993 portant coordination des procédures de passation des marchés publics de fournitures, JO L 199 du 9 août 1993, 1 ; et 93-37-CEE du Conseil du 14 juin 1993 portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, JO L 199 du 9 août 1993, 54.

Des règles similaires, dans le détail desquelles nous n'entrerons pas, existent pour les marchés passés par les institutions européennes : Règl. 966-2012 du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l'Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) 1605/2002 du Conseil, JO L 298 du 26 octobre 2012, 1.

Le paquet commande publique de 2014 poursuit, comme les directives de 2004, un objectif de modernisation des règles afin de simplifier l'achat public, de favoriser l'accès des PME à la commande publique et de mettre en avant l'achat “vert et innovant”. La réunion au sein d'un même texte des directives travaux, fournitures et services participe de cet objectif. La structure du texte suit l'ordre logique d'une procédure de passation de marché afin de guider les utilisateurs. 

La directive 2014-24 va plus loin que la directive 2004-18 dans la prise en considération des évolutions économiques et technologiques de la société en soulignant que les moyens électroniques d’information et de communication doivent devenir les moyens de communication et d’échange d’informations usuels dans les procédures de passation de marchés, car leur usage accroît la possibilité pour les opérateurs économiques de prendre part à des procédures de passation de marché dans l’ensemble du marché intérieur. Deviennent ainsi obligatoires “la transmission des avis et la mise à disposition des documents de marché par voie électronique et, à l’issue d’une période transitoire de trente mois, la communication totalement électronique, c’est-à-dire la communication par des moyens électroniques à tous les stades de la procédure, notamment la transmission des demandes de participation, et en particulier la transmission des offres (soumission électronique)” (Dir. 2014-24, cons. 52). Pour faciliter l'accès des PME aux marchés publics, la directive encourage les pouvoirs adjudicateurs à recourir au code des bonnes pratiques présenté dans le document de travail de la Commission du 25 juin 2008 intitulé “Code européen des bonnes pratiques facilitant l’accès des PME aux marchés publics”, qui fournit des orientations sur la manière dont ils peuvent appliquer le cadre régissant les marchés publics. Les nouveaux objectifs de l'Union ne sont pas négligés puisque, selon le considérant 91, la directive 2014-24 précise “comment les pouvoirs adjudicateurs peuvent contribuer à la protection de l’environnement et à la promotion du développement durable tout en garantissant la possibilité d’obtenir pour leurs marchés le meilleur rapport qualité/prix”, notamment par l'obtention d'un écolabel pluri-national. Enfin, afin de défendre les intérêts des entreprises européennes qui postulent à des marchés publics dans des pays tiers, les autorités de l'Union se sont dotées d'un nouvel outil. Le règlement 2022/1031 intitulé “instrument relatif aux marchés publics internationaux” (IMPI)  doit permettre de garantir un accès et des conditions de concurrence équitables lors de la participation à des marchés publics organisés par des pays tiers. La Commission est en particulier habilitée à infliger des pénalités ou une note réduite sur l'offre en cause lorsqu'elle constate que le pays tiers fait obstacle à l'accès des entreprises de l'Union .

Règl. 2022/1031 du 23 juin 2022, JOUE L 173 du 23 juin 2022.

MORALES, Publication de l'instrument relatif aux marchés publics internationaux : un outil offensif au service de la réciprocité, Europe 2023, 1.

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