Le droit européen et français applicable aux réseaux de distribution.
Le Droit de la distribution, deuxième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : approvisionnement et fourniture exclusifs, distribution exclusive, distribution sélective, distribution automobile.

Droit français de la distribution

En droit français, l'article L. 330-1 du Code de commerce limite à dix ans la durée de validité “de toute clause d'exclusivité par laquelle l'acheteur, cessionnaire ou locataire de biens meubles s'engage vis-à-vis de son vendeur, cédant ou bailleur, à ne pas faire usage d'objets semblables ou complémentaires en provenance d'un autre fournisseur”. La jurisprudence adopte une interprétation extensiv …

Durée de l'exclusivité.

LAMBERT, La durée de l'exclusivité d'approvisionnement, JCP E, 2017, n° 1017.

En droit français, l'article L. 330-1 du Code de commerce limite à dix ans la durée de validité “de toute clause d'exclusivité par laquelle l'acheteur, cessionnaire ou locataire de biens meubles s'engage vis-à-vis de son vendeur, cédant ou bailleur, à ne pas faire usage d'objets semblables ou complémentaires en provenance d'un autre fournisseur”. La jurisprudence adopte une interprétation extensive de ce texte. Son champ d'application est en principe limité aux biens meubles. Toutefois, la Cour de cassation l'a étendu à la clause insérée dans un contrat de bail d'un local destiné à l'exploitation d'un débit de boissons pour une durée de neuf années renouvelable . En revanche, le texte n'est pas applicable au locataire d'un fonds de commerce  ni ne peut être invoqué par le bailleur d'un fonds de commerce, étranger à l'engagement de fourniture exclusive passé entre le locataire du fonds et son sous-locataire exploitant ce fonds . Un contrat de mise à disposition d'enseigne, certes complémentaire d'un contrat distinct d'approvisionnement exclusif, n'est pas non plus soumis à la limitation de durée de l'article L. 330-1 en l'absence de stipulation d'une quelconque exclusivité . Enfin, un contrat à durée indéterminée, même s'il s'est exécuté pendant plus de dix ans, ne relève pas de l'article L. 330-1 dès lors qu'il est résiliable à tout moment . Par ailleurs, la clause pénale qui sanctionne le défaut d'exécution des engagements d'approvisionnement minimum ne peut avoir pour effet de proroger au-delà de dix ans la durée de l'exclusivité .

Un contrat d'approvisionnement exclusif ne peut, par le jeu de renouvellements successifs, produire effet au-delà de la durée autorisée par l'article L. 330-1 . Cependant, le délai de dix ans n'est pas dépassé lorsqu'un contrat comportant une clause d'exclusivité succède à un autre, dès lors qu'il n'en constitue pas la simple prorogation, mais résulte d'une réelle renégociation de ses termes . Le contrat prévoyant une exclusivité sans limitation de durée ne produit plus d'effets après dix années . Aussi, la clause d'exclusivité dont la durée est de quinze ans n'est-elle valable que jusqu'au terme de dix ans . Au-delà, elle est entachée de nullité absolue . Les juges du fond avaient estimé que seules les clauses d'approvisionnement exclusif prévoyant une durée excessive sont caduques, à l'exclusion des accords qui les contiennent . La Cour de cassation a au contraire considéré que la caducité, au-delà de dix ans, d'une clause d'approvisionnement exclusif d'une durée de trente-cinq ans stipulée dans un contrat de distribution lié de manière indissociable à un contrat de sous-licence de marque doit être étendue à l'ensemble contractuel . Sont également condamnés les montages contractuels par lesquels les parties conviennent que la société franchisée aura une durée de vie de quatre-vingt-dix-neuf ans, que son objet social interdit le changement d'enseigne, et que le franchisé est tenu par une quasi-exclusivité d'approvisionnement . Les accords conclus ultérieurement entre les parties et ayant le même objet expirent à la même date dès lors qu'ils interviennent avant l'échéance du premier contrat .

La Cour de cassation a précisé les champs d'application respectifs des règles françaises et européennes quant à la durée de l'exclusivité. Selon elle, le règlement d'exemption européen, qui limitait à cinq ans la durée des contrats de bière, est inapplicable à un accord auquel ne participent que des entreprises d'un même État membre et qui concerne la revente de produits à l'intérieur de celui-ci, du fait de l'absence d'affectation du commerce entre États membres . De même, un contrat d'approvisionnement exclusif n'affecte pas le commerce entre États membres dès lors qu'il n'interdit pas au distributeur de s'approvisionner, directement ou indirectement, dans d'autres États membres . N'affecte pas davantage le commerce entre Etats membres l'accord d'approvisionnement exclusif conclu entre deux PME qui ne prévoit que la réalisation d'un chiffre d'affaires total de 700 000 euro . En conséquence, un accord qui s'échelonne sur six années, contrairement aux exigences européennes dans le cadre de l'exemption par catégorie, n'est pas nécessairement prohibé. Sa nullité ne pourra être prononcée, le cas échéant, que s'il est établi qu'il a pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence dans le marché intérieur . 

Enfin, la question s'est posée de l'application à un contrat d'approvisionnement exclusif couplé à un contrat d'enseigne de l'article L. 341-1 du Code de commerce, qui institue, lorsque plusieurs contrats sont conclus entre deux parties pour l'exploitation d'un commerce de détail, une indivisibilité du sort des contrats en cas de résiliation de l'un d'eux. Selon la Cour d'appel de Poitiers, cette disposition ne s'applique pas lorsque l'eexploitant a signé les contrats en cause avec deux sociétés distinctes, quoiqu'appartenant au même groupe de distribution .

Cass. com., 14 décembre 1999, LawLex200200005263JBJ., Contrats Conc. Consom., 2000, n° 46, obs. POILLOT-PERUZZETTO ; D., 2000, AJ, 79 ; RJDA, 2000, n° 143.

Metz, 21 janvier 1997, LawLex200200005628JBJ.

Cass. com., 7 avril 1992, LawLex200200005907JBJ.

Paris, 20 septembre 1990, LawLex200200005795JBJ, JCP E, 1992, II, 245, obs. SCHODERMEIER ; D., 1991, jur., 165, obs. MALAURIE ; Douai, 11 décembre 1997, LawLex200200005077JBJ ; Cass. 3e civ., 31 janvier 2001, LawLex200200004373JBJ, D., 2001, 3520, obs. ROZÈS ; RJDA, 2001, nº 428, qui précise que la nullité n'atteint pas le bail qui contient la clause nulle sauf si les parties la considèrent comme essentielle.

Cass. com., 15 janvier 2013, LawLex201300000061JBJ, Concurrences, 2/2013, 84, obs. ÉRÉSÉO ; RJDA, 2013, n° 399.

T. com. Rennes, 13 octobre 2009, LawLex201000000827JBJ. - V., dans le même sens, Cass. com., 26 avril 2017, LawLex201700000814JBJ, LEDICO juillet 2017, 7, obs. MAINGUY, retenant que les statuts d'une société franchisée qui lui confèrent, pour une durée de 99 ans, l'exploitation d'une surface commerciale de distribution sous l'enseigne du franchiseur, qui prévoient que le président de la société ou son conjoint doit être détenteur du droit d'usage de cette enseigne et qui ne peuvent être modifiés qu'à l'unanimité peuvent avoir pour objet ou pour effet de porter atteinte aux articles L. 420-1 et L. 420-3 du Code de commerce et aux principes de la liberté contractuelle et de la liberté de la concurrence.

Paris, 22 février 2011, LawLex201100000461JBJ ; 25 novembre 2020, LawLex202000003333JBJ.

Cass. com., 4 juin 1996, LawLex200200003793JBJ.

Montpellier, 7 novembre 1996, LawLex200200003779JBJ.

Paris, 17 mai 2018, LawLex201800000773JBJ, retenant que même conclu pour une durée de sept ans, l'accord ne peut être annulé sur le fondement de l'article 101 TFUE dès lors qu'il n'affecte pas le commerce entre Etats membres et n'entraîne pas de restriction sensible de la concurrence.

Cass. com., 11 février 2003, LawLex200300000827JBJ.

Poitiers, 7 mai 2019, LawLex202000000355JBJ.

Cass. com., 21 décembre 1981, LawLex200400000470JBJ.

Lyon, 20 mars 2014, LawLex201400001814JBJ.

Montpellier, 23 octobre 2018, LawLex201800001639JBJ.

Cass. com., 10 décembre 1991, LawLex200200005880JBJ.

Cass. com., 20 septembre 2005, LawLex200500009648JBJ.

Paris, 2 septembre 2010, LawLex201000001021JBJ.

Cass. com., 11 mars 1981, LawLex200400000473JBJ ; Cass. com., 21 février 1995, LawLex200200005450JBJ ; Douai, 24 janvier 2013, LawLex201300000154JBJ, Concurrences, 2/2013, 86, obs. MARTIN.

Cass. com., 10 février 1998, LawLex200200005103JBJ ; Paris, 2 septembre 2010, LawLex201000001021JBJ.

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