Le droit européen et français applicable aux réseaux de distribution.
Le Droit de la distribution, deuxième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : approvisionnement et fourniture exclusifs, distribution exclusive, distribution sélective, distribution automobile.

Droit français de la distribution

La protection de la marque peut s'exercer soit par le jeu de l'action en contrefaçon, soit par celui de l'action en concurrence déloyale, lorsque son utilisation crée une confusion dans l'esprit du consommateur.

L'article L. 716-9 du Code de la propriété intellectuelle sanctionne pénalement la contrefaçon qui résulte de l'usage sans autorisation de la marque. Il a ainsi été jugé que l'utilisation sans autorisation d'une marque par un opérateur qui n'est ni agent ni distributeur du constructeur constitue une contrefaçon et caractérise un trouble manifestement illicite . Il en est de même de la reproduction du blason d'un constructeur en fond d'écran du site internet d'un tiers au réseau qui n'est attachée ni à une offre de vente ni à une information en rapport avec des véhicules vendus , ou de l'utilisation du terme “spécialiste” suivi de la marque à titre de nom de domaine sans référence au nom du revendeur . 

Toutefois, la règle de l'épuisement du droit de marque consacrée à l'article L. 713-4 permet à un tiers hors réseau qui utilise la marque d'un concédant pour commercialiser ses produits d'échapper à tout grief de contrefaçon, s'il démontre que ce dernier a consenti à leur mise sur le marché européen. Aussi, le droit de marque du fabricant est-il épuisé lorsque les produits argués de  contrefaçon ont été acquis par le tiers au réseau de distribution exclusive auprès de sous-licenciés . Cependant, la production de factures qui ne sont pas contemporaines des faits ne permet pas au revendeur d'apporter la preuve qu'il s'est approvisionné auprès d'un distributeur agréé situé dans l'Espace économique européen . De même, la commercialisation par un tiers hors réseau de produits authentiques qui proviennent d'un fournisseur australien est constitutive de contrefaçon, dès lors qu'aucun revendeur officiel établi dans l'Espace économique européen n'est intervenu dans la chaîne des ventes . 

La charge de la preuve du défaut de consentement à la commercialisation des produits au sein de l'EEE est renversée lorsque le tiers parvient à démontrer que le fabricant s'oppose aux exportations parallèles et que le fait de lui faire supporter le fardeau de la preuve ferait naître un risque réel de cloisonnement des marchés nationaux . Tel est le cas lorsque l'importateur non agréé établit que, dans les faits, les ventes passives sont interdites à l'intérieur du réseau  ou qu'il s'est vu opposer des refus de vente après avoir révélé ses sources d'approvisionnement . En revanche, le seul fait d'établir que les importations parallèles seraient profitables, en raison de la différence des prix pratiqués entre Etats membres  ou que le titulaire du droit de marque exerce un nombre important d'actions en contrefaçon  ou surveille étroitement les prix de revente de ses produits , ne suffit pas à démontrer que ce dernier participe au cloisonnement du marché. Les juridictions s'opposent sur la fraîcheur des preuves à apporter pour établir l'existence d'un risque de cloisonnement : pour certaines, le tiers revendeur doit se fonder sur des éléments relatifs à une période suffisamment proche, sinon contemporaine, de la commercialisation des marchandises retenues en douane et non sur des faits et décisions de justice datant de plus cinq ans  ; d'autres estiment que des éléments même anciens peuvent revêtir un caractère suffisamment probant si le fournisseur n'établit pas avoir changé ses pratiques depuis lors . La Cour de cassation a consacré cette dernière solution .

Lorsque le distributeur est parvenu à démontrer un risque de cloisonnement du marché, le fournisseur se voit contraint de démontrer que celui-ci ne s'est pas matérialisé dans les faits. L'existence de rétrocessions entre membres du réseau et détaillants situés sur d'autres territoires, lorsque leur nombre indique qu'elles ne constituent pas de simples ventes d'ajustement ou d'appoint, exclut la possibilité d'invoquer un risque de cloisonnement . A l'inverse, si ces ventes sont en nombre trop réduit, ou ne portent pas principalement sur les produits objet du litige, le cloisonnement est avéré . Le refus de produire ses contrats, afin d'établir l'absence de clause d'interdiction des ventes passives, va également dans le sens de l'existence d'un cloisonnement .

Lorsque le tiers hors réseau ne parvient pas à établir l'existence d'un risque de cloisonnement des marchés, il lui revient de démontrer que chaque exemplaire des produits argués de contrefaçon a été mis dans le commerce dans l'Espace économique européen par le titulaire de la marque ou avec son consentement . Par ailleurs, la règle de l'épuisement des droits ne s'applique que si les produits commercialisés par le tiers revendeur sont authentiques. La preuve du défaut d'authenticité des produits écoulés établit en effet à elle seule l'absence de consentement du titulaire des marques à leur commercialisation dans l'Espace économique européen . La jurisprudence se montre sur ce point très exigeante envers les fournisseurs car elle semble subordonner la preuve du défaut d'authenticité à la mise en place de procédures strictes de contrôle qualité clairement définies “portant sur les caractéristiques précises et invariables de points de vérification objectifs des produits qui sortent [des] usines de fabrication” .

L'utilisation de la marque peut être source de concurrence déloyale. Ainsi, un revendeur ne peut utiliser à titre d'enseigne la marque d'un concurrent afin de créer dans l'esprit du public une confusion sur sa qualité de distributeur exclusif . Egalement, un distributeur exclusif, même dénué de droit privatif sur la marque, peut agir en concurrence déloyale contre l'importateur de produits contrefaisants, lorsque ceux-ci sont de nature à créer une confusion sur l'origine des produits vendus . La recherche de confusion peut également être le fait d'un ancien distributeur. L'ancien distributeur ne peut, sans se rendre coupable de concurrence déloyale, entretenir de confusion dans l'esprit de la clientèle sur son maintien dans le réseau , notamment en adoptant un logo similaire au logo officiel , en continuant d'utiliser le logo du concédant , ses panneaux publicitaires  ou sa marque en se présentant comme agent agréé , ou en maintenant et en refusant de déposer les signes distinctifs de l'appartenance au réseau . En revanche, l'utilisation par un ancien distributeur devenu garagiste de la mention “spécialiste” ne constitue une faute que si l'entreprise ne peut apporter la preuve de la réalité de sa qualification ou si elle crée une confusion avec les membres du réseau .

L'utilisation de la marque sans autorisation n'est pas uniquement source de confusion préjudiciable mais peut aussi caractériser un acte de parasitisme qui permet au parasite de profiter de sa notoriété et de bénéficier, sans bourse délier, des retombées commerciales de celle-ci. Le maintien du référencement d'un ancien distributeur en qualité de revendeur de véhicules neufs sur un moteur de recherche internet  ou l'utilisation de la marque par un ancien agent  caractérisent une usurpation de la notoriété de la marque. Celle-ci peut également emprunter des voies détournées ; tel est le cas lorsque le distributeur prétend détenir toutes les pièces de rechange de la marque .

TGI Lyon, 3 octobre 2001, LawLex200200004745JBJ. 

TGI Paris, 20 décembre 2002, LawLex200300000837JBJ, confirmé par Paris, 8 septembre 2004, LawLex200400003335JBJ. 

TGI Paris, 8 avril 2016, LawLex201600000844JBJ.

Paris, 19 février 2021, LawLex202100000568JBJ, LD mars 2021, 7, obs. BONNET-DESPLAN.

TGI Paris, 8 avril 2016, LawLex201600000844JBJ, approuvé par Paris, 23 janvier 2018, LawLex201800000183JBJ, LD février 2018, 5, obs. LOUVET.

Paris, 3 février 2017, LawLex201700000245JBJ ; 1er juin 2018, LawLex201800000843JBJ, LD juill./août 2018, 8, obs. LOUVET. - A contrario, V. Paris, 19 février 2021, LawLex202100000568JBJ, préc.

Cass. com., 27 mars 2019, LawLex201900000417JBJ et LawLex201900000418JBJ ; 5 juin 2019, LawLex201900000781JBJ.

Paris, 14 février 2017, LawLex201700000349JBJ, LEDICO avril 2017, 7, obs. BLANC ; 19 février 2021, LawLex202100000568JBJ, préc.

Douai, 14 janvier 2015, LawLex201500000084JBJ ; Paris, 3 février 2017, LawLex201700000245JBJ, approuvé par Cass. com., 5 juin 2019, LawLex201900000781JBJ. - V. aussi Paris, 22 mai 2018, LawLex201800000781JBJ et 1er juin 2018, LawLex201800000843JBJ, LD juill./août 2018, 8, obs. LOUVET, qui retiennent le risque de cloisonnement lorsque les rétrocessions invoquées ne portent que sur de trop faibles quantités ou ne constituent que des ventes ponctuelles ; Aix-en-Provence, 5 décembre 2019, LawLex201900001532JBJ.

Paris, 13 novembre 2018, LawLex201800001753JBJ ; Cass. com., 5 juin 2019, LawLex201900000781JBJ ; Aix-en-Provence, 5 décembre 2019, LawLex201900001532JBJ.

Paris, 23 janvier 2018, LawLex201800000183JBJ, préc.

Paris, 23 janvier 2018, LawLex201800000183JBJ, LD février 2018, 5, obs. LOUVET ; Paris, 22 mai 2018, LawLex201800000781JBJ.

TGI Paris, 20 décembre 2002, LawLex200300000837JBJ. 

Toulouse, 19 juin 1997, LawLex200200001248JBJ ; Paris, 8 avril 1998, LawLex200200001138JBJ, D. Aff., 1998, 965. 

Paris, 2 février 2016, LawLex201600000299JBJ.

Cass. com., 9 février 1993, LawLex200200001668JBJ, JCP E, 1994, II, 545, obs. DANGLEHANT ; RJDA, 1993, nº 469 ; Orléans, 26 février 1998, LawLex200200001172JBJ ; TGI Vienne, 15 mai 2003, LawLex200300002131JBJ. 

Paris, 1er février 2002, LawLex200200000555JBJ. 

Dijon, 3 juillet 1997, LawLex200200001239JBJ : l'ancien concessionnaire qui continue d'utiliser le logo du concédant et ne modifie pas son inscription dans l'annuaire crée un risque de confusion fautif. - V. égal., sur l'inscription dans l'annuaire, Cass. com., 9 juin 2004, LawLex200400001459JBJ.

Cass. com., 17 janvier 1995, LawLex200200001498JBJ. 

Cass. com., 15 décembre 1998, LawLex200200001034JBJ ; T. com. Nanterre, 5 novembre 2004, LawLex200400003331JBJ. 

Paris, 9 juillet 1992, LawLex200200001717JBJ ; TGI Lyon, 27 janvier 2004, LawLex200400000207JBJ ; TGI Lille, 2 mars 2004, LawLex200400000797JBJ. 

Cass. com., 17 décembre 1991, LawLex200200001768JBJ, D., 1992, Somm. 388, obs. FERRIER ; Rouen, 4 septembre 1997, LawLex200200001231JBJ, RJDA, 1998, nº 538, utilisation par un revendeur non agréé de la formule “spécialiste” de la marque, dans le but de faire croire à sa clientèle qu'il est membre du réseau ; Cass. com., 13 janvier 1998, LawLex200200001194JBJ, pour des publicités présentant un réparateur comme spécialiste d'une marque. 

Paris, 15 septembre 2020, LawLex202000001908JBJ, Contrats Conc. Consom. 2020, n° 165, obs. BOSCO.

TGI Vienne, 15 mai 2003, LawLex200300002131JBJ, sur l'usage de la marque associée aux mots “fournisseur” et “voitures neuves”. 

Cass. com., 29 juin 1993, LawLex200200001632JBJ. 

Bordeaux, 2 juin 1997, LawLex200200001254JBJ.

TGI Paris, 15 janvier 2016, LawLex201600000209JBJ.

Paris, 22 mai 2018, LawLex201800000781JBJ ; 13 novembre 2018, LawLex201800001753JBJ.

CJCE, 8 avril 2003, Van Doren c. Lifestyle sports, aff. C-244-00, LawLex200300003553JBJ, D., 2003, 2358, obs. ARNAUD ; RTD eur., 2004, 97, obs. BONET ; Europe, 2003, nº 222, obs. IDOT.

Paris, 29 novembre 2013, LawLex201300001722JBJ approuvé par Cass. com., 10 novembre 2015, LawLex201500001443JBJ ; Paris, 15 avril 2014, LawLex201400001898JBJ ; 16 janvier 2018, LawLex201800000120JBJ ; 1er juin 2018, LawLex201800000843JBJ, l'éviction d'un membre du réseau qui avait pratiqué des ventes hors de son territoire constitue un indice du cloisonnement du marché par le fournisseur, même si elle est très ancienne, dès lors que ce dernier ne démontre pas avoir changé ses pratiques. - V., a contrario, Paris, 13 octobre 2023, LawLex202300012625JBJ.

Cass. com., 26 février 2008, LawLex200800000255JBJ, rejetant le pourvoi formé contre Caen, 10 janvier 2006, LawLex200800000264JBJ. 

TGI Paris, 15 janvier 2016, LawLex201600000209JBJ ; 8 avril 2016, LawLex201600000844JBJ, confirmé par Paris, 23 janvier 2018, LawLex201800000183JBJ, LD février 2018, 5, obs. LOUVET.

Usage illicite de la marque.

V. BONNET et MOUSSERON, Donner et retenir ne vaut, Cah. dr. entr., 1989, nº 2, 12.

63. Usage illicite de la marque.