Le droit européen et français applicable aux réseaux de distribution.
Le Droit de la distribution, deuxième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : approvisionnement et fourniture exclusifs, distribution exclusive, distribution sélective, distribution automobile.

Droit français de la distribution

L'article L. 134-1 du Code de commerce définit l'agent commercial comme “un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants …

Définition de l'agent, utilité de sa fonction et incohérence de son régime actuel en droit français.

LELOUP, La directive européenne sur les agents commerciaux, JCP G, 1987, II, 3308 ; PÉTEL, Les obligations du mandataire, Litec, 1988 ; HOUTTE, Les contrats d'agence au regard du Traité CEE, Cah. dr. eur., 1989, nº 3-4, 362 ; FERRIER, Commentaire de la loi du 25 juin 1991 sur l'agence commerciale, Cah. dr. entr. 1991, n° 6, 30 ; LEVENEUR, Agents commerciaux. L. nº 91-593 du 25 juin 1991 relative aux rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants, Contrats Conc. Consom., 1991, nº 183 ; LELOUP, La loi du 25 juin 1991, relative aux rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants ou le triomphe de l'intérêt commun, JCP E, 1991, I, 105 ; Les rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants (L. nº 91-593 du 25 juin 1991), LPA, 11 octobre 1991, 16 ; PIGACHE, Le mandat d'intérêt commun, thèse, Paris V, 1991 ; L. et J. VOGEL, Réforme du droit de la distribution : le statut des agents automobiles après la loi du 25 juin 1991, Contrats Conc. Consom., décembre 1991, 1 ; DEKEUWER, Commentaire de la loi nº 91-593 du 25 juin 1991 relative aux rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants, ALD, 1992, 131 ; HANINE, L'agent commercial est-il un commerçant ?, LPA, 3 juillet 1992 ; THIEFFRY et GRANIER, Les contrats d'agence dans le droit de la distribution français et communautaire, Gaz. Pal., 1992, 1, Doctr. 258 ; L. et J. VOGEL, Décret nº 92-506 relatif aux agents commerciaux, Contrats Conc. Consom., août-septembre 1992, 1 ; EL HAGE, La nouvelle réglementation du contrat d'agence commerciale, protection de l'agent et consécration de l'intérêt commun, RTD com., 1995, 345 ; IMPALLOMENI, Le contrat d'agence en droit français et italien, Gaz. Pal., 1996, Doctr. 1171 ; BÉHAR-TOUCHAIS et VAN WAGNER, Agent commercial, le pari communautaire, Contrats Conc. Consom., 1998, chron. nº 9 ; DILOY, Le contrat d'agence commerciale en droit international, LGDJ, 2000 ; GRIGNON, Le fondement de l'indemnité de fin de contrat des intermédiaires de commerce, Litec, 2000 ; MÉGNIN, Le contrat d'agence commerciale en droit français et allemand, Litec, 2003 ; Distinction entre le contrat d'agence commerciale et le courtage, JCP G, 2003, 1838 ; PANSIER, Droit de la distribution, super centrales et pratiques anticoncurrentielles, agents commerciaux, terme suspensif et terme extensif dans le contrat d'agence, RJ com., 2003, nº 12, 387 ; BÉHAR-TOUCHAIS, Soumission volontaire au statut d'agent commercial, RDC, 3/2004, 731 ; FOURNIER, L'agence commerciale 10 ans après la mise en vigueur du nouveau statut, Litec, 2e éd., 2005 ; BEDDELEEM, L'agent commercial après la loi ENL : la persistance de l'insécurité, Administrer, 2006, nº 394 ; BONNET DESPLAN, Commissionnaire-affilié ou affilié-agent ? La requalification d'un contrat de commission à la vente en contrat d'agence commerciale, Cah. dr. entr. 2007-3, 47 ; BOURDEAU, Retour sur le droit à commission de l'agent commercial, Cah. dr. entr. 2007, n° 3, 53. Vers une généralisation du droit à commission indirecte de l'agent ? Cah. dr. entr. 2007, n° 3, 57 ; CHEVRIER, Agent commercial : coup de frein au commissionnement indirect, D., 2008, 409 ;  IDOT, Droit à la commission des agents et absence d'intervention du commettant, Europe, 2008, nº 95 ; LELOUP, L'arrêt de la Cour de justice du 28 octobre 2010 (Volvo Car Germany GmbH / Autohof Weidensdorf GmbH), RJ com., 2010, 528 ; HUET, Les principaux contrats spéciaux, LGDJ, 3e éd., 2012 ; VOGEL (sous la dir.), Les agents commerciaux en Europe. Échec de l'harmonisation ?, Droit global / Global Law, éd. Panthéon-Assas, 2012 ; LELOUP, Les traits fondamentaux du droit de l'agence commerciale, AJCA, 2014, 356 ; MIRFAKHRAEI, Les indemnités de fin de contrat dans le contrat d'agence et le contrat de distribution exclusive, Schulthess, 2014 ; COLLART-DUTILLEUL et DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, Dalloz, 10e éd., 2015 ; LELOUP, Les agents commerciaux. Statut juridique - Stratégies professionnelles, Delmas, 7e éd., 2015 ; LELOUP, Le droit de la distribution - Est-il réaliste ? Est-il ouvert ?, Gaz. Pal., n° spécial Conférence Droit et Commerce, 26-30 août 2015, 50 ; FERRIER (N. et F.), Droit de la distribution, Litec, 10e éd., 2023 ; PÉDAMON et KENFACK, Droit commercial. Commerçants et fonds de commerce - Concurrence et contrats du commerce, 5e éd., Dalloz, 2023 ; BÉNABENT, Droit des contrats spéciaux civils et commerciaux, LGDJ, 15e éd., 2024 ; MALAURIE, AYNÈS, GAUTIER, Droit des contrats spéciaux, LGDJ, 13e éd., 2024.

L'article L. 134-1 du Code de commerce définit l'agent commercial comme “un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux. Il peut être une personne physique ou une personne morale” . 

Le contrat d'agence repose sur le mandat. Contrairement à la distribution exclusive, à la distribution sélective ou à la franchise, fondées sur un mécanisme de vente et revente, le fournisseur qui recourt à un agent commercial contracte avec un représentant indépendant, chargé de développer sa propre affaire grâce à un intéressement sur les opérations réalisées par son intermédiaire. Chacune des parties a un intérêt à l'essor de l'entreprise par la création et le développement de la clientèle. Contrairement au commissionnaire, l'agent commercial a l'obligation de communiquer à son mandant les noms et adresses de ses clients, ainsi que le détail des ventes qu'il réalise. Le fournisseur dispose ainsi d'un fichier clientèle précis, dont il pourra faire usage après la rupture du contrat.

Le contrat d'agence est le plus souvent utilisé pour distribuer des biens de consommation ou d'équipement, plus rarement en matière de prestation de services. Toutefois, le législateur français a inclus les services dans le champ d'application de l'article L. 134-1 du Code de commerce en usant de la liberté accordée par la directive 86-653 du 18 décembre 1986, d'étendre le régime de protection des agents à la négociation et à la conclusion de contrats de prestation de services .

La qualité d'agent commercial suppose la réunion de diverses conditions de fond, l'accès à cette profession étant réglementé. Les mandataires qui ne remplissent pas les conditions requises pour être protégés par le statut applicable aux agents commerciaux sont soumis aux règles prétoriennes qui régissent le mandat d'intérêt commun .

Le droit français actuel des agents commerciaux n'est pas pafaitement adapté au développement des contrats d'agence. En effet, il confère à l'agent une protection très coûteuse pour le mandant en cas de fin de contrat sous la forme d'une indemnité automatique en pratique de deux années de commissions brutes moyennes, sauf faute grave extrêmement difficile à établir tant la jurisprudence est réticente à la caractériser, même en présence de manquements répétés à ses obligations. Cette surprotection est de nature à dissuader les fournisseurs de recourir à ce statut pour organiser leur réseau alors qu'il pourrait leur apporter une solution simple et souple, pouvant être plus avantageuse qu'une distribution intégrée ou par revendeurs indépendants. L'excès de protection conduit également à de multiples tentatives de contournement.

Cette incohérence entre les besoins économiques et la rigidité du statut s'accompagne paradoxalement en pratique d'une distorsion de protection entre les agents français des fournisseurs français et des fournisseurs étrangers. En cas de contrat interne, le fournisseur français se trouve dans l'impossibilité d'échapper au statut et le recours à un réseau d'agents peut s'avérer très coûteux en cas de résiliation ou de réorganisation. Ses concurrents étrangers peuvent quant à eux recourir à des agents français en vidant le statut protecteur de la plus grande partie de son contenu grâce à la stipulation d'une clause attributive de compétence à un tribunal étranger (ou d'une clause compromissoire au profit d'un arbitre étranger) et au choix d'une loi étrangère plus clémente que la loi française, allemande ou suisse par exemple.

En termes d'analyse économique du droit, le droit français actuel des agents commerciaux apparaît très peu efficient. Il décourage de manière générale le recours à l'agence commerciale par un régime excessivement protecteur par rapport aux autres droits de l'Union européenne et crée un déficit de compétitivité au détriment des fournisseurs français par rapport à leurs concurrents étrangers, y compris sur le marché français, en dispensant les entreprises étrangères de respecter les contraintes auxquelles il soumet les entreprises françaises.

La jurisprudence antérieure à la loi 91-593 du 25 juin 1991, codifiée aux articles L. 134-1 et s. C. com. refusait la qualité d'agent commercial à une société : Paris, 27 juin 1961, JCP G, 1962, II, 12479, obs. HÉMARD ; 14 février 1962, D., 1962, 514, obs. HÉMARD ; 22 mai 1964, JCP G, 1964, II, 13857, obs. P.L.

Le champ d'application de la directive européenne ne couvrait initialement que les marchandises : directive 86-653 du 18 décembre 1986 relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux, JOCE L 382 du 31 décembre 1986, article 1, paragraphe 2.

En ce sens : Lyon 29 janvier 1993, LawLex200200004859JBJ ; Cass. com., 14 mars 1995, LawLex200200004860JBJ, Bull. civ. 4, nº 83 ; D., 1997, Somm. 52, obs. FERRIER ; 3 juin 1997, LawLex200200004845JBJ, Bull. civ. 4, nº 172 ; Quot. jur., 17 juillet 1997, 5.

Le décret 58-1345 du 23 décembre 1958 modifié par le décret 92-506 du 10 juin 1992, relatif aux agents commerciaux, a, le premier, organisé le statut des agents pour compenser l'inadaptation des règles du mandat, édictées pour une activité ponctuelle de représentation. Le décret du 23 décembre 1958 subordonnait l'application du statut d'agent commercial à la réunion de conditions de forme, notamment la rédaction d'un écrit, que la Cour de cassation, soucieuse d'encadrer la profession d'agent commercial, appliquait strictement . On distinguait ainsi entre les mandataires bénéficiaires d'un écrit et ceux n'en disposant pas, seuls les premiers étant protégés de la révocation ad nutum du mandat. La différence de traitement n'était toutefois guère justifiable, puisque tous exerçaient la même activité. Ces règles ont été abandonnées  depuis l'entrée en vigueur de la directive européenne d'harmonisation 86-653 du 18 décembre 1986, transposée en droit français par la loi 91-593 du 25 juin 1991, relative aux rapports des agents commerciaux et de leurs mandants et codifiée aux articles L. 134-1 et s. du Code de commerce sous le titre “Des agents commerciaux” . Toutes les conditions de forme antérieurement requises ont été abandonnées, conformément aux exigences européennes. Le décret 92-506 du 10 juin 1992 en a précisé les conditions d'application , ainsi qu'un arrêté du 8 janvier 1993 relatif à l'immatriculation sur un registre spécial . L'ensemble de ces textes réglementaires a été codifié aux articles R. 134-1 à R. 134-17 et A. 134-1 et A. 134-5 du Code de commerce.

Cass. com., 22 juin 1976, nº 75-11.202, Bull. civ. 4, nº 215 ; JCP G, 1979, II, 19071, obs. HANINE. 

Cass. com., 16 févr. 1999, LawLex200200005179JBJ.

D. 92-506 du 10 juin 1992, JO, 12 juin 1992.

Arr. 8 janvier 1993 relatif à l'immatriculation des agents commerciaux, JO, 10 mars 1993.

Textes applicables.

V. CALVO, Agents commerciaux et droit communautaire, LPA, 12 avril 1989, nº 44 ; DEKEUWER, Commentaire de la loi du 25 juin 1991 relative aux rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants, ALD, 1992, Comm. nº 131 ; d'HARCOURT, L'Europe chez les agents commerciaux (L. nº 91-593, 25 juin 1991), Act. fid., septembre 1991, nº 744, 35 ; FERRIER, Commentaire de la loi du 25 juin 1991, Cah. dr. entr., 1991, nº 6, 30 ; de THEUX, Statut européen de l'agent commercial, Travaux de recherche, 1992 ; DAHAN, Agent commercial : un seul statut européen, MOCI, 6 juin 1996, 83.

La qualification d'agent déclenche un régime juridique de faveur ; aussi est-elle particulièrement débattue. En droit de la concurrence, le contrat de l'agent qui n'assume pas le risque commercial et financier lié aux activités pour lesquelles son commettant l'a désigné échappe en principe à l'application du droit des ententes, d'où un débat sans cesse renouvelé sur la notion de “vrai” ou de “faux” agent.

Des conflits de qualification du même ordre existent en droit commercial ; les critères du contrat d'agence font l'objet de controverses jurisprudentielles nourries. Faute d'un pouvoir de négociation, les entreprises exploitant des boutiques de téléphonie mobile sont ainsi exclues par la jurisprudence du champ d'application du statut de l'agent commercial. Un contrat ne présentant que l'apparence d'un contrat d'agent commercial peut même faire l'objet d'une requalification en contrat de travail.

Droit français de la distribution

440. Définition de l'agent, utilité de sa fonction et incohérence de son régime actuel en droit français.(1)

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