Contrats d'affaires

Afin de protéger l'entrepreneur contre les risques d'impayé pour des travaux entrepris dans un marché de travaux concernant un ouvrage immobilier, le législateur a imposé au maître d'ouvrage une contrainte: garantir à l'entrepreneur le paiement du prix du marché convenu entre les parties .

Ainsi, en vertu du premier alinéa de l'article 1799-1 du Code civil , le maître d'ouvrage qui a conclu un ma …

Obligation de fournir une garantie de paiement.

Afin de protéger l'entrepreneur contre les risques d'impayé pour des travaux entrepris dans un marché de travaux concernant un ouvrage immobilier, le législateur a imposé au maître d'ouvrage une contrainte: garantir à l'entrepreneur le paiement du prix du marché convenu entre les parties .

Ainsi, en vertu du premier alinéa de l'article 1799-1 du Code civil , le maître d'ouvrage qui a conclu un marché de travaux privés  visé au 3° de l'article 1779 du même code , doit garantir à l'entrepreneur le paiement des sommes dues lorsque celles-ci dépassent un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat , dès la signature du marché . A cet égard, il résulte de l'article 1er du décret 99-658 du 30 juillet 1999, que le seuil prévu au premier alinéa de l'article 1799-1 du Code civil est fixé, hors taxes, à 79 000 franc et, à compter du 1er janvier 2002, à 12 000 euro, les sommes dues s'entendant du prix convenu au titre du marché, déduction faite des arrhes et acomptes versés lors de la conclusion de celui-ci, de sorte que les dispositions de l'article 1799-1 ne peuvent trouver à s'appliquer pour des devis dont le montant hors taxes s'élève à 10 700 euro .

Ces dispositions qui imposent au maître d'ouvrage qui conclut un marché privé de travaux immobiliers de fournir une garantie de paiement à l'entrepreneur lorsque les sommes dues dépassent un certain montant, sont d'ordre public, de sorte que les parties ne peuvent y déroger par des conventions particulières .

Il en résulte que le maître d'ouvrage est débiteur de l'obligation de garantie de paiement à l'égard de l'entrepreneur dès la signature de ce marché . Il appartient donc aux juges de constater que le maître d'ouvrage avait satisfait à cette obligation avant que le contrat ne devienne caduc . Il a également été jugé que l'entrepreneur est en droit de surseoir à l'exécution de ses travaux lorsque la garantie que doit le maître d'ouvrage n'est pas fournie après une mise en demeure restée sans effet à l'issue d'un délai de quinze jours, de sorte que l'entrepreneur qui n'a pas usé de cette faculté est tenu d'exécuter les travaux en vertu du contrat .

Cette obligation, qui porte sur l'intégralité du prix convenu au titre du marché et de ses avenants, est imposée par la loi exclusivement au maître d'ouvrage . Ainsi, le seul fait que l'entrepreneur ait débuté ses travaux sans avoir obtenu une attestation de garantie de paiement n'emporte pas renonciation à cette garantie, d'autant plus qu'aux termes de l'article 1799-1 du Code civil, l'entrepreneur conserve la faculté de poursuivre ou non l'exécution du contrat lorsqu'aucune garantie n'a été fournie et que les travaux sont impayés .

L'article 1799-1 du Code civil édicte ainsi un principe impératif selon lequel le maître de l'ouvrage doit garantir à l'entrepreneur le paiement des sommes dues au titre des marchés de travaux privés dès la conclusion des marchés , pendant toute la durée du contrat, et jusqu'à complet paiement du marché . A défaut, l'entrepreneur peut légitimement interrompre sa prestation . Le maître d'ouvrage ne peut dès lors s'abriter derrière de soi-disantes difficultés pour prétendre être déchargé de l'exécution de son obligation .

Cette garantie peut être sollicitée du maître d'ouvrage, à tout moment, même en cours d'exécution du contrat, tant que le marché n'a pas été entièrement soldé . Elle n'est, de plus, pas subordonnée à l'existence d'une créance certaine, liquide et exigible au titre de travaux impayés, mais à la seule conclusion d'un marché de travaux privés . La Haute juridiction a ainsi retenu qu'elle peut être sollicitée en fin de chantier et tant que celui-ci n'est pas soldé , après la réalisation des travaux, par l'entrepreneur qui n'a pas été payé par le maître de l'ouvrage , voire après la résiliation du marché, alors que le montant des travaux n'a pas été intégralement réglé . Cette position n'est toutefois pas suivie par certains juges du fond qui retiennent que, même si cette obligation de garantie peut être exigée dès la signature du contrat d'entreprise et à tout moment de l'exécution du marché, il n’est pas justifié d’en exiger l'exécution après la réception et l'achèvement des travaux .

Selon le mode de financement et la finalité des travaux, le maître d'ouvrage peut, pour constituer une garantie, recourir à un crédit ou fournir une caution.

Lorsque le maître d'ouvrage choisit de recourir à un crédit spécifique “destiné exclusivement et en totalité au paiement de travaux exécutés par l'entrepreneur” pour financer la réalisation de la totalité des travaux, la garantie prend la forme d'un versement direct du prêt au profit de l'entrepreneur par l'établissement de crédit , étant précisé que ces versements “se font sur l'ordre écrit et sous la responsabilité exclusive du maître de l'ouvrage entre les mains de la personne ou d'un mandataire désigné à cet effet” . Ainsi, un crédit-bailleur, agissant en qualité de maître d'ouvrage, est tenu de fournir à l'entrepreneur la garantie de paiement de l'article 1799-1 du Code civil dès lors qu'il n'a pas eu recours à un crédit spécifique pour financer les travaux .

Lorsque “le maître d'ouvrage ne recourt pas à un crédit spécifique ou lorsqu'il y recourt partiellement et à défaut de garantie résultant d'une stipulation particulière” , le paiement pourra être garanti par un cautionnement. Il appartiendra dès lors au maître d'ouvrage de remettre à l'entrepreneur cette caution consentie “par un établissement de crédit, une entreprise d'assurance ou un organisme de garantie collective, selon les modalités fixées par décret en Conseil d'Etat” .

Ce cautionnement qui garantit le paiement des sommes excédant 12 000 euro dues en exécution d'un marché de travaux privé, en vertu des dispositions d'ordre public de l'article 1799-1 du Code civil, ne doit être assorti d'aucune condition ayant pour effet d'en limiter la mise en œuvre . Le recours à ce cautionnement solidaire n'est toutefois pas exigé si le marché a été conclu par le maître d'ouvrage “pour son propre compte et pour la satisfaction de besoins ne ressortissant pas d'une activité professionnelle en rapport avec ce marché” .

Cette garantie de paiement a été instituée par l'article 5 de la loi n° 94-475 du 10 juin 1994, relative à la prévention et au traitement des difficultés des entreprises, qui a ensuite introduit l'article 1799-1 du Code civil.

C. civ., art. 1799-1, al. 1er : “Le maître de l'ouvrage qui conclut un marché de travaux privé visé au 3° de l'article 1779 doit garantir à l'entrepreneur le paiement des sommes dues lorsque celles-ci dépassent un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat”.

Cass. 3e civ., 12 septembre 2007, LawLex202200009563JBJ.

Lyon, 6 novembre 2012, LawLex202200009602JBJ.

Cass. 3e civ., 13 janvier 2009, LawLex202200009606JBJ.

Douai, 17 janvier 2019, LawLex202200009617JBJ.

Colmar, 8 mars 2017, LawLex202200009601JBJ.

Rennes, 14 septembre 2017, LawLex202200009616JBJ.

Cass. 3e civ., 13 octobre 2016, LawLex202200009564JBJ.

Sont exclus du champ d'application de l'obligation de garantie de paiement, les “ marchés conclus par un organisme visé à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation, ou par une société d'économie mixte, pour des logements à usage locatif aidés par l'Etat et réalisés par cet organisme ou cette société” (C. civ., art. 1799-1 al. 5).

Cass. 3e civ., 15 septembre 2016, LawLex202200003869JBJ.

Cass. 3e civ., 18 mai 2017, LawLex202200003870JBJ.

Angers, 30 octobre 2018, LawLex202200009569JBJ.

Le décret n° 99-658 du 30 juillet 1999, pris pour l'application de l'article 1799-1 du Code civil et fixant un seuil de garantie de paiement aux entrepreneurs de travaux, précise que ce crédit “doit être destiné exclusivement et en totalité au paiement de travaux exécutés par l'entrepreneur”.

Cass. 3e civ., 3 mai 2018, LawLex202200009641JBJ, Const.-Urb. juill. 2018, comm. 106, obs. SIZAIRE.

Cass. 3e civ., 4 mars 2021, LawLex202200009566JBJ, JCP G 2021, 418, n° 2, obs. SIMLER ; D. 24 mars 2021, obs. GARCIA ; Constr.-Urb. 2021, n° 5, 69, obs. SIZAIRE.

C. civ., art. 1779 : “Il y a trois espèces principales de louage d'ouvrage et d'industrie : […] 3° Celui des architectes, entrepreneurs d'ouvrages et techniciens par suite d'études, devis ou marchés”.

Cass. 3e civ., 9 septembre 2009, LawLex202200009561JBJ.

Poitiers, 31 mars 2017, LawLex202200009603JBJ.

Cass. 3e civ., 1er décembre 2004, LawLex202200009567JBJ, Gaz. Pal. 2005, 2, 4267, obs. PEISSE ; V en ce sens : Cass. 3e civ., 9 septembre 2009, LawLex202200009561JBJ ; Cass. 3eciv., 9 septembre 2009, LawLex202200009604JBJ ; Cass. 3e civ., 9 septembre 2009, LawLex202200009605JBJ, Constr.-Urb. 2009, 128, obs. SIZAIRE.

Cass. 3e civ., 9 septembre 2009, LawLex202200009604JBJ.

Cass. 3e civ., 9 septembre 2009, LawLex202200009605JBJ, Constr.-Urb. 2009, 128, obs. SIZAIRE.

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