Introduction

Champ d'application

Programme de conformité

Protection des lanceurs d'alerte 

Contrôle et sanctions

Règles issues de la loi Sapin II

Droit européen 

Droit français

Règles issues du droit de la concurrence

Sapin II/Concurrence

Champ d’application ratione personae

Champ d’application ratione materiae

Portée du plan

Elaboration du plan

Mesures comprises dans le plan

Inclusion dans le rapport de gestion

Plan de vigilance

Injonction

Responsabilité civile

Sanctions

Devoir de vigilance

Programme RSE

Reporting

Communication

Reporting et communication

Sanctions judiciaires

Risque de réputation, stratégique et de déstabilisation

Code Middlenext 

Corpus IFA

Code AFEP - MEDEF 

Typologie 

Principes de gouvernance

Principes intégrant les valeurs RSE

Principes

Appliquer ou expliquer

Force obligatoire

Codes de bonne conduite privés

Droit de la compliance

En matière de RSE, deux approches coexistent. Une première conception considère que la RSE constitue une démarche volontaire de l'entreprise qui repose sur une volonté d'auto-régulation destinée à anticiper une potentielle action législative contraignante tout en produisant des normes différenciées adaptées à la situation de chaque entreprise. Elle conduit l'entreprise à aller  au-delà de la régle …

Une démarche volontaire ou contrainte

L'acronyme RSE reçoit plusieurs acceptions : responsabilité sociale des entreprises, responsabilité sociétale des entreprises ou encore responsabilité sociale et environnementale des entreprises. Il désigne la responsabilité des entreprises vis-à-vis des effets qu’elles exercent sur la société. Selon la Commission, le concept signifie que celles-ci “décident de leur propre initiative de contribuer à améliorer la société et rendre plus propre l'environnement” . La responsabilité sociale suppose, pour l'entreprise, non seulement de remplir pleinement ses obligations juridiques, mais surtout d'aller au-delà et d'investir “davantage” dans le capital humain, l'environnement et les relations avec les parties prenantes. Les entreprises doivent, ainsi,  tenir compte avant tout des externalités négatives sociales et environnementales de leurs activités avant de s'engager à une responsabilité élargie. 

Issue de la “corporate social responsability (CRS)”, anglo-saxonne, la RSE naît aux Etats-Unis. A l'origine, elle repose sur le concept moral selon lequel l'appropriation privée ne se justifie que si elle sert l'intérêt commun et remet en cause la notion de profit comme seule vocation de l'entreprise. Au début du 20e siècle, elle prend souvent la forme d'un certain paternalisme qui consiste, pour l'entreprise, à accorder à ses salariés, pour les fidéliser, certains avantages sociaux, comme l'hébergement ou l'éducation de leurs enfants . 

Dans les années 1950-60, la publication par l'économiste Howard Bowen, fondateur du mouvement coopératif qui a influencé la démarche de nombreux industriels américains et anglo-saxons, tels que Henry Ford, Thomas Edison, Chester Barnard, d'un ouvrage sur la responsabilité de l'homme d'affaires , donne un nouvel essor au concept de RSE. Selon Bowen, la doctrine de la responsabilité sociétale renvoie à l’idée selon laquelle la prise en compte volontaire d’une responsabilité sociale de l’homme d’affaires est, ou pourrait être, un moyen opérationnel pour résoudre des problèmes économiques et atteindre plus globalement les objectifs économiques poursuivis par la société. La responsabilité de l'homme d'affaires s'entend de son obligation de suivre les politiques, de prendre les décisions, ou d'adopter les orientations qui sont désirables en terme d’objectifs et de valeurs pour la société. Les décisions de l'homme d'affaires doivent, ainsi, intégrer la question du bien public et les éléments de politique économique afin, selon Bowen, d'éviter des réglementations qui limiteraient sa liberté d'action et de favoriser un fonctionnement décentralisé de l'économie américaine.

Jusqu'aux années 1970, les entreprises se préoccupent principalement de leurs performances économiques et de la satisfaction de leurs actionnaires. Plusieurs événements majeurs dans cette décennie vont, cependant, changer la donne. Les accidents environnementaux, tels que la catastrophe de Seveso ou l'explosion de l'usine chimique de Bhopal, les bouleversements climatiques liés au réchauffement de la planète, à la destruction de la couche d'ozone ou à la déforestation, le désinvestissement des pouvoirs publics et la globalisation des échanges donnent naissance à une réflexion sur la responsabilité sociale et environnementale des entreprises, prise de conscience qui va s'accélérer dans les années 1990 avec notamment le sommet de la Terre de Rio en 1992 et en 2000, le lancement du Pacte Mondial par Kofi Annan. Dorénavant, la société attend des entreprises non seulement des performances économiques, mais aussi un engagement social, voire sociétal. Elles doivent, dans ce cadre, rendre compte de leurs actions tant aux actionnaires, qu'aux parties prenantes ("stakeholders") que sont les clients, les salariés, les pouvoirs publics, ou les ONG.

https://www.europarl.europa.eu/meetdocs/committees/deve/20020122/com(2001)366_fr.pdf.

Ainsi, en France, le groupe Boussac, spécialisé dans le textile, a construit des cités ouvrières autour de ses usines, qui avaient leurs propres crèches avec layette fournie, les garderies, colonies de vacances, dispensaires ou laveries, ainsi qu'un centre d'apprentissage : https://www.vosgesmatin.fr/economie/2018/08/14/richesse-et-declin-de-l-empire-textile-boussac

BOWEN, Social responsibilities of the businessman, 1953, Harper & Brothers.

Notion et origine

Les entreprises prennent de plus en plus conscience qu'elles constituent, plus qu'un simple vecteur économique, des membres à part entière d'une société en perpétuelle évolution qu'il est vital d'améliorer. Bien que leur responsabilité première soit de générer des profits, elles peuvent aussi poursuivre des objectifs sociaux et de protection de l'environnement, en intégrant la responsabilité sociale comme investissement stratégique au cœur de leur stratégie commerciale, dans leurs instruments de gestion et leurs activités. En affirmant leur responsabilité sociétale et en contractant de leur propre initiative des engagements qui vont au-delà des exigences réglementaires et conventionnelles auxquelles elles sont soumises, elles adoptent un mode ouvert de gouvernance, qui concilie les intérêts des différentes parties prenantes, du dirigeant aux employés, en passant par les personnes extérieures, au sein d'une approche globale de la qualité et du développement durable . La responsabilité sociétale de l'entreprise s'exprime, en effet, vis-à-vis des salariés et, plus généralement, de toutes les parties prenantes qui sont concernées par l'entreprise mais qui peuvent, à leur tour, influer sur sa réussite. 

La notion de parties prenantes a pris son essor aux Etats-Unis avec la publication de l'ouvrage de Freeman , qui a posé les fondements d'une nouvelle approche de la gouvernance d'entreprise. L'auteur estime que l'entreprise doit tenir compte non seulement des attentes de ses actionnaires mais aussi de ses différentes parties prenantes, la notion de parties prenantes étant définie comme “tout groupe ou individu qui peut influencer ou être influencé par la réalisation des objectifs de l'organisation”. Initialement élaboré pour faire prendre conscience aux dirigeants des entreprises de l’importance cruciale de composer avec des groupes ou individus dont les intérêts dépassent les seuls enjeux économiques, le concept de partie prenante s’est ensuite développé dans le cadre de l’éthique organisationnelle et de la RSE. Toutes les parties prenantes, notamment les salariés, les consommateurs et les investisseurs, sont susceptibles de jouer un rôle décisif - que ce soit dans leur propre intérêt ou dans celui d'autres parties concernées, dans des domaines tels que les conditions de travail, l'environnement ou les droits de l'Homme - en incitant les entreprises à adopter des pratiques socialement responsables, même si la décision d'assumer cette responsabilité ne peut émaner que des entreprises. Cette approche partenariale de la gouvernance oblige in fine les dirigeants à faire la balance entre la rentabilité de court terme et les investissements à long terme, entre la rentabilisation du capital financier et la valorisation du capital humain. 

FREEMAN, Strategic management. A stakeholder approach, Pitman, 1984.

Une nouvelle conception de l'entreprise

En matière de RSE, deux approches coexistent. Une première conception considère que la RSE constitue une démarche volontaire de l'entreprise qui repose sur une volonté d'auto-régulation destinée à anticiper une potentielle action législative contraignante tout en produisant des normes différenciées adaptées à la situation de chaque entreprise. Elle conduit l'entreprise à aller  au-delà de la réglementation à laquelle elle est soumise et lui permet, en investissant davantage dans le capital humain, l'environnement et les relations avec les parties prenantes, à accroître sa compétitivité et sa productivité. Le seconde approche relègue au second plan la démarche volontaire et considère que la législation doit être renforcée afin de contraindre l'entreprise à prendre les mesures qui s'imposent en la matière. En France, la seconde approche semble se substituer au fil des textes à la première . La Commission a précisé de son côté que la responsabilité sociétale des entreprises n'a pas vocation à se substituer à la réglementation ou à la législation en matière de droits sociaux ou normes environnementales, ni à l'élaboration d'une nouvelle législation appropriée. Elle considère que lorsque de telles réglementations n'existent pas, il doit être mis en place un cadre réglementaire ou législatif adéquat afin de définir une base équitable, à partir de laquelle les pratiques socialement responsables peuvent être développées . Selon la Commission, la mise en place d'une démarche RSE revêt une importance dans tous les types d'entreprises et tous les secteurs d'activité, de la PME à la multinationale, même si elle est plus couramment mise en œuvre dans les grandes sociétés. Il paraît même fondamental qu'elle soit plus largement appliquée dans les PME, y compris les micro-entreprises, qui sont celles qui contribuent le plus à l'économie et à l'emploi. 

Lorsque la mise en place de la RSE emprunte la voie de la démarche volontaire, celle-ci peut se traduire par l'adoption d'un code de bonne conduite qui engage l'entreprise ou ses organes. Elle peut aussi s'illustrer par l'insertion dans les contrats passés avec les partenaires de clauses RSE, leur imposant le respect de principes ou valeurs dont la violation pourrait justifier la rupture des relations contractuelles. Pour veiller à la bonne application de leur programme RSE, certaines grandes entreprises ont même mis un place un comité d'éthique chargé de mettre en œuvre les normes internes en matière de responsabilité sociétale. Il joue en règle générale le rôle d'un organe consultatif et d'impulsion de la RSE. La démarche imposée résulte, quant à elle, de l'ensemble des textes législatifs et règlementaires adoptés en la matière . Il en est ainsi des dispositifs que l'entreprise doit mettre en place pour prévenir et détecter la corruption, pour faciliter les signalements en protégeant le lanceur d'alerte ou du devoir de vigilance qui, au-delà de la lutte contre la corruption, impose aux entreprises le respect des droits humains, de la santé des personnes et la protection de l'environnement, les enjeux sociaux et environnementaux de leur activité devant, depuis la loi Pacte du 22 mai 2019, être pris en considération par les sociétés (art. 1833 C. civ.).

MERCIER, Responsabilité sociétale des entreprises et droit des sociétés : entre contrainte et démarche volontaire, Dr. sociétés 2011, étude 6 ; De la transparence à la vigilance ou le renforcement des obligations en matière de RSE, in RSE et médiation, Regard croisé France-Canada, 2018, PUAM.

Not. L. 2016-1691 du 9 décembre 2016 ; L. 2017-399 du 27 mars 2017.

La France a créé en 2013 une plateforme nationale d’actions globales pour la responsabilité sociétale des entreprises, qui formule des recommandations sur les questions sociales, environnementales et de gouvernance soulevées par la responsabilité sociétale des entreprises. Elle regroupe les administrations compétentes, les organisations représentant les entreprises et le monde économique, les organisations syndicales de salariés, des représentants de la société civile et de la recherche, et comprend parmi ses membres un député et un sénateur.

La plateforme vise notamment à promouvoir la RSE, tant à travers les politiques publiques qu’à travers le soutien aux initiatives volontaires des acteurs privés, valoriser les pratiques exemplaires et favoriser la concertation des parties prenantes en amont et en appui aux négociations de normes internationales. Elle a pour mission de :

- faire toute recommandation qu’elle juge pertinente à l’Etat, ou à d’autres institutions et organisations, y compris ses membres, susceptible de renforcer les pratiques sincères de responsabilité sociétale des entreprises et autres organisations, en particulier concernant la valorisation des démarches de RSE ;

- participer aux consultations auxquelles des administrations souhaiteraient l’associer, notamment à l’issue des conférences nationales environnementales et sociales, dans le cadre de saisines ou en réponse à des sollicitations internationales ;

- contribuer à la formulation d’un projet de “ plan national d’actions prioritaires ” en faveur de la RSE abordant aussi bien les politiques publiques que les initiatives privées et explorant les voies pour les développer ;

- construire une base documentaire largement accessible pour encourager la diffusion d’une culture favorable à la RSE et appuyer ses propres travaux, en élaborant notamment des rapports et études sur la situation de la RSE en France et dans le monde et assurer la plus grande transparence sur les activités de la Plateforme ;

- contribuer par ses propositions à l’élaboration des positions françaises en vue des négociations relatives à la RSE.

Plateforme RSE

FREEMAN, Strategic management. A stakeholder approach, Pitman, 1984; MERCIER, “ Responsabilité sociétale des entreprises et droit des sociétés : entre contrainte et démarche volontaire ”, Dr. sociétés 2011, étude 6 ; MERCIER, “ De la transparence à la vigilance ou le renforcement des obligations en matière de RSE ”, in RSE et médiation, Regard croisé France-Canada, 2018, PUAM; GENDRON et GIRARD, Repenser la responsabilité sociale de l'entreprise, l'école de Montréal, Armand Colin 2013; IGALENS et JORAS, La responsabilité sociale de l'entreprise Comprendre, rédiger le rapport annuel, coll. Personnel/ ANDCP, Ed. d'organisation, 2002; RICHARD et RAMBAUD, Révolution comptable: pour une entreprise écologique et sociale, Edition de l'Atelier, 2020; DESBARATS et JAZOTTES, La responsabilité sociale des entreprises : quel risque juridique ?, JCP S 2012,1293, spéc. 21; ROLLAND, Le quasi-contrat au secours de la RSE », in Risques, accidents et catastrophes, 2015, L’Harmattan; DESBARATS, “ La valeur juridique d’un engagement dit socialement responsable ”, JCP E 2006, 1214, spéc. n° 3; BLIN, DESBARATS, JAZOTTES, VIDALENS, Entreprise et Développement durable, Lamy Axe Droit, 2011, 120; TREBULLE, Responsabilité sociale des entreprises, Entreprise et éthique environnementale, Rép. Sociétés Dalloz, mars 2003, 50; MERCIER, Responsabilité sociétale des entreprises et droit des sociétés, Dr. Sociétés, avril 2011. PARACHKEVOCA, GASTAUD, BASSILANA, FRANCHOMME et TELLER, Droit des sociétés et responsabilité civile , Perspectives et évolutions récentes, Actes pratiques et ingénierie sociétaire 127, janvier 2013, dossier 1; DAOUD et FERRARI, La RSE sociale : de l’engagement volontaire à l’obligation juridique, JCP 2012, 1391; BERNARD-ROYER, L'investissement socialement responsable, vers une nouvelle éthique (Finance d'aujourd'hui), Arnaud Franel éditions, 2018; ELKINGTON, Cannibals with forks, New Society Publisher, 1998; COURET, Le gouvernement d'entreprise, la corporate governance, D. 1995, chron. 163; CHARREAUX, Vers une théorie du Gouvernement d'Entreprise : Cahier de recherche, IAE de Dijon, 1996.

Droit de la compliance

126. Une démarche volontaire ou contrainte

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