Le Droit européen des affaires, quatrième tome du Traité de droit économique, montre comment, simultanément, les autorités européennes suppriment les restrictions à l’accès et à l’exercice des activités économiques (libre circulation des marchandises, des personnes et des services, des capitaux) et édifient positivement le marché intérieur, soit en harmonisant les législations internes, soit en édictant de véritables règles unifiées.

Droit européen des affaires

Les juridictions nationales doivent, en application du principe de coopération énoncé à l'article 4 TUE, assurer la protection juridique découlant pour les justiciables de l'effet direct des dispositions du droit européen . Le droit à une protection provisoire autorise le juge, pour assurer l'efficacité du droit européen, à suspendre l'application d'une disposition nationale contraire dans l'atten …

Droit à une protection provisoire.

V. SIMON et BARAV, Le droit communautaire et la suspension provisoire des mesures nationales : les enjeux de l'affaire "Factortame", RMC, 1990, 591 ; CAVALLINI, Le juge national du provisoire face au droit communautaire. Les contentieux français et anglais, Bruylant, 1995 ; MEHDI, Le droit communautaire et les pouvoirs du juge national de l'urgence, RTD eur., 1996, 77.

Les juridictions nationales doivent, en application du principe de coopération énoncé à l'article 4 TUE, assurer la protection juridique découlant pour les justiciables de l'effet direct des dispositions du droit européen . Le droit à une protection provisoire autorise le juge, pour assurer l'efficacité du droit européen, à suspendre l'application d'une disposition nationale contraire dans l'attente d'une décision de la Cour de justice. Les règles de fond et la procédure diffèrent selon que le litige concerne la compatibilité d'une règle interne avec le droit européen ou celle de l'acte européen sur le fondement duquel la norme nationale a été adoptée. 

1) Compatibilité d'une règle interne avec le droit européen

Le juge national, qui soumet à la Cour de justice une question préjudicielle, mais dont les règles internes ne permettent ou n'imposent pas de surseoir à l'exécution de la norme soumise à l'appréciation du juge européen, doit, en application de la jurisprudence Simmenthal , écarter l'application de ces règles, afin d'assurer la pleine efficacité du droit européen . Les conditions d'octroi des mesures provisoires relèvent cependant de la compétence de l'ordre juridique interne de chaque État membre, en l'absence d'une réglementation européenne en la matière . 

2) Compatibilité  de l'acte européen sur le fondement duquel la norme nationale a été adoptée avec les règles européennes

Lorsque la mise en œuvre administrative de règles européennes revient aux autorités nationales, la protection juridictionnelle garantie par le droit européen comporte le droit pour les justiciables de contester, de façon incidente, la légalité de ces règles devant le juge national pour l'amener à saisir la Cour de justice de questions préjudicielles. Ce droit serait compromis si, dans l'attente d'une décision de la Cour, le justiciable ne pouvait pas, lorsque les conditions sont remplies, obtenir une décision de sursis à exécution . La protection provisoire assurée aux justiciables devant les juridictions nationales doit, en effet, être identique qu'ils contestent la compatibilité de dispositions de droit national avec le droit européen ou la validité d'actes européens de droit dérivé, dès lors que, dans les deux cas, la contestation est fondée sur le droit européen lui-même . Le juge national peut donc non seulement surseoir à l'exécution de la norme nationale prise en application d'un règlement européen dont la légalité est contestée, mais aussi octroyer des mesures provisoires aménageant ou régissant les situations juridiques ou les rapports de droit litigieux . Dans cette hypothèse, seul le juge national, à l'exclusion des autorités administratives, peut prononcer le sursis à exécution d'un acte administratif fondé sur un acte européen dont la légalité est contestée . Ainsi, en matière douanière, un sursis à exécution peut être ordonné par les juridictions nationales, même si le Code communautaire des douanes réserve cette faculté aux seules autorités douanières . 

Afin d'assurer une application uniforme du droit européen, le sursis à exécution, tout en relevant des règles de procédure nationales pour l'introduction et l'instruction de la demande, est soumis dans tous les États membres à des conditions d'octroi uniformes similaires à celles du référé devant la Cour . Avant de prononcer des mesures provisoires, le juge national est tenu de vérifier que ces conditions sont bien remplies. Les mesures provisoires doivent présenter un caractère d'urgence, c'est-à-dire être nécessaires pour éviter que la partie qui les sollicite subisse un préjudice grave et irréparable . Des doutes sérieux sur la validité de l'acte européen doivent être relevés : le juge doit indiquer les raisons pour lesquelles il estime que cet acte risque d'être invalidé par le juge européen. La Cour de justice ne doit pas déjà être saisie de la validité de celui-ci . Enfin, le juge national doit tenir compte de l'intérêt de l'Union, notamment en donnant à l'institution européenne, auteur de l'acte, la possibilité de s'exprimer . 

Le droit à une protection provisoire ne peut pas, en revanche, être invoqué en cas de carence d'une institution européenne. En effet, le Traité ne prévoit pas la possibilité d'un renvoi par lequel une juridiction nationale demanderait à la Cour de constater à titre préjudiciel la carence de l'institution. Aussi les juridictions nationales ne sont-elles pas compétentes pour prescrire des mesures provisoires en attendant que l'institution ait agi .

CJCE, 19 juin 1990, Factortame, aff. C-213-89, LawLex200400001840JBJ.

CJCE, 9 mars 1978, Simmenthal, aff. 106-77, LawLex200400001837JBJ, AJDA, 1978, 324, obs. BOULOUIS ; Cah. dr. eur., 1978, 265, obs. BARAV ; RID comp., 1978, 24, obs. GANSHOF van der MEERSCH ; RTD eur., 1978, 381, obs. CARREAU ; RTD eur., 1985, 313, obs. BARAV.

Le préjudice invoqué par le requérant doit être susceptible de se concrétiser avant même que la Cour ait pu statuer sur la validité de l'acte communautaire attaqué : CJCE, 9 novembre 1995, Atlanta Fruchthandelsgesellschaft c. Bundesamt für Ernährung und Forstwirtschaft, aff. C-465-93, LawLex200400003014JBJ ; 17 juillet 1997, aff. C-334-95, LawLex200400003013JBJ, Europe, 1997, nº 316, obs. RIGAUX ; JDI, 1998, 484, obs. MEDHI.

L'acte communautaire qui a déjà fait l'objet d'un recours en annulation, ou d'un renvoi préjudiciel en appréciation de validité, qui s'est traduit par une décision de rejet de la Cour ou du Tribunal de première instance des Communautés européennes, passée en force de chose jugée, ne peut plus faire l'objet de sursis à exécution, ni de renvoi préjudiciel, sauf si les motifs d'illégalité ou les moyens d'annulation invoqués sont nouveaux : CJCE, 9 novembre 1995, Atlanta Fruchthandelsgesellschaft c. Bundesamt für Ernährung und Forstwirtschaft, aff. C-465-93, LawLex200400003014JBJ ; 17 juillet 1997, Krüger c. Hauptzollamt Hamburg-Jonas, aff. C-334-95, LawLex200400003013JBJ.

CJCE, 9 novembre 1995, Atlanta Fruchthandelsgesellschaft c. Bundesamt für Ernährung und Forstwirtschaft, aff. C-465-93, LawLex200400003014JBJ ; 17 juillet 1997, aff. C-334-95, LawLex200400003013JBJ.

CJCE, 26 novembre 1996, T. Port c. Bundesanstalt für Landwirtschaft und Ernährung, aff. C-68-95, LawLex200600001092JBJ.

CJCE, 19 juin 1990, Factortame, aff. C-213-89, LawLex200400001840JBJ, AJDA, 1990, 834, obs. LE MIRE ; D., 1990, 591, obs. FOURGOUX ; RMCUE, 1991, 591, obs. SIMON et BARAV ; Gaz. Pal., 1991, 3, Doctr. 90, obs. RODFORD ; JDI, 1991, 447, obs. SIMON ; Cah. dr. eur., 1993, 593, obs. TATHAM.

CJCE, 13 mars 2007, Unibet London c. Justitiekanslern, aff. C-432-05, LawLex200700000347JBJ, Gaz. Pal., 10 juillet 2007, 54, obs. NICOLELLA ; Europe, 2007, nº 128, obs. SIMON : sous réserve du respect des principes d'équivalence et d'effectivité.

CJCE, 21 février 1991, Zuckerfabrik, aff. C-143-88, LawLex200400003015JBJ, AJDA, 1991, 240, obs. LE MIRE ; JCP G, 1991, I, 3530, obs. AUBY ; LPA, 1991, nº 62, 28, obs. de GUILLENCHMIDT et BONICHOT ; Gaz. Pal., 1992, 3, 227, obs. LAURENT ; JDI, 1992, 415, obs. SIMON ; Gaz. Pal., 1992, 1, 186, obs. CARNELUTTI ; RTD eur., 1996, 77, obs. MEDHI.

CJCE, 9 novembre 1995, Atlanta Fruchthandelsgesellschaft c. Bundesamt für Ernährung und Forstwirtschaft, aff. C-465-93, LawLex200400003014JBJ, RMCUE, 1995, 179, obs. DE SMIJTER ; Europe, 1996, nº 18, obs. GAZIN et SIMON ; RTD eur., 1996, 77, obs. MEDHI ; JDI, 1996, 471, obs. SIMON.

CJCE, 21 février 1991, Zuckerfabrik, aff. C-143-88, LawLex200400003015JBJ ; 9 novembre 1995, Atlanta Fruchthandelsgesellschaft c. Bundesamt für Ernährung und Forstwirtschaft, aff. C-465-93, LawLex200400003014JBJ.

CJCE, 6 décembre 2005, ABNA c. Secretary of State for Health, aff. C-453-03, LawLex200700000041JBJ, Europe, 2006, nº 34, obs. MEISSE.

CJCE, 11 janvier 2001, Siples c. Ministero delle Finanze, aff. C-226-99, LawLex200800001920JBJ.

CJCE, 21 février 1991, Zuckerfabrik, aff. C-143-88, LawLex200400003015JBJ.

Droit européen des affaires

168. Droit à une protection provisoire.(1)

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