L'Autorité de la concurrence n'est pas compétente pour appliquer le droit polynésien de la concurrence, seule l'Autorité polynésienne de concurrence (APC) étant investie de cette mission, ainsi que la Cour d'appel de Paris, lorsqu'elle est saisie d'un recours contre les décisions de l'APC.

Le droit de la concurrence métropolitain ou européen ne s'appliquant pas en Polynésie, l'Autorité de la concurrence ne peut examiner un grief de discrimination tarifaire et de prix excessifs sous cet angle, alors que les pratiques dénoncées, si elles étaient établies, n'auraient des effets potentiels ou réels que sur le territoire polynésien.

relative à des pratiques mises en œuvre sur le territoire de la Polynésie française

ADLC, 18 novembre 2020, n° 20-D-18

GC, 1st chamber extended composition, November 18, 2020, No T-814/17

La Commission ne viole pas le principe de proportionnalité lorsqu'elle oblige l'entreprise à rétablir la situation concurrentielle sans pour autant lui imposer son choix entre les différentes options possibles et leurs modalités de mise en oeuvre.

Le fait qu'une infraction présenterait un caractère inédit ou n'ait jamais été préalablement sanctionnée ne justifie pas une exonération totale d'amende ni même une réduction de son montant.

La prétendue bonne foi de l'entreprise n'exclut pas le constat selon lequel l’infraction en cause a été commise de propos délibéré ou par négligence, dès lors que compte tenu de sa position de monopole sur le marché en cause et de son obligation de vigilance, elle ne pouvait ignorer que la pratique mise en oeuvre pouvait entraîner de sérieuses restrictions à la concurrence.

Le fait que la Commission ait initialement envisagé de recourir à la procédure d'engagements dans une affaire ne la prive pas de la possibilité d'infliger finalement une amende à l'entreprise en cause.

L'entreprise qui omet d’indiquer les raisons précises pour lesquelles il aurait été crucial d’obtenir des renseignements auprès de membres de son personnel ayant quitté ses effectifs ni les circonstances pour lesquelles il n’est plus possible d’obtenir des renseignements auprès d'elles ne démontre pas l’atteinte à ses droits de la défense qui résulterait de la durée excessive de la procédure administrative.

Dès lors que la liste des pratiques abusives figurant à l’article 102 TFUE n’est pas limitative, il ne peut être exclu que la suppression par le gestionnaire des infrastructures ferroviaires lituaniennes, en situation de monopole, d’une voie ferrée puisse, à elle seule, indépendamment de la suspension du trafic et de l’absence de réparation, être qualifiée de comportement potentiellement abusif.

La jurisprudence relative aux infrastructures essentielles qui concerne les circonstances dans lesquelles un refus de fourniture, de la part d’une entreprise en position dominante, par le biais, en particulier, de l’exercice d’un droit de propriété, est susceptible de constituer un abus de position dominante et qui se traduit in fine par l’imposition d’une obligation de fourniture si les trois circonstances exceptionnelles énoncées dans l’arrêt Bronner sont réunies, n’est pas applicable lorsque le cadre réglementaire impose déjà une obligation de fourniture à l’entreprise en position dominante ou que cette position découle d’un ancien monopole d’État.

Le libre exercice d’un droit exclusif, qui sanctionne la réalisation d’un investissement ou d’une création, peut être limité dans l’intérêt d’une concurrence non faussée dans le marché intérieur, si et seulement si les trois circonstances exceptionnelles énoncées dans l’arrêt Bronner sont réunies, la finalité de ces circonstances exceptionnelles étant de veiller à ce que l’obligation faite à une entreprise en situation de position dominante de fournir un accès à son infrastructure n’entrave pas la concurrence en diminuant l’incitation initiale à construire une telle infrastructure.

Lorsqu'une entreprise détient une position dominante du fait d’un monopole légal et non parce qu’elle jouit du libre exercice d’un droit exclusif de propriété qui sanctionne la réalisation d’un investissement ou d’une création et qu'elle est chargée, à la fois en vertu du droit de l’Union et du droit national, d’accorder l’accès aux infrastructures ferroviaires publiques ainsi que d’assurer le bon état technique de ces infrastructures et un trafic ferroviaire sûr et ininterrompu et, en cas de perturbation du trafic ferroviaire, de prendre toutes les mesures nécessaires pour rétablir la situation normale, la suppression par cette entreprise de la totalité d’une voie ferrée ne doit pas être analysée à la lumière de la jurisprudence établie en matière de refus de fournir l’accès à des infrastructures essentielles, mais comme un comportement de nature à faire obstacle à l’entrée sur le marché en rendant l’accès à ce dernier plus difficile, entraînant ainsi un effet d’éviction anticoncurrentielle.

Lorsqu'elle procède à une évaluation du comportement d’une entreprise en position dominante, la Commission est amenée à apprécier la stratégie commerciale poursuivie par cette entreprise et notamment les mobiles qui sous-tendent cette stratégie commerciale, de sorte que l’existence d’une éventuelle intention anticoncurrentielle peut constituer l’une des nombreuses circonstances factuelles susceptibles d’être prises en compte aux fins de la détermination d’un abus de position dominante.

La Commission ne se fonde nullement sur l’intention, la stratégie anticoncurrentielle ou la mauvaise foi de l'entreprise dominante pour en déduire une violation de l’article 102 TFUE, lorsqu'elle relève qu'après avoir eu connaissance du projet d’un opérateur de se tourner vers les terminaux maritimes de la Lettonie en recourant aux services d’un concurrent, l'entreprise en position dominante a supprimé la voie ferrée litigieuse en toute hâte sans s’assurer du financement nécessaire et sans prendre aucune des mesures préparatoires normales pour sa reconstruction alors qu’une telle pratique est contraire aux usages du secteur et qu’elle a pris des mesures pour convaincre le gouvernement lituanien de ne pas reconstruire la voie ferrée, pour en conclure qu'une telle suppression, examinée dans son contexte, est susceptible d’entraver la concurrence sur le marché de la fourniture de services de transport ferroviaire de produits pétroliers.

Lorsqu’au moment de décider de la solution à apporter à la déformation de la voie ferrée, elle a éliminé toute possibilité de remise en service à court terme au moyen d’une reconstruction échelonnée, l’entreprise concernée n’a pas tenu compte de la responsabilité particulière qui lui incombait au titre de l’article 102 TFUE de ne pas porter atteinte à une concurrence effective et non faussée sur le marché en se conformant à son obligation de minimiser les perturbations sur le réseau ferroviaire en rétablissant la situation normale à la suite d’une perturbation.

Les circonstances exceptionnelles citées par l'arrêt Bronner - à savoir que le refus d'accès soit de nature à éliminer toute concurrence sur le marché du demandeur du service, que ce refus soit non objectivement justifié et que le service en lui-même soit indispensable à l'exercice de l'activité du demandeur - ont été édictées, ne valent que dans le contexte d’affaires dans lesquelles était en jeu la question de savoir si l’article 102 TFUE pouvait être de nature à requérir de l’entreprise en position dominante qu’elle fournisse à d’autres entreprises l’accès à un produit ou à un service, en l’absence de toute obligation réglementaire.

TUE, 1re ch. élargie, 18 novembre 2020, n° T-814/17

Un marché public de travaux relève de la directive relative aux retards de paiement dès lors qu'il peut s'analyser en une "transaction commerciale" qui conduit à la fourniture de marchandises ou à la prestation de services.

Dès lors que les engagements pris par l'opérateur économique à l'égard du pouvoir adjudicateur dans le cadre d'un marché de travaux sont susceptibles de se concrétiser par une prestation de services, un marché de travaux publics constitue une transaction commerciale au sens de l'article 2, point 1, de la directive 2000/35.

CJUE, 9e ch., 18 novembre 2020, n° C-299/19

La notion de phonogramme ne recouvre pas la fixation d'images et de sons incorporée dans une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle, cette fixation ne pouvant être qualifiée d'exclusivement sonore.

Dès lors qu'un enregistrement audiovisuel contenant la fixation d'une oeuvre audiovisuelle ne peut être qualifiée de phonogramme ou de reproduction de ce phonogramme au sens de l'article 8, paragraphe 2, de la directive 92/100, la communication au public d'un tel enregistrement n'ouvre pas le droit à rémunération équitable et unique visée par ce texte.

CJUE, 5e ch., 18 novembre 2020, n° C-147/19

Cass. com., 18 novembre 2020, n° 19-13.402

Cass. com., 18 novembre 2020, n° 18-21.797

Cass. com., 18 novembre 2020, n° 18-23.239

Cass. com., 18 novembre 2020, n° 19-19.463

CA Montpellier, ch. com., 17 novembre 2020, n° 18/00065

La prise de contrôle exclusif de 554 magasins sous enseigne Leader Price et de deux magasins sous enseigne Casino par le groupe Aldi, qui constitue une concentration de dimension européenne, a été renvoyée sur demande des parties à l'Autorité de la concurrence en application de l'article 4, paragraphe 4, du règlement 139-2004 au terme d'une décision de la Commission en date de 4 juin 2020.

Dans le secteur du commerce d’alimentation générale de proximité à Paris, compte tenu de  la similarité des services proposés (horaires d’ouverture, livraison), des rayons et de la structure de vente par rayon (assortiment incluant aussi bien des premiers prix et marques de distributeurs que des marques nationales et des produits à forte valeur ajoutée), il existe une substituabilité entre le petit commerce de détail et les petits supermarchés implantés en centre-ville, de sorte que le marché pertinent comprend tous les formats de commerces généralistes - petits commerces de détail, supermarchés, magasins populaires, magasins de maxi-discompte et hypermarchés -, les petits libres-services étant uniquement pris en compte dans l’analyse concurrentielle lorsque le magasin cible est une supérette.

Même si par rapport au grandes surfaces conventionnelles, les enseignes de maxi-discompte commercialisent majoritairement des produits alimentaires, vendus pour la plupart sous marque de distributeurs, au sein de gammes de produits moins longues et moins profondes et malgré la concurrence réciproque qu’exercent entre eux ces deux types de magasins, ces spécificités en matière de politique d’assortiment et de format ne sont pas suffisantes pour retenir l’existence d’un marché spécifique des magasins de maxi-discompte. 

A Paris, il y a lieu de retenir des zones de chalandise correspondant à un rayon de 300 ou 500 mètres autour d’un point de vente cible, selon que celui-ci dispose d’une surface inférieure ou supérieure à 400 m², sachant que l'analyse concurrentielle tiendra compte de la présence d'hypermarchés de proche banlieue lorsque ceux-ci sot situés à moins de deux kilomètres du magasin cible.

Même si le renforcement de la puissance d'achat de la nouvelle entité sur des marchés caractérisés par une offre beaucoup moins concentrée que la demande pourrait avoir pour effet de placer certains fournisseurs des parties en situation de dépendance économique, celle-ci ne constitue une atteinte à la concurrence que si elle a un effet sur la concurrence sur un marché et, finalement, sur le surplus du consommateur, et non simplement sur un ou plusieurs fournisseurs.

La concentration n'est pas de nature à renforcer de manière significative la situation de dépendance économique du seul fournisseur des parties qui dépasse le seuil de menace, dès lors que cette situation préexistait à l'opération et que ce fournisseur est adossé à un groupe qui réalise une part marginale de son chiffre d'affaires avec la cible.

Le fait qu'une concentration ait pour conséquence de placer en situation de dépendance économique à l'égard de la nouvelle entreprise issue de la concentration un seul fournisseur ou un petit nombre d’entre eux est insuffisant à lui seul pour justifier une interdiction ou une remise en cause de l'opération, sachant que l'appréciation des cas individuels d’abus de dépendance économique relève de la compétence de l’Autorité de la concurrence statuant au contentieux.

Lorsqu'elle procède à une analyse concurrentielle dans le secteur de la distribution, l'Autorité de la concurrence retient généralement un seuil de 25 % de part de marché cumulée en surface de vente en deçà duquel elle présume l’absence de problème de concurrence et un seuil de 50 % au-dessus duquel elle présume l’existence d’un pouvoir de marché et n’exclut un problème de concurrence qu’en cas de présence dans la zone concernée d’alternatives crédibles et suffisantes à la nouvelle entité, sachant que lorsque la part de marché de la nouvelle entité est comprise entre ces deux seuils, elle effectue une analyse de la structure concurrentielle locale en écartant généralement tout risque d’atteinte à la concurrence dans les zones où la nouvelle entité fait face à la concurrence d’au moins deux groupes de dimension nationale.

La détermination des parts de marché en surface de vente ayant pour effet d’attribuer aux grandes surfaces alimentaires (GSA) conventionnelles une part de marché qui surestime leur pouvoir de marché vis-à-vis des magasins de maxi-discompte - car elle inclut également la part de l’assortiment des GSA non-répliquée par le maxi-discompteur -, il ne peut être exclu qu’une enseigne de maxi-discompte dispose dans une zone d’un pouvoir de marché significatif alors même qu'elle n’a pas franchi le seuil de 25 % de part de marché en surface totale au-dessus duquel l’Autorité procède généralement à une analyse détaillée des effets de l’opération dans le cas de rapprochements impliquant des GSA conventionnelles, de sorte qu'il y a lieu d'adapter le niveau des seuils généralement retenus en matière de distribution au regard des particularités que présente l'acquisition de magasins de maxi-discompte par un autre maxi-discompteur.

Lorsqu'elle procède à une analyse concurrentielle des effets d'une concentration réalisée entre des maxi-discompteurs, l'Autorité de la concurrence considère qu'il y a lieu de retenir un seuil de 15 % de part de marché cumulée en surface de vente en deçà duquel elle présume l’absence de problème de concurrence et un seuil de 40 % au-dessus duquel l'opération s’apparente à la constitution d’un duopole d’enseignes au niveau local, voire d’un monopole, sachant que dès lors que la part de marché de la nouvelle entité est comprise entre ces deux seuils, tout risque d’atteinte à la concurrence pourra être écarté lorsque subsisteront après l’opération deux enseignes concurrentes de dimension nationale, en mesure de concurrencer efficacement les magasins de la nouvelle entité.

Dans le cas d’une concentration horizontale, l’Autorité de la concurrence recherche en priorité des mesures correctives structurelles qui visent à garantir des structures de marché compétitives par des cessions d’activités à un acquéreur approprié susceptible d’exercer une concurrence réelle ou l’élimination de liens capitalistiques entre des concurrents. 

La concentration est autorisée sous réserve de la cession d'un magasin dans chacune des neuf zones où la part de marché de la nouvelle entité excède 40 % à condition que les repreneurs soient des acteurs de la distribution à dominante alimentaire à la fois indépendants de la partie notifiante sur toute  la chaîne de valeur, de l'approvisionnement à la vente au détail, et capables d'assurer l'exploitation pérenne des actifs cédés.

relative à la prise de contrôle exclusif d’actifs de la société Franprix  Leader Price Holding par Aldi

ADLC, 17 novembre 2020, n° 20-DCC-164

Une suspicion de dysfonctionnement d'un implant cochléaire émanant d'un expert judiciaire, qui n'a jamais examiné le matériel implanté puis retiré, ne peut suffire à établir le défaut du produit, à plus forte raison lorsque les sifflements forts côté droit, mais aussi les acouphènes côté gauche (non implanté) ressentis par le plaignant sont apparus plus de trois mois après l'implantation.

CA Montpellier, 5e ch. civ., 17 novembre 2020, n° 17/06704

Le franchisé qui a bénéficié d'une assistance diversifiée et conséquente non seulement en début de contrat, mais tout au long de celui-ci, ne peut prétendre à la nullité du contrat pour absence de cause.

Le franchiseur qui garantit au franchisé une exclusivité territoriale sur son secteur et lui renvoie toutes les commandes internet des clients résidant sur celui-ci, lui apporte un avantage substantiel par rapport à la concurrence, en lui procurant tous les moyens d'assurer sa propre réussite commerciale.

Une pratique de prix imposés, à la supposer établie, n'est pas de nature à entraîner l'annulation du contrat de franchise.

Le franchiseur, qui n'est pas tenu de s'immiscer dans la gestion du franchisé, commerçant indépendant, ne peut se voir reprocher de ne pas avoir contrôlé son activité, même déficitaire, ni de ne pas lui avoir délivré tous les avertissements utiles à une meilleure gestion de ses affaires.

L'action en nullité pour vice du consentement du franchisé est prescrite lorsqu'il a attendu plus de six ans après la conclusion du contrat pour agir alors que dès la fin de sa première année d'activité, il a pu réaliser l'ampleur du décalage entre les prévisions et les réalisations effectives.

CA Rennes, 3e ch. com., 17 novembre 2020, n° 17/07151 

La clause d'un contrat d'assurance emprunteur qui définit l'incapacité totale au titre des risques garantis sans préciser si l'inaptitude garantie concerne la capacité de l'assuré à exercer sa profession habituelle ou bien tout autre activité professionnelle, indépendamment de ses qualifications et compétences, n'est pas rédigée de manière claire et compréhensible et doit être annulée compte tenu de la réduction substantielle de garantie que son application entraîne pour la consommatrice concernée, qui, alors qu'elle a acquitté des primes d'assurance ne garantissant pas une couverture efficiente de son risque d'incapacité professionnelle, a vu sa couverture suspendue au motif qu'elle pourrait exercer une autre profession.

CA Paris, Pôle 2 ch. 5, 17 novembre 2020, n° 18/18555

CA Versailles, 1re ch. sect. 1, 17 novembre 2020, n° 19/00274

La commercialisation des produits identiques ou similaires à ceux qui ne font pas l'objet de droits de propriété intellectuelle, distribués par un concurrent, n'est pas fautive dès lors que les jeux en question, un « atelier de création » de bijoux et de décoration pour les ongles et une fabrique à gommes, se distinguent par leur nom, Cutie Stix et Gom'z Studio, les formes utilisées et leur assemblage, et leur packaging, qui leur confère une impression d'ensemble très différente. 

Une entreprise ne saurait prétendre qu'une concurrente a cherché à se placer dans le sillage du succès de l'un de ses jeux, à défaut d'éléments établissant la notoriété et le succès commercial de celui-ci au début de l'année visée, alors qu'à cette même période la société soi-disant parasite proposait déjà le jeu litigieux aux distributeurs et au public français.

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 17 novembre 2020, n° 18/24081

CA Paris, Pôle 1 ch. 1, 17 novembre 2020, n° 18/02568

CA Montpellier, ch. com., 17 novembre 2020, n° 20/01071

CA Poitiers, 2e ch. civ., 17 novembre 2020, n° 19/01947

CA Montpellier, 16 novembre 2020, n° 21/01260

Cass. com., 12 novembre 2020, n° 19-11.972

Cass. 3e civ., 12 novembre 2020, n° 19-16.927

Cass. com., 12 novembre 2020, n° 19-18.849

Cass. 3e civ., 12 novembre 2020, n° 18-25.967

La hotte de cuisine qui a été installée par le cédant d'un fonds de commerce de restauration rapide, non propriétaire de l'immeuble dans lequel le fonds se situe, constitue un bien corporel servant à l'exploitation du fonds, et comme telle, couverte par la garantie des vices cachés, dès lors qu'un fonds de commerce comprend en principe le mobilier et le matériel servant à son exploitation, sauf s'ils y ont été placés par le propriétaire à la fois du fonds et de l'immeuble.

Le cessionnaire d'un fonds de commerce de restauration rapide n'est pas fondé à invoquer la garantie des vices cachés, dès lors qu'en qualité d'acquéreur professionnel de la même spécialité que le vendeur, il aurait dû se rendre compte de la faiblesse de tirage de la hotte attachée au fonds.

Cass. com., 12 novembre 2020, n° 17-31.713

L'obligation pour le juge national de se référer au contenu d'une directive lorsqu'il interprète et applique les règles pertinentes du droit interne trouve ses limites dans les principes généraux du droit, notamment les principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité, et ne peut servir de fondement à une interprétation contra legem du droit national.

L'action en responsabilité dirigée contre le fabricant d'un produit dont le caractère défectueux est invoqué, qui a été mis en circulation après l'expiration du délai de transposition de la directive 85-374, mais avant la date d'entrée en vigueur de la loi du 19 mai 1998 transposant cette directive, se prescrit, selon les dispositions du droit interne, qui ne sont pas susceptibles de faire l'objet sur ce point d'une interprétation conforme au droit de l'Union.

Il résulte de l'article 2226 du Code civil, issu de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, directement applicable (en tenant compte du délai déjà expiré) dès lors que le délai de prescription de l'article 2270-1 courait encore à la date d'entrée en vigueur de la loi, que, la date de consolidation des blessures de la victime ayant été fixée au 6 décembre 2004, le délai de l'action en responsabilité n'était pas expiré au jour de l'entrée en vigueur de ladite loi, l'intéressé devant agir avant le 6 décembre 2014.


Si le juge ne peut pas refuser d'examiner un rapport établi unilatéralement à la demande d'une partie dès lors qu'il est régulièrement versé aux débats et soumis à une discussion contradictoire, son efficience probatoire est conditionnée par la production d'autres éléments, de sorte qu'un défaut de sécurité du tracteur litigieux tenant à l'absence de dispositif d'arrêt d'urgence à proximité de la zone dangereuse et d'avertissement à l'attention de l'utilisateur n'est pas établi en l'absence d'autres éléments corroborant un tel rapport, alors même que l'ensileuse qui équipait le tracteur comportait une affiche très explicite, imposant en cas de bourrage accidentel, de débrancher la prise de force avant de nettoyer le bourrage, tout en tenant mains, pieds et vêtements éloignés des pièces en mouvement.


CA Aix-en-Provence, 1re et 6e ch. réunies, 12 novembre 2020, n° 19/12795

Cass. com., 12 novembre 2020, n° 19-12.796

L'Autorité de la concurrence est compétente pour connaître des actes d'une fédération de syndicats dentaires libéraux qui a agi en dehors du cadre de ses missions en menant une campagne de plaintes contre des dentistes adhérents d'un réseau de soins au motif que les accords liant ces praticiens au réseau étaient contraires au code déontologique, alors qu'aucune circonstance de fait ou de droit ne permettait de tirer une telle conclusion, le fait que la conformité des conventions du réseau de soin et des conditions de leur exécution aient été tranchées par des décisions de justice postérieures au début des pratiques étant indifférent.

La campagne de plaintes menée par une fédération de syndicats dentaires, le Conseil national de l'ordre et des conseils départementaux de chirurgiens-dentistes, fondée sur le respect des règles déontologiques applicables, qui visait à obtenir la résiliation des accords passés par des praticiens avec un réseau de soins, constitue une intervention dans une activité de services en ce qu'elle invite les praticiens à adopter un comportement spécifique sur le marché, sans manifester l'exercice d'aucune prérogative de puissance publique.

La circulaire élaborée par le conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes relative à l'analyse des conventions et protocoles susceptibles d'être signés par des praticiens avec les réseaux de soins et les ateliers-formations insistant sur le caractère potentiellement antidéontologique de ces réseaux, qui reposent sur une interprétation erronée des règles déontologiques applicables aux chirurgiens-dentistes et ont contribué au succès de la campagne de plaintes menée par le conseil de l'ordre contre les praticiens adhérents de ces réseaux, n'impliquent la mise en oeuvre d'aucune prérogative de puissance publique susceptible d'écarter la compétence de l'Autorité de la concurrence.

Les pratiques du Conseil national et des conseils départementaux de l'ordre des chirurgiens-dentistes qui concernent la pratique de l'art dentaire ou l'activité de gestion de réseaux de soins sont susceptibles d'avoir affecté au moins potentiellement le commerce entre Etats membre de manière sensible dès lors que le courant d'échanges entre Etats membres peut se traduire par un exercice de la profession en zone transfrontalière ou la volonté d'opérateurs économiques, membres d'autres Etats membres, de s'établir sur le territoire national.

Des organismes professionnels peuvent être sanctionnés pour des pratiques qui, bien que d'apparence unilatérale, constituent en réalité des ententes car elles expriment la volonté de leurs membres et caractérisent, au sens du droit de l'Union, une décision d'association d'entreprises.

La preuve de la concertation entre une fédération de syndicats de dentistes, le Conseil national et les conseils départementaux de l'ordre des chirurgiens-dentistes résulte d'un faisceau d'indices, tels qu'une réunion, la mise en oeuvre conjointe d'une campagne de plaintes, la définition d'un plan d'action contre un réseau de soins, l'appui juridique fourni par certains, ou des échanges d'informations par courriers et/ou courriels.

Le preuve de la distanciation d'une pratique anticoncurrentielle ne peut résulter d'un courrier privé, le fait qu'il ait été communiqué par son destinataire dans le cadre d'une procédure judiciaire demeurant sans influence alors que les agissements ultérieurs de son auteur démentent toute volonté de distanciation.

Le fait que les conseils départementaux de l'ordre des chirurgiens-dentistes ne se soient ni concertés entre eux ni entendus avec d'autres organismes demeure sans influence sur l'appréciation de l'existence d'un accord de volontés concernant les pratiques individuelles qui leur sont reprochées qui caractérisent une décision d'association d'entreprises au sens de l'article 101, paragraphe, TFUE.

La campagne de plaintes menée par une fédération syndicale de dentistes libéraux, par le Conseil national et des conseils départementaux de l'ordre des chirurgiens-dentistes qui visait délibérément à contraindre les chirurgiens-dentistes à quitter le réseau de soins dont ils étaient adhérents et à exclure ce réseau de soins du marché s'apparente, par son objet même, à une pratique d'éviction qui, en raison de sa nocivité particulière, constitue l'une des infractions les plus graves au droit de la concurrence, la circonstance qu'au lancement de la campagne, il n'existait aucune jurisprudence reconnaissant la conformité des pratiques commerciales du réseau au code de déontologie applicable aux chirurgiens-dentistes étant sans influence sur la qualification de la pratique.

Les courriers diffusés par des conseils départementaux de l'ordre des chirurgiens-dentistes, qui ont contesté la conformité des contrats conclus entre des chirurgiens-dentistes et des réseaux de soins en prétextant la violation des règles déontologiques par ces praticiens, ont contribué à la mise en oeuvre de la pratique d'éviction dirigée contre un réseau de soins en lui conférant une effectivité accrue.

Les pratiques d'un conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes qui ont consisté dans la diffusion d'interprétations inexactes du code de déontologie afin de remettre en cause les contrats signés entre un réseau de soins et les praticiens affiliés à ce réseau, au prétexte qu'ils violeraient les règles déontologiques, constituent constituent des pratiques d'association d'entreprises constitutives d'ententes anticoncurrentielles par objet au sens de l'article 101 TFUE et de l'article L. 420-1 du Code de commerce.

Même si, lorsque la preuve de leur objet anticoncurrentiel est apportée, il n'est pas nécessaire d'établir les effets qu'elles pourraient engendrer, les pratiques d'éviction mises en oeuvre par les organismes professionnels représentant les chirurgiens-dentistes ont eu des répercussions effectives sur des réseaux de soins et leurs partenaires dès lors que la campagne de boycottage, à la suite de laquelle plusieurs praticiens ont mis fin à leur partenariat, a eu pour effet anticoncurrentiel, au moins potentiel, d'entraver, sur les marchés en cause, le développement des réseaux de soins en général, dont un réseau, en particulier, qui a pour objectif de réduire les inégalités d'accès aux soins en élargissant l'offre de soins à des conditions abordables.

L'organisation d'une campagne de plaintes par une fédération des dentistes libéraux, le Conseil national et des conseils départementaux de l'ordre des chirurgiens-dentistes, ainsi que les actions complémentaires mises en oeuvre par ces conseils départementaux destinées à soutenir cette campagne, afin d'affaiblir les réseaux de soins, en dissuadant les praticiens d'y adhérer et en exerçant des pressions sur les partenaires potentiels, s'inscrivent dans un projet global qui avait pour objet anticoncurrentiel d'entraver l'activité de ces réseaux, les interactions de ces pratiques ayant contribué à la réalisation de l'ensemble des effets anticoncurrentiels recherchés par leurs auteurs, relatifs au boycott des réseaux de soins et de leurs partenaires.

L'infraction complexe qui repose sur un plan d'ensemble est présumée revêtir un caractère continu qui découle de la circonstance que les différentes pratiques qui la composent se sont succédées dans le temps et que l'objet et les effets, à tout le moins potentiels, des invitations au boycott ont perduré tant que les publications professionnelles diffusées auprès des chirurgiens-dentistes n'ont pas été remises en cause par leurs auteurs.

Les actions menées par une confédération regroupant plusieurs syndicats départementaux qui ont toutes pour objectif d'entraver l'activité de certains réseaux de soins, en appelant les praticiens à refuser ou cesser toutes relations contractuelles avec de tels réseaux, ont un objet anticoncurrentiel, le fait que la confédération ne serait pas opposée au développement de réseaux dits "négociés" et que les pratiques qui lui sont reprochées constitueraient une réponse aux multiples témoignages de détournement de clientèle dont certains chirurgiens-dentistes se prétendent victimes étant sans influence sur le caractère anticoncurrentiel de ces pratiques.

L’Autorité de la concurrence, qui apprécie souverainement l’opportunité de se saisir d’office, n'est pas tenue de rendre compte des informations qui ont emporté sa décision de se saisir ou des conditions dans lesquelles ces informations sont parvenues à sa connaissance. 



L'Autorité de la concurrence n'est pas tenue de motiver ses décisions de jonction ou de disjonction de procédures.

La procédure spécifique de protection du secret des affaires, qui n’a pas pour vocation d’assurer la protection du secret médical, ne relève pas de la compétence du collège de l’Autorité de la concurrence.

La notification de griefs adressée à un organisme non visé dans la plainte ne traduit pas une violation du principe d'impartialité, dès lors que, saisie in rem, l'Autorité de la concurrence, peut retenir des pratiques relevées dans le cadre des investigations réalisées par ses services d'instruction. 

La sanction pécuniaire applicable à des ordres et syndicats professionnels qui ne réalisent pas de chiffre d'affaires doit être déterminée forfaitairement, en tenant compte de leur capacité à faire appel à leurs membres pour lever les fonds nécessaires à son paiement.

Une pratique de boycott constitue une infraction particulièrement grave, même si elle ne porte pas directement sur la fixation des tarifs, a fortiori lorsqu'elle est mise en oeuvre par un ordre professionnel et concerne le secteur des soins.

relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la chirurgie dentaire

Court decisions rendered in 2020 - Page 12